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 It doesn't hurt me - Maaron

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MessageSujet: It doesn't hurt me - Maaron   It doesn't hurt me - Maaron EmptyMar 22 Jan - 9:19





Aaron & Mary
“ It doesn't hurt me ”


Liddington. Rien que le nom lui donnait des frissons. Terreur nocturne de ses journées, cauchemars à peine assumés de ses souvenirs, et la voilà obligée d'y remettre les pieds dans son esprit presque contre sa volonté. Etait-ce vraiment nécessaire de retourner en arrière, de replonger dans un passé qu'elle avait voulu mettre de côté ? A quelques mètres de la salle sur demande, elle n'a plus vraiment le choix. Le panneau de bienvenue délabré de la ville l'a accueilli avec ses couleurs défraîchies, identique à celui qu'il était quatre ans auparavant... dans sa tête. Liddington. Patelin perdu au milieu de rien, coincé entre deux époques. Dans son esprit, par-delà les vitres du taxi, elle observe les rues qui présentaient trait pour trait les mêmes boutiques qui se dessinaient dans sa mémoire. Brutal retour en arrière pour une jeune femme qui cherchait à tout prix à fuir cette morosité figée. Quatre années de sa vie se rembobinent seconde après seconde, alors que les kilomètres défilent sur le compteur. Le film de sa vie, version sentimentale, défile dans son esprit, pour revenir à la date fatidique qui a marqué un tournant radical dans son histoire -et là, sur la banquette arrière artificielle, elle a la désagréable impression d'avoir à nouveau neuf ans.
Le taxi continue sa course folle -ou plutôt sa lente ascension, pour être précis- quittant la Grand Rue pour s'enfoncer un peu plus dans la brumaille. Autour d'elle, les bâtiments se raréfient, ne présentant plus que quelques habitations toutes plus éloignées les autres. L'humidité contenue dans l'air s'étire en un brouillard fatigué, troublant le paysage qui défile sous les yeux de Mary en se collant sur la vitre. Les secondes passent, ses yeux se détournent de la vitre barbouillée de brume, et le véhicule s'arrête enfin. Equinoxe est dehors à respirer l'air frais de l'après-midi. Le crissement de pneus dans son dos lui indique que le conducteur, cette illusion, est déjà reparti, mais elle lui jette à peine un regard, trop concentrée sur le bâtiment qui lui fait face, celui qui constitue son foyer même si elle l'a quitté. Intacte à ses souvenirs, elle la détaille un peu plus à chaque pas qu'elle fait vers elle. Le porche n'est pas très loin, et sa main cogne doucement contre le bois de la porte d'entrée.

La fermette, elle non plus, n'a pas changé. Elle est restée la même, avec son papier peint d'époque et ses tableaux accrochés sur les murs, ses tapis partout sur le sol et son canapé qui continue de survivre miraculeusement aux années. Fidèle compagnon des Duchesne depuis toujours, à suivre silencieusement leurs épopées et leurs bêtises en tout genre, il méritait d'être jeté mais il était trop précieux à leurs yeux. Aujourd'hui, il n'accueille plus les bouleversements d'une gamine de neuf ans, mais le sérieux d'une préadolescente qui lutte contre elle-même. Elle attend patiemment, laissant son regard vagabonder dans cette pièce qu'elle (re)connaît trop bien. Rien n'a changé de place, pas même la lampe à pied qui menaçait de s'effondrer à chaque utilisation ; tout parraît si réel, même si cela ne l'est pas. Tout est encore là, tant et si bien qu'elle a l'impression d'être rentrée dans une maison de poupée épargnée par le temps. Parce que c'est ça, Liddington. Une ville qui vous retient prisonnier de toute liberté, qui vous enferme et vous condamne à jamais. Elle avait réussi à s'envoler, à s'en échapper, et elle a replongé, comme homme qui tend le bâton pour se faire frapper. Elle ne voulait plus y penser, non, elle ne voulait pas. Elle se le répète chaque minute de chaque heure, à chaque seconde, comme pour s'en persuader elle-même. Elle ne voulait pas, mais pourtant, elle est tout de même là.

A force de flâner dans l'air, ses yeux finissent par se poser sur la cheminée, seul élément qui s'est offert un peu de changement. Quittant le confort du canapé usé, elle se lève et rejoint en quelques pas la petite étagère qui surplombe l'antre de feu. Quelques petites photographies ont fait leur apparition depuis son départ -en quatre ans de vie, il s'en est passé des choses. Des captures de son frère, des sourires, des poses devant quelques bâtiments de la ville. Les clichés les plus récents lui présentent un homme au visage qu'elle connaît, mais à l'air radicalement différent. Lui aussi a grandi avec le temps, ce qui n'est pas étonnant compte tenu de leur gémellité. Silencieuse, elle contemple le cadre dans ses mains. Aaron, devant une bibliothèque, couvre-chef à plume sur la tête. Aaron, mon frère, qu'est-ce que tu deviens ? Cette pièce. Il faut sortir. L'air lui manque. Jamais elle n'aurait dû entrer.

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Dernière édition par Equinoxe M. Duchesne le Mar 22 Jan - 22:01, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: It doesn't hurt me - Maaron   It doesn't hurt me - Maaron EmptyMar 22 Jan - 9:47





Maintenant nous sommes tout seuls

C'est le silence qui englobe la pièce, c'est lui qui ronge petit à petit le dortoir des rouges. Elle dégage de la poussière, une aura bien étrange qui lui tourne autour, mais étrangement, c'est le seul lieu où il se sent bien. Où il peut fermer les yeux un instant sur une vie morose, une vie habituelle qui finit par ronger de l'intérieur. Ouvrir un livre, glisser ses doigts sur les pages. Des phrases, des mots, des fantaisies et parfois des vérités. Ah qu'elles sont belles, les mots peuvent soigner, faire du bien et se glisser en nous. Comme un pansement, peut-être pas le meilleur au monde, mais au moins il permet de nous faire disparaitre. Quelques minutes, quelques heures. S'extirper les souvenirs, laisser les pensées sombres là où elles doivent être et continuer. Marche ou crève paraît-il. C'est la politique de ce monde, et ça, il l'a compris après son départ. Beaucoup de temps pour sortir d'une bulle, beaucoup de temps pour se séparer d'un idéal, d'une vision agréable. Se prendre la vérité macabre de Poudlard seul ? C'est douloureux. Puis, au bout du compte, la souffrance commence à s'estomper, petit à petit, comme une mauvaise habitude à prendre. Il a envie d'en sourire, et étrangement c'est ce qu'il fait. Le pauvre gamin mélancolique à demi-allongé sur son lit, qui attend que le temps passe. Défile, se ratatine sous ses yeux. Le silence revient, vous assassine, mais il se veut parfois apaisant. Il arrive parfois qu'il se complaise dans tout ça, dans cette ambiance vieille, qui s'écroule. Les mains posées sur ce vieux livre, il s'amuse à retracer le titre du bout des doigts, comme si tout n'était que découverte à ses yeux. Il repose l'ouvrage et le voilà déjà dehors du dortoir. Silencieux, juste le vent pour parler un peu. Il sait écouter comme personne, du moins, il aime à croire qu'il n'est pas seul dans le couloir à une heure aussi indue. Peut-être qu'une gamine joue au ballon ? Peut-être qu'Eros s'amuse à se plaindre ? Mais, il n'entend rien. Il y croyait. Après tout, on a tous une raison de croire en quelqu'un, ou quelque chose. Son père ? Dieu, seulement ce type un peu étrange avec sa longue barbe, celui qui aurait fait le monde de ses propres mains ? Ses mythes étranges ? Adam et Eve ? Cette pensée lui arracha un frisson. Durant un temps, cette histoire a été un élément de polémique entre lui, son père et... elle. Numéro 1, numéro 2, il est Duchesne deuxième du nom. Il croyait que ses parents avaient arraché une côte de sa chère soeur et qu'il était venu de terre par la suite. D'où la similitude des visages. Il aimerait en rire encore, oh oui, à gorge déployée comme un type aliéné. Mais, il est impossible de ressortir les souvenirs et d'en rire. Surtout en sachant que le dernier est tout sauf agréable.
Pourquoi il y pense d'ailleurs hein ? Quatre ans. Quatre ans qu'il ne la plus vue. Il serre ses poings à cette pensée, il inspire un instant tout en marchant. Il se trouve désormais face à... Liddington ? Impossible. La salle sur demande. Bien sûr, il en avait entendu parler. Toujours cette même sensation avec en plus, les sons. Le bois qui craque, le vent qui s'écrase sur l'herbe, sur son visage. Liddington constitue à peu près toute sa vie, toute son existence. Onze années sans avoir bougé d'ici. Certains pourront dire que c'est une assez triste histoire, et d'autres ne préféreront pas se poser de questions. Après tout, il faut être un peu cinglé pour aimer l'ambiance qui y règne. Aucun avenir n'est possible ici. Avenir, futur. Avenir. Il se mordille la lèvre inférieure tout en secouant sa tête. Face à ce morceau de bois qui constitue la porte, n'ayant plus les clefs pour pouvoir y entrer, sa main s'écrase avec nonchalance sur le bois qui visiblement commence à se dégrader. La porte s'ouvre, une chaleur en sort, et un visage familier. Il entre, la porte se referme, il se retourne : il ne peut plus l'ouvrir. Le bruit d'un tic-tac le fait sourire. Comme figé dans le temps. C'est une maison de poupée, ou du moins presque. La décoration n'a jamais changé, le temps a commencé à certes tout dévorer, mais n'a jamais tout avalé. Cette maison est un musée, oui, ou bien une photo, quelque chose qui lui ferait presque chaud au coeur. Ce n'est qu'une illusion. Mais il s'en fiche. A vrai dire, à chaque fois qu'il revient ici, il a l'impression de redécouvrir. Comme un gosse lâché dans un magasin de sucreries, glisser ses doigts sur les murs légèrement froids. Se souvenir. Non, surtout pas. Ne plus se souvenir, fermer les yeux, et surtout : essayer d'oublier. Le passé, c'est derrière, oui, derrière, loin. Loin. Machinalement, ses pas le guident dans le couloir de cette maison factice, ses yeux se posent sur le plafond, sur tout ce qui peut décorer cette vieille maison. Puis un fameux lieu, où bons nombres d'aventures loufoques se sont déroulées, du moins, il essaie tant bien que mal de faire disparaitre ces dites aventures de sa fichue mémoire. Il le veut tant bien que mal, qu'il puisse sélectionner, les jeter dans un coin et ne plus jamais les ressortir. Le couloir, la lumière qui se dégage, l'encadrement de la porte.
Un silence.
Une silhouette, une personne, quelqu'un. Il fronce ses sourcils, sa tête sait, oh oui bon sang qu'elle sait qui se trouve là. Mais, son coeur refuse de s'ouvrir, il veut se tirer, comme ses jambes. Rien ne bouge, rien ne veut s'actionner. Au bout du compte, il s'est imaginé des tas de scénarios. Lui hurlant, pleurant, sautant sur cette dite personne. Mais, tout sauf ça. Mary. Elle est vivante, là, devant lui, en chair et en os. Et elle agit pourtant, comme une maladie en lui. L'incompréhension, le soulagement, la colère, la tristesse. Pincez-le, jetez-le hors de cette maison, dites-lui qu'il est en train de rêver. Il aimerait s'en persuader, y croire naïvement comme l'enfant qu'il était. Mais, quand la mentalité d'adulte vous frappe de plein fouet, il n'y a plus aucune échappatoire. Il se sent rétrécir tout à coup, sept ans en arrière, si ce n'est plus. Elle a changé, ou du moins, il n'en sait rien. Elle ne passe pas inaperçue, elle vient d'une grande ville, et tout ça, ça se voit. De quoi il a l'air à côté ? Sûrement pas grand-chose. Après tout, il n'est que le numéro 2. Celui qui fait office d'être là, juste pour meubler la maison, pour faire rire un peu. Il n'est que celui qui se bourre de promesses, d'idéaux. Son ventre le tiraille, et son coeur saigne à nouveau. Il claque à lui arracher le torse. Il aimerait lui sauter dessus, se jeter sur elle, en lui hurlant : BON SANG, espèce d'idiote tu m'as foutrement manqué ! Mais, rien. Comme toujours, c'est l'imagination qui laisse tout penser, mais la réalité qui vous rattrape en plein vol. Il a envie de reculer, de partir en courant, ou même de lui coller le plus beau poing au monde dans sa figure. Il n'est qu'une poupée désarticulée. Ses yeux bleus, sa tignasse claire. Ce miroir. Ce numéro 1. Equinoxe. Ou l'anthologie de la douleur. C'est assez fou, comme elle peut vous prendre d'assaut tout à coup. Les souvenirs qui flambent, qui le brûlent de l'intérieur. Un immense feu qui se propage en lui, qui commence à le bouffer, doucement, mais sûrement. L'émotion grimpe. Il a envie de tout et de rien à la fois. Il a ce pétillement dans le regard, mais pas celui qui est beau à voir. Non, celui qui laisse à présager que la fatalité vient à nouveau de pointer le bout de son nez. Quatre ans de silence, quatre ans de presque mise à mort. Un fantôme qui surgit de n'importe où. Celle pour qui il aurait tout donné à l'époque, celle qui avait juré. J'te le promets. Le mensonge rattrape, le mensonge est trop alléchant. Il aimerait poser cette fameuse question : le pourquoi fatidique, celui qui vous arrache la langue d'un coup. Mais, rien, rien. Il suffit seulement d'un regard. Toujours ce fil, toujours cette impression que le monde s'écroule en revoyant ce fameux visage. Elle est en vie, elle est à Poudlard. Bizarrement, l'anxiété le ferait presque rire, pourtant, il sait qu'il sera muet. Que rire n'est peut-être pas la meilleure solution et que de toute manière : sa main se met à trembler, son corps commence à flancher. Un brouillard. Numéro 1, numéro 2. A la vie, à la mort, hein Mary ? Sa bouche s'ouvre, il aimerait bien poser cette question, gueuler tout à coup, exploser. Il est l'explosif, il est cette allumette craquée. Juste un murmure, des sourcils tristement froncés. « C'est une blague, c'est ça ? » Et le pire, c'est qu'il connaît la réponse. Elle est réelle. Elle est aussi entrée dans cette pièce étrange. Pour la première fois, il ne rêve pas de ça, pour la première fois, il ne retombe pas dans un espoir de la revoir un jour. Ce n'est pas une mise en scène, ni un masque, ni un acteur. Tout ça, c'est bien vrai. La douleur aime en rire, et il l'entendrait presque ricaner au loin. Se moquer de cette situation, de ce triste tableau. Les voix d'enfants, les rires qui résonnent contre les parois de son fichu crâne. Y'a pas de numéro 2, sans numéro 1. Il n'a plus de chiffre, il n'a plus rien.
Aaron, ce frère, ce miroir cassé, ce puzzle inachevé.
(c) Myuu.BANG!


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Dernière édition par Aaron Duchesne le Mar 22 Jan - 23:25, édité 4 fois
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MessageSujet: Re: It doesn't hurt me - Maaron   It doesn't hurt me - Maaron EmptyMar 22 Jan - 22:13





Aaron & Mary
“ It doesn't hurt me ”


Absorbée dans la contemplation de la photographie, elle entend à peine la porte d'entrer grincer, et le bois du parquet craquer sous le poids du corps malingre de son égal, préférant se concentrer sur le cliché auquel elle accorde un peu trop d'importance à son goût. Aaron a l'air d'avoir bien douze ans dessus, treize peut-être. Elle retournerait bien la photographie pour voir si une date y est inscrite, mais elle s'en abstient - elle sait pertinemment que son père ne le fait jamais. Le cadre reste intact dans ses mains, et elle reste immobile à l'observer. Pour ajouter un peu de vie dans ce cliché ? Pour essayer de frôler de la main l'essence de son double qu'elle ne connaît plus ? Si proche, et pourtant si distant. Depuis toujours et pour toujours. Elle peut caresser le vitrage de la photographie, mais ses doigts de l'atteignent pas. Il y a toujours cette barrière entre eux, faite de verre ici, faite d'autres choses en vrai. Un mélange de silence, de distance et d'évitement, avec un arrière-goût de négligence. Loin des yeux, loin du coeur ? Elle avait voulu y croire, mais on n'efface pas neuf ans de sa vie avec un ticket de bus. Elle avait tenté le coup, mais on ne se sépare pas de sa moitié comme on dit "au revoir" à un voisin. Lorsqu'elle avait quitté Liddington, elle avait laissé plus que des souvenirs derrière elle, et elle le savait bien. Son fardeau, sa croix, ce supplice qu'elle s'infligeait chaque jour, c'était l'effet papillon qu'elle avait causé chez son frère en disparaissant du jour au lendemain de sa vie. Elle était l'origine de sa douleur, la responsable de ses souffrances. Mais pas de retour en arrière. Jamais. Tu lui as promis, mais tu n'aurais jamais dû le faire. Il l'avait eu, comme toutes ces autres fois. Trop bonne, trop faible. Elle est toujours comme ça quand elle est avec lui. Elle se laisse avoir, encore et toujours. Et encore aujourd'hui, au fond, elle a peur de le revoir. Peur, parce que même si Aaron ignore, il est bien la seule personne qui pourrait la faire revenir définitivement dans ce trou perdu une fois sa fin de scolarité. Et rien ne l'effraie plus que ça.
Alors lorsqu'elle se retourne et qu'elle aperçoit en face d'elle un visage qui fait étrangement écho au sien, elle ne sait pas trop comment réagir. Comme si la silhouette maigrichonne du cliché avait glissé pour s'incarner en chair et en os devant elle. Numéro 2. Le seul. L'Unique. Le seul à avoir tout su d'elle. L'unique personne qu'elle avait détruite de ses propres mains. L'incarnation même de ce qu'elle fuyait depuis des années. Toujours ce même air, toujours cette même dégaine malgré les années qui ont fondu sur lui. Il a grandi, il a vieilli -tout comme elle, finalement. Le silence les happe tous les deux et, l'un dans l'autre, l'un avec l'autre, ils ignorent quoi faire. Parce qu'au fond, c'est comme une mauvaise plaisanterie. Celles d'un goût douteux que les gamins des rues s'amusent à faire aux passants, quand ils sont en manque d'aventure. C'est comme tendre la main en fermant les paupières, attendant après une surprise agréable qui ne vient pas. Les secondes s'étirent et s'étiolent, et lorsqu'on ose enfin ouvrir les yeux, on se retrouve avec un insecte remuant lamentablement sur la paume de sa main. C'est rageant. Rageant de savoir qu'on s'est fait avoir comme la plus pure des imbéciles -mais quelque part, ce sont les règles du jeu, non ? Ici, dans ce salon épargné par le temps, il n'y a que deux protagonistes -Aaron, et elle-même. Les règles du jeu, ils ne les connaissent même pas. L'un pense blanc, l'autre pense noir. Le blanc préfère resté, le noir a choisi de partir. Ce jeu auquel ils jouent depuis toujours, il s'appelle la vie. Mais sans crier gare, Mary avait choisi d'en modifier les règles, éjectant son frère de son monde comme on claque du doigt pour éloigner un insecte. Elle pourrait lui expliquer le pourquoi du comment, maintenant qu'elle se retrouve avec lui. Mais son coeur est muet, et ses lèvres encore plus. Elle ne s'attendait pas à le voir. Elle était venue par curiosité. Pour ensuite peut-être envisager de revoir son frère. Plus tard. Beaucoup plus tard. Ou peut-être pas. Et voilà que maintenant, la totalité de son plan plongeait dans le néant, rejoignant les débris qui constituaient ce que le commun des mortels appelle un esprit.

Finalement, c'est Aaron qui ouvre la bouche le premier. Toujours dans l'encadrement de porte, il n'a pas bougé. Seuls ses sourcils sont froncés, signe d'incompréhension flagrant -ce pourquoi elle ne le blâme pas. Elle non plus ne comprend pas. Dans un monde parfait, on appellerait ça une coïncidence, mais les coïncidences ne sont pas aussi évidentes dans sa réalité. Ils n'auraient pas dû se croiser, pourquoi avait-elle fallu qu'elle soit là, ici, maintenant ? La réalité est traitre, et son quotidien n'est qu'une succession d'évènements loin d'être fortuits. Aaron appellerait sûrement ça le destin, mais c'est une toute autre chose qu'elle voit. Comme on se joue d'une marionnette. Si elle avait coupé les fils qui la retenaient à son passé en s'échappant de Liddington, ce n'était pas pour les retrouver à peine le pied posé dans cette salle. Quelle ironie. Et le pire, dans toute cette histoire, c'est qu'elle se voyait mal claquer la porte à nouveau, maintenant qu'elle se retrouvait coincée entre le mur et son frère. Sa réplique, sa copie, son sosie. Autrefois son ombre, aujourd'hui l'esquisse d'une autre silhouette. Lui, a changé. Malgré leurs visages si semblables, ils ont emprunté des routes différentes, trop marquées dans leur allure. Il n'a pas cette assurance que dégage Mary, non, il a plutôt cet éclat brillant dans les yeux, signe qu'il serait prêt à chavirer au moindre obstacle. Mais l'existence est vile, et des obstacles, il va en rencontrer plus d'un, pas plus tard que maintenant. « Si c'est une blague, elle n'est pas vraiment drôle. » Elle répond sur le même ton, mais plus fort que son jumeau. Nonobstant, elle se détache de la contemplation de son frère, jetant un dernier regard à la photographie qu'elle tenait pour la reposer lentement au-dessus de la cheminée. « Et si j'avais su que tu serais là, je serais venu à un autre moment. » Equinoxe. Franche. Trop franche. Parfois trop blessante. Comme maintenant. Elle ne pense pas vraiment à mal en disant ça, elle ne fait qu'exposer ce qu'elle pense. Ce qu'elle ressent, c'est trop complexe, trop compliqué pour être dit -ce n'est pas pour rien qu'elle a fait la morte pendant près de quatre ans. Est-ce qu'elle doit faire la conversation maintenant ? Lui demander comment il va, faire comme si de rien n'était, comme si rien n'avait changé pendant tout ce temps . Elle voudrait bien, mais elle refuse en même temps. Réduire ses efforts à néant, c'est comme l'enchaîner de nouveau à Aaron. Elle ne dit pas non, elle ne dit pas oui. L'innocence de leur enfance s'est envolée depuis des lustres, à tel point que l'un en face de l'autre, ils se comportent comme deux étrangers, deux fauves s'observant en tentant de déceler le bon moment pour passer à l'attaque-si attaque il y a un jour.
Ses lunettes glissent sur son nez, et elle les attrape pour frotter les verres contre le revers de sa robe. Ce n'est pas qu'elle en a déjà marre d'être ici, c'est l'impression d'être fait comme un lapin en cage qui lui déplaît un peu plus à chaque seconde. Observer son frère, elle peut continuer, et pendant longtemps. Mais parler avec lui, c'est trop. Trop pour elle, et trop pour eux. A ouvrir un peu plus la bouche, elle ne fait que remuer le couteau qu'elle a enfoncé dans le coeur d'Aaron, ouvrant un peu plus la plaie béante qu'elle a causée. Elle s'acharne sur ses verres, se concentrant sur sa tâche comme s'il s'agissait de la chose la plus importante au monde. Retarder l'échéance d'une façon aussi malhabile ne lui ressemble pas. Elle le sent, il le sait. Elle agit comme une imbécile, mal à l'aise, alors qu'elle déteste ça. Numéro 1, n'est-ce pas ? Là, dans cette pièce, elle n'a même pas l'impression d'en être le moindre petit grain. Gamine perdue, cette fois c'est elle qui l'est. Alors lorsqu'elle réajuste enfin ses binocles sur son nez, son regard croise de nouveau son semblable, s'y fixant alors qu'elle relâche un léger soupir, sa langue prenant le temps d'humecter ses lèvres -tant de micro-signes qui trahissent son état mais qu'elle ne peut s'empêcher de produire, quite à se trahir. Ses mains s'agitent légèrement, elle ne sait pas quoi en faire, et puis finalement décide de les caser quelque part autour de son bassin. Face à face. Encore. Encore. Encore. Aaron n'a pas encore fait un pas dans la pièce -jouer la carte de la désinvolture n'est peut-être plus de mise, plus maintenant. Alors elle laisse ses lèvres souffler d'autres mots, comme tant de lames assassines qu'elle voudrait ne pas lancer. « Je ne m'attendais pas à te voir ici. » C'est tout ce qu'elle a trouvé à dire. Elle ne gagnera pas un prix littéraire avec ces quelques mots, mais c'est toujours mieux que rien. Sincère, elle l'est, un peu trop peut-être. A ce degré-là, ça passe ou ça casse, la deuxième option restant plus probable que la première. Va-t-en. Repars pendant qu'il est encore temps. A quoi bon rester alors qu'elle ne fera que souffrir encore plus sa moitié déchirée ? Crétine, tu t'es cru plus forte que le destin, et te voilà repartie de zéro.

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MessageSujet: Re: It doesn't hurt me - Maaron   It doesn't hurt me - Maaron EmptyJeu 24 Jan - 6:08





Maintenant nous sommes tout seuls

C'est presque fatidique quand on y pense, presque triste toute cette histoire. Prendre un modèle durant des années, s'y attacher, l'aimer de toutes ses tripes et un jour : il finit par changer. Le regard plein de malice, se change en pierre, quelque chose que lui ne connaît pas. Paraît que passer à l'adolescence, ça vous fait une sensation étrange. Lui ? Il n'a rien senti passer. Peut-être que Mary, elle, a subi ce changement radical. Il mordille sa lèvre inférieure, la tristesse lui dévore l'âme, et plus il la regarde, plus il sent ce couteau s'enfoncer. Profondément. Remettre en doute des années de rires, de sourires, d'engueulades secondaires : et penser qu'au bout du compte, tout était faux. Si elle est là ? Il ne pourrait dire pour quelle raison, et à vrai dire, il a des doutes que ce soit pour lui. Oh, de grands doutes, il pourrait même barrer cette hypothèse de sa tête, laisser de côté ses espoirs pour les autres. Pour ceux qui en ont vraiment besoin. Parfois il pense bien, parfois, il pense mauvais. Là, il est perdu entre les deux. Un cas ou un autre, il ne sait pas comment réagir, s'il doit éclater, ou bien laisser courir. Parce que de toute manière, au bout de quatre ans, on finit par ne plus se poser de questions, ou du moins, c'est ce qu'un type normalement constitué ferait. Mais, là, ce n'est pas pareil. Là, tout est différent. Après tout, certains le disent : il y a ce truc entre les jumeaux, un fil invisible qui ne cesse de les lier au bout des années, malgré les kilomètres. Combien de fois s'est-il posé la question ? Combien de fois s'est-il laisser à penser qu'elle était morte ? Combien ? Il ne compte même plus. Plus la force, plus l'envie, plus rien. Et quand la réponse vous tombe sur la figure, on aimerait beaucoup de choses, mais là, c'est le silence qui parle. Celui qui révèle à peu près tout. Aucune possibilité d'éviter ce regard, et il le dévore de l'intérieur. Il voit, il revoit encore tout, ces souvenirs qui s'amusent de lui, et il les entend se moquer lamentablement de la situation, de loin, très loin. C'est bien beau de vouloir penser que tout sera comme avant, mais comment hein ? Des deux côtés, aucun pas, aucun signe que tout doit redevenir un lien entre deux jumeaux. Entre deux numéros qui pourraient se sacrifier pour l'un, comme pour l'autre. Maintenant ? Plus de chiffre, juste deux prénoms. Et quitte à jouer dans le jeu de l'étranger, autant oublier aussi le nom de famille. Juste deux sosies qui se croisent, deux sosies qui se reconnaissent physiquement, mais à l'intérieur, il ne reste plus grand-chose. Heh, Equinoxe, rien pourra nous séparer hein ? Ses yeux se baissent alors tout à coup sur le sol, il sent son corps gonfler, de tout ça, de trop de sentiments qui lui viennent d'un coup. Et il se demande, par curiosité, lequel de ce mélange tordu, va sortir en premier. L'incompréhension il suppose, ou peut-être que la tristesse ne va pas se laisser marcher dessus. Mais, la colère est plus vicieuse que tout. « Si c'est une blague, elle n'est pas vraiment drôle. » Oh, bien, très perspicace. La voix forte, assurée, elle n'est en aucun cas déstabilisée, elle a trop d'assurance, elle en a toujours eu et c'est quelque chose qui ne partira certainement pas. On ne peut changer les gens, et certainement pas Mary. Elle, peut vouloir, mais essayez seulement de la résonner : elle ne vous écoutera pas. Après tout, elle se trouve très bien telle qu'elle est. Sa main droite se glisse sur son bras gauche, et il serre, comme si sa pauvre vie en dépendait. Si on ne peut plus se rattacher à une soeur, autant se jeter sur son propre corps, autant se rattacher au peu qu'il reste. Il ose à nouveau poser ses yeux sur elle, sans rien ajouter de plus, il sait qu'elle n'a pas fini. Quitte à commencer à causer, autant continuer sur sa lancée et faire encore bien plus mal. Allez, soyons fous ! « Et si j'avais su que tu serais là, je serais venu à un autre moment. » Cette phrase lui arrache une douleur dans l'âme, un peu partout à vrai dire. Il en écarquille ses yeux, toujours cette incompréhension qui le prend directement aux tripes. Maintenant son hypothèse est confirmée : si elle est ici, ce n'est certainement pas pour voir le cadet, pas pour se souvenir. Oh non, pour autre chose, mais quoi ? La curiosité ? La salle sur demande ne s'ouvre que si l'on en a vraiment besoin. Au bout du compte, il n'en sait strictement rien et il aurait presque peur de savoir. De lui demander. Il pourrait tout arrêter, passer le pas de la porte, dire adieu à son tour. Mais, contrairement à elle, lui, il n'en est pas capable. Qui sait combien d'années encore, il pourrait passer à rester dans le doute ? Dans l'idéal de la revoir un jour ? Elle est là, et bon nombre de personnes lui diraient d'en profiter au maximum. Mais, c'est la plaie qu'elle a ouverte, qu'elle continue de faire saigner, qu'elle ne veut pas soigner qui lui murmure : tu vas pas en plus, jouer la carte du gamin qui a tout pardonné ?

Et il continue de serrer, quitte à s'en dévisser le bras. Continuer à s'accrocher pour ne pas se laisser lamentablement tomber, comme un rien. Avant, il pouvait fièrement dire qu'il était un tout. Puis il y a eu ces quatre années de vide. L'incompréhension, laisse place à cette haine celle qui en a marre du faux. Celle qui veut savoir. Et tout ça, peut se lire dans son regard. Juste deux étrangers, voilà. Deux, foutus étrangers qui n'ont que des vieilles histoires à régler, que des questions existentielles à poser. Rien de plus. C'est juste une étrangère que tu as envie d'étrangler, une étrangère à qui tu pourrais pardonner. Rien que ça. Il serre ses dents, comme si quelqu'un voulait lui enlever quelque chose. On ne peut pas s'éloigner de ce qui est vrai, pas s'éloigner de ce qui a toujours été l'évidence. Elle restera malgré les années, malgré les doutes, cette soeur. Celle à qui il exposait ses idées un peu farfelues, à qui il offrait gratuitement ses chasses aux fantômes dans la maison. Bizarrement, cette pensée, lui arrache presque un sourire. Sombre idiot. Sombre crétin. Elle a préféré mettre tout ça de côté, oublier. A ses yeux ? Il est quoi maintenant ? Peut-être pas grand-chose. Juste une personne éphémère, là pour être là. Est-il un tant soit peu important à sa vie maintenant ? Sûrement pas. Ce regard presque glacial, sans rien de bien grand à l'intérieur, lui confirme ce qui lui fait le plus peur. Il faut savoir dire au revoir un jour ou l'autre à un souvenir, couper ce fil. Mais, il n'en a pas envie nom de dieu. « Je ne m'attendais pas à te voir ici. » Vraiment ? Le contraire l'aurait étonné, au plus haut point. C'est vrai quoi, la voir ici, lui, aurait pu s'imaginer des tas de scénarios, mais, tout sauf celui-là. Il suppose qu'elle le voit comme une maladie à ne pas approcher, une sorte de peste qu'il faut à tout prix éviter. Mais, maintenant, elle est coincée avec ses phrases bien faites, ce regard qu'il ne connaît plus. Toujours dans l'encadrement de cette porte, il reste silencieux. Il ravale ses larmes, déguste sa peine pour laisser place à autre chose. Très bien, laissons les sentiments profonds de côté, vu que tu aimes jouer cette carte de froideur. Cette carte qui lui fait mal au coeur. « Moi non plus. Je te croyais morte à vrai dire. » Sa parole lui arrache un frisson, morte. Il déglutit, toujours en tenant son pauvre bras, qui va sûrement finir par devenir rouge écarlate à force de serrer. Histoire de se donner un peu de courage. Ses yeux se posent alors sur les photos. Certaines sont vieilles, datent d'il y a bien des années, bien avant son départ. L'enfance, l'innocence et tout ce qui peut en couler. L'enfance, là où rien ne s'arrête, mais où tout continue malgré les blessures. L'enfant se laisse aller, il pleure, veut savoir la vérité et chaque fois, ses plaies finissent par cicatriser. Après quatre ans, tout change, se métamorphose. Vivre dans un monde presque inhumain. Et dans tout ça, un monstre qui lui dévore le coeur, comme une maladie, il l'empoisonne. Deux monstres, qui n'attendent qu'une chose, se sauter dessus pour mieux se faire du mal. « Au bout de quatre ans de silence, on commence à se poser des questions. » Il aimerait faire comme elle, arracher un sourire sarcastique, être, presque profondément méchant. Contrairement à elle, lui n'y arrive pas. A sourire quand tout va au plus mal, à sourire quand tout commence à valser. Non, lui il préfère hurler, et dieu seul sait combien de fois il a pu le voir dans cet état, bien catastrophique. Enfant, c'était simplement gueuler jusqu'à plus avoir de voix, puis en grandissant, c'est devenu bien pire. C'était s'enfermer dans une pièce et y mettre un bazar incroyable, tout jeter, tout casser. Il y trouve une certaine paix à casser des objets, casser des choses. Mais, elle, ça n'a jamais été casser les objets, elle, c'est les promesses qu'elle aime à briser, c'est les paroles qu'elle aime à retourner. Un rire sec lui échappe des lèvres, et juste un pas en avant. Qui le rapproche encore plus d'elle. Quitte à s'infliger des tortures, autant continuer, plus loin, toujours plus loin. « Quatre ans... Quatre foutues années, et même pas un mot, rien. RIEN DU TOUT. » Il sent son coeur claquer, oh oui, il bat contre son torse, contre sa tête à une vitesse folle. Peut-être l’adrénaline, ou tout simplement ses questions qui restent dans le brouillard. Jouons cartes sur table, dévoilons ce qui ne doit pas être dévoilé, comme ça, je pourrais partir, tranquillement. Mais, toujours avec cette appréhension, qu'elle a perdu ce truc chez elle, un je-ne-sais-quoi qu'il appréciait tant, qu'il aimait par-dessus tout. Peut-être bien la complicité, ce pétillement dans les yeux qu'elle pouvait avoir. « Qu'est-ce que j'ai fait hein ? Pour ne pas avoir droit à une petite nouvelle, à un signe de vie. Tu voulais te débarrasser de moi ? Me mettre dans une boîte et la jeter dans l'eau ? » Voix tremblante, voix qui arrache, qui prend aussi un peu d'assurance. Cette idée lui vide l'âme, lui fait un mal de chien. C'est comme courir, savoir qu'on va se prendre un mur, mais continuer, et tant pis si le coup fera mal. Toujours, continuer. Courir, tomber, se relever. Mais, tu sais Mary, moi durant ces quatre années, je ne me suis jamais relevé, du moins, pas complètement. Il me faut ta main, pas celle de quelqu'un d'autre, d'un quelconque inconnu. Je veux la tienne, la reprendre comme quand nous étions gosses.
J'ai besoin de ta main.

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MessageSujet: Re: It doesn't hurt me - Maaron   It doesn't hurt me - Maaron EmptySam 26 Jan - 10:38





Aaron & Mary
“ It doesn't hurt me ”


C'est l'hypocrisie totale, le songe de toute une vie qui déraille. Intérieurement le déluge, la déferlante d'émotions contradictoire façon chutes du Niagara, et pourtant elle tâche de rester stoïque face à l'ennemi. Ennemi. Son frère, oui. Cet inconnu, ce sosie, qui d'elle ne partage plus que le visage affadi. Quatre ans les séparent à présent, et ce genre de fossé ne se traverse pas avec des excuses ou quelques autres mots bien pensés. L'affronter, c'est se laisser gagner par le manque, c'est retrouver cette partie qui lui fait défaut, et perdre encore plus ce qu'elle a construit sans lui. Droite. Gauche. Le yin. Le yang. Recto. Verso. Deux opposés que tout attire, deux antipodes qui n'en forment qu'un, deux moitiés d'un même tout qui se dévorent autant qu'elles s'enflamment. La collision est brutale, cinglante dans les paroles qu'ils se lancent. Les mots sont des armes à manipuler avec précaution, tu sais ? Aaron, mon pauvre Aaron, tu ne mérites pas tout ça. L'aîné taille, elle coupe, et sans le vouloir, elle l'assassine un peu plus. Devant ses yeux, son jumeau esquisse un mouvement -non pas vers Mary, mais contre lui-même. Sa main glisse, empoignant fermement son bras gauche. Le geste ne lui échappe pas. Aaron est mal à l'aise, ce qu'elle ne peut que comprendre. Ne dit-on pas qu'il n'y a que la vérité qui blesse ? Sa justesse à elle assassine. Elle est perverse, enrobée dans des convenances trop cruelles pour se révéler encore plus acerbe. Elle ne cherche pas à être mauvaise, elle ne désire pas être méchante. Le rôle de la big bad evil lui colle mal à la peau, et elle préfère la déchirer plutôt que de le porter. Et pourtant, des deux, c'est elle qui fait le plus souffrir à présent. En bonne et due cause, parce qu'elle ne sait pas faire autrement. Trop bonne, trop conne. Le tact, elle ne connaît pas. Equinoxe, trop droite. Equinoxe, trop terre-à-terre. Arrête un peu, tu fais pleurer ton frère.
Morte. Morte. Le mot claque à ses oreilles, comme une vérité qu'elle aurait mieux fait de ne pas entendre. Morte. Tout aurait été plus simple, si ça avait été le cas. Pas de rencontre singulière, pas de silences gênés, pas de sentiment trop fort et trop cruel. Pas de souffrance, pas de rédemption. Un trait définitif tiré sur le passé, et pas de futur auquel penser. Des problèmes effacés, des promesses oubliées. Morte. Est-ce qu'Aaron lui en voudrait encore, si elle n'était plus de ce monde ? L'idée traverse son esprit, mais elle n'y prête qu'une attention moindre. Son regard est rivé sur son frère, qui lui a dérivé d'un peu. Aisé de savoir ce qu'il regarde à présent. Derrière Mary, il n'y a que ces photographies, vestiges d'un passé qu'elle a piétiné. Est-ce que tu tiens vraiment à ressasser tous ces souvenirs, Aaron ? Comme s'il avait besoin de clichés pour se remémorer tout ce qu'ils ont traversé... Ce n'est pas deux vies qu'ils ont vécue, mais bien une seule. Deux particules perdues en pleine nature, luttant pour ne pas se perdre dans un océan trop vaste, toujours fourrées ensemble, jusqu'au jour où... « Au bout de quatre ans de silence, on commence à se poser des questions. » Et pour ça, elle ne peut pas l'en blâmer. Elle roule un peu des yeux, ne sachant pas vraiment si elle doit dire quelque chose ou si elle le laisse continuer. Que peut-elle bien ajouter de toute façon ? Il n'a pas tort ; l'ignorance est la pire des punitions. Elle aurait pu lui expliquer tout ça, il y a quatre ans, oui, mais Aaron n'aurait pas compris. Il n'aurait pas compris. Le lui dire serait le traiter d'idiot, mais Mary le pense tout de même -pas qu'il soit moins intelligent, mais que la situation l'aurait dépassé. Trop sentimental, trop perdu. Il ne voit que ce qu'il veut voir ; à moins que finalement ce ne soit le cas de Mary ? Trop de questions. Bien trop de questions auxquelles elle ne voudrait pas répondre, auxquelles elle voudrait ne prêter que trop peu d'attention. Coincée devant son alter ego, elle suit des yeux son corps se rapprocher légèrement. Un pas. Juste un pas. Et ce rictus morne qui fend l'air. Une approche singulière, juste assez pour marquer le coup. Il aurait pu parcourir en quatre enjambées l'espace qui les sépare et attraper le col de sa robe, mais à l'action physique, il préfère continuer sur la piste de la véhémence verbale, et ses mots se veulent de plus en plus assurés, en dépit de sa voix qui flanche malgré ses efforts. « Quatre ans... Quatre foutues années, et même pas un mot, rien. RIEN DU TOUT. » Et le voilà qui crie presque. Tu n'as jamais su contrôler tes émotions, Aaron. Tu n'es qu'une boule de glaise entre les mains du hasard.

Et ces questions, toutes ces questions qui s'échappent de ses lèvres comme un torrent à l'ouverture d'un barrage. Trop de questions, trop d'interrogations auxquelles elle ne veut pas répondre -auxquelles elle ne peut pas répondre. Aaron veut jouer cartes sur table, balancer les vérités qui font mal, celles qu'on ose à peine se murmurer ? Il ne s'en remettrait pas. Trop d'horreur dans ce passé, trop d'obstacles à transgresser. Combien de fois a-t-il joué tout seul cette rencontre qu'il n'aurait jamais dû arriver ? Combien de fois a-t-il posé ces mêmes questions au mutisme du silence, échafaudant tous les scénarios imaginables dans sa tête ? Le silence a dû être plus bavard que lui -qu'il soit d'argent ou pas, sa parole n'est pas d'or. Que veux-tu que je réponde à ça ? Une question de plus, à laquelle elle ne cherche même pas de réponse. Nier serait mentir ; mais approuver serait signer la fin de tout. N'était-ce pas ce qu'elle cherchait au fond ? Tout quitter -c'est ce qu'elle avait fait. Et maintenant, devant le fait accompli, quatre ans après, voilà qu'elle se mettait à vouloir reculer. Ne vois-tu vraiment pas l'état dans lequel tu me mets ? C'est à cause de lui. A cause de lui si elle est partie. Et ses pensées sont confuses, ses idées trop obscures. La culpabilité cherche à embraser son coeur qui ne jure, lui, que par l'horreur. Si encore elle le haïssait, tout serait plus simple... Elle n'aurait qu'à lui cracher des évidences voraces, et tout serait terminé, en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Si seulement... « Même si c'était l'idée, ça n'a visiblement pas vraiment fonctionné.. » Elle est détestable. Détestable à souhait. Elle sait qu'elle devrait s'arrêter là, mais à quoi bon ? La mèche a été allumée, elle continue de se consumer, brûlant toute trace d'amabilité sur son passage. Aaron. Pourtant c'est bien Aaron en face d'elle, et pas un de ces serdaigle qui cherchait à la doubler. Mais elle ne peut pas s'en empêcher. Ce n'est pas qu'elle soit foncièrement mauvaise, elle est juste trop bornée. Et même si elle n'en souffle pas un mot, au fond, c'est de toutes autres choses qu'elle aimerait prononcer.
Alors elle aussi, à son tour, consent à faire un pas vers lui. Sourcils légèrement haussés, elle réfléchit toujours à ses questions, cherchant le bon morceau pour y répondre. Trop de choses à dire, et en même temps trop peu. Trop de peu et pas assez de mots pour s'exprimer. Elle est douée avec les paroles, pourtant. Elle observe, elle réfléchit, elle tranche et elle expose ses pensées -voilà comment elle procède d'ordinaire. Mais à quelques foulées d'elle, ce n'est pas n'importe lequel de ces discours qu'elle sert. Son inconnu, elle le connaît trop bien. « Qu'est-ce que j'aurais pu te dire ? » La voilà, sa véritable entrée. Celle qui annonce les mots qui fâchent, les mots qui déchirent -et les voilà tous deux projetés violemment quatre ans en arrière. Elle, devant son sac de voyage, sa photographie à la main. Sa tête pleine de questions sans réponses, son esprit plein de rêves sans lendemain. La maison presque vide laissée derrière elle, la porte qui se ferme sur des secrets qu'elle ne partagera plus. Et quelque part en ville, son jumeau qui ignore tout de cette sombre tragédie. « J'étouffais à Liddington, désolée d'être partie sans rien dire. » Parodie sans sentiment, elle-même ne sait vraiment dans quoi elle s'engage. Elle parle tout en marchant, et ses pas la rapprochent de plus en plus de celui pour qui elle est partie. Un pied vers lui, c'est une année qui s'envole, doucement, lentement, mais certainement. Son assurance éhontément affichée n'est plus aussi froide, même si elle n'avait pas cherché à apparaître ainsi. Formelle, elle l'était un peu trop peut-être, mais la surprise passé, elle apparaît enfin plus proche de celle qu'elle était. « Sincèrement, c'est ça que tu voulais entendre . Que je m'en sortais bien mieux en dehors de ce qui constitue ton monde ? Que j'avais l'impression de vivre enfin ma vie, et pas celle d'un spectre sans avenir ? » Sa sincérité ne la quitte pas, mais le ton de sa voix se veut plus doux, plus naturel aussi. Désolée de ce qu'elle a causé, même si elle est trop fière pour se l'avouer. Elle a conscience des conséquences qu'a engendré son départ, mais pourtant elle refuse toujours d'en être l'unique cause. La culpabilité n'a jamais été sa grande amie, et jusqu'ici elle a très bien vécu sans s’accommoder d'elle -ce n'est pas aujourd'hui qu'elle commencera à lui faire des concessions. Si Aaron a si mal vécu son départ, ce n'est pas de sa faute après tout. Elle n'y est pour rien. Et tant qu'elle respirera, elle continuera de suivre cette idée. « Qu'est-ce que ça aurait changé ? Tu ne quitteras jamais Liddington, je le sais autant que toi, et je n'y reviendrai plus jamais, tu le sais autant que moi. Ca n'aurait servi à rien de continuer à se projeter dans le passé. » A rien, si ce n'est à nous faire souffrir tous les deux. A deux pas de lui, elle s'arrête. Inutile d'aller plus loin, elle en a déjà trop fait. Qu'Aaron la frappe s'il en a envie, elle comprendrait. Les coups, elle les mérite, autant qu'elle l'a détruit. Responsable de ses souffrances, cauchemar assumé de ses nuits. Le retour de force n'a pas encore été assez cinglant, elle mériterait bien plus. Masochiste perdue au fond d'un gouffre aux lames acérées, elle accepterait en bonne et due cause de s'y laisser tomber à jamais. Trop identiques d'apparence, trop différents à l'intérieur. C'est un dialogue de sourds qui déraille, discussion qui défaille. Ils s'entailleront l'un l'autre au rythme de leurs mots affutés, ils s'abîmeront l'un l'autre à coups de tirades enflammées. C'est l'histoire de deux jumeaux, qui s'aimaient trop l'un l'autre, sans pouvoir se l'exprimer. Tu la connais, Aaron ? Cette histoire, c'est la nôtre.

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MessageSujet: Re: It doesn't hurt me - Maaron   It doesn't hurt me - Maaron EmptyDim 27 Jan - 0:28





Maintenant nous sommes tout seuls

C'est une sensation désagréable qui vous prend le coeur, quand arrive une situation aussi peu orthodoxe. Une sensation qu'on voudrait jeter par la fenêtre, mettre dans une boîte et l'enterrer au fond du jardin, pour qu'elle ne vienne plus jamais. Trop de films qui tournent, trop de scénarios catastrophes qui font place, alors qu'au bout du compte : on ne peut pas prédire à l'avance comment l'histoire va tourner. Parfois, il faut arracher des pages, les jeter dans une poubelle et les laisser pourrir, parce que ce passage : on ne l'aime pas franchement. Et des fois, on continue de lire, sans ménagement, parce qu'on veut savoir la suite, on continue malgré cette boule au ventre. C'est du masochisme, oui, mais à quoi bon se faire une histoire, si c'est pour ne pas lire jusqu'à la fin ? Dites-lui ? C'est ainsi. Mary a voulu arracher une page, la déchirer complètement. Mais, une part de lui - peut-être bien niaise il doit l'avouer - aime à penser qu'elle n'a pas totalement tiré un trait sur tout. Ce serait ... Il n'en sait rien. Mais, peut-être qu'entre-temps elle a fini par changer, complètement. Plus il la regarde dans les yeux, et moi il reconnaît cette soeur pour qui il aurait tout donné à l'époque. Il en a des frissons qui lui parcourent l'échine. C'est assez macabre, de se mettre à penser que tout peut changer un jour, que les souvenirs ne peuvent plus rien faire, que les rires ne peuvent plus faire sourire à nouveau. Il veut y croire, et ne pas y croire en même temps. Vouloir lâcher cette corde qu'il a tant tirée, depuis des années, la laisser enfin tomber au sol, dans la boue. Briser ce lien. Tout pourrait être simple, beaucoup plus facile. Pourtant, il faut croire deux caractères différents, dans une même pièce : c'est loin de faire un bon ménage. Et, les dégâts, eux, sont bien pires. Il suffit d'imaginer, un crash d'avion, ou le visage d'un type dévoré par une bête. Voilà le résultat, dégoutant hein ? Suffit de l'équation, Mary en compagnie d'Aaron Duchesne est égale à bien des horreurs, bien des méfaits. Là, ils sont loin des petites disputes de gamins pour tel ou tel sujet, telle idée qui ne plaît pas à l'autre, un quelconque débat. Là, l'enjeu est plus important. Il pourrait dire qu'il en va de sa vie, ce serait peut-être pousser le bouchon au plus loin, pourtant, plus elle parle, plus son coeur rouille, se sent stoppé par ses mots, ses phrases, qui agissent comme des insectes, juste bon à ronger ce qu'il reste de son tic-tac. Il pourrait lui gueuler d'arrêter, se rouler en boule dans un coin comme un dératé, hurler comme il ne pourrait jamais le faire. Mais, à quoi bon ? Peut-être se libérer d'un point, d'une souffrance qui grandit de jour en jour, et là il dirait de minutes en minutes. Une plaie, une ouverture qu'elle ne veut pas combler, non. Elle compte l’agrandir. Un bourreau, une femme à fuir, à détester jusqu'à la mort. Détester, un tel grand mot. Je te hais, je te déteste ma soeur oui. Mais, jusqu'à quand ? Oh, c'est bien beau de dire dans sa tête : j'la déteste, c'est qu'une idiote. C'est beau de vouloir se bercer d'illusions, mais quand il s'agit d'hurler en pleine figure ces phrases répétées dans la tête : il n'y a plus personne. C'est la peur qui ronge, c'est la vérité qui vous explose à la figure, tout à coup. On aimerait se cacher, ou bien tenter de gérer mieux la situation. Il est coincé, coincé entre deux idées, deux envies, deux émotions qui s'entrechoquent dans sa tête. Il lui arrive souvent de penser, qu'au bout du compte, Mary a été cette jumelle tant bien faite. On raconte toujours que dans une paire de jumeaux, il y a : le bon, et le mauvais. Est-il le mauvais ? Celui qui rate ce qu'il entreprend ? Qui n'arrive plus à tout gérer ? Qui explose ? Peut-être bien. Equinoxe, c'est l'intelligence, le calme, et le sourire un peu rieur en coin, c'est l'attentive, celle que tout le monde apprécie. Celle qui a été mise en avant. Parce qu'elle en valait la peine. Le concernant ? Il tente d'exister comme il le peut, à travers certaines choses sans utilités. Quitte à être le second partout, autant le rester, ne pas se laisser aller. Après tout, Mary, c'est le numéro 1. Et le premier numéro, se doit de tout gagner dans la vie, de tout réussir au mieux, quitte à faire mal au passage. Autant laisser tomber ceux qui n'en valent pas la peine, n'est-ce pas ? Il vaut mieux regarder de haut, que de se rabaisser à tendre sa main, aider, juste ce qu'il faut. Elle n'en a pas envie, préfère rester sur son siège, là-haut, parmi ceux qui ont le droit, qui touchent du bout des doigts une certaine popularité, un certain bien être. Est-ce qu'il peut le blâmer ? Qu'est-ce qu'il en sait. Une partie de lui hurle à l'agonie, quémande son aide, comme un gosse un peu paumé, et il y a cette voix qui veut qu'il laisse courir. Qu'elle vive sa vie, voilà son murmure. Qu'elle vive sa vie, et toi la tienne, laisse donc tomber cette soeur, ce modèle étant gamin. C'est accepter tout ça, accepter les larmes versées, accepter qu'une moitié vous laisse de côté pour quelqu'un d'autre. Autre chose. Sa main se serre, de plus en plus, et autour de lui, des ombres. Juste lui, autour ce foutu vide. Le temps s'arrête, se fige. Il aimerait être sourd pour ne pas avoir à entendre ses remarques, ses réponses. Juste, fermer les yeux, se dire que ce n'est qu'un cauchemar. Qu'elle est là, ou peut-être pas, et que tout se déroule au mieux. Que les blagues vaseuses fusent, que ... A quoi bon s'illusionner ? Peut-être parce qu'il ne lui reste plus que ça. Juste son imagination pour lui donner du baume au coeur, vu qu'elle, ne veut plus, ne veut pas. Préfère se terrer dans un trou, ne pas en sortir et le laisser seul contre les monstres. Je veux que ce soit une blague, une mise en scène imaginée de bout en bout, pour me faire voir mes peurs les plus sombres. Je veux, je voudrais, j'aimerais. Mais, rien. C'est quand on a besoin de ce pseudo créateur, qu'il ne vient jamais vous aider. Chacun ses problèmes, autant se débrouiller seul, même s'il patauge, s'il stagne dans une eau boueuse, qui petit à petit, avale son corps. Et bientôt viendront son âme, son coeur et tout ce qui en découle.
Elle est comme eux, comme ceux qui laissent de côté toute une histoire, tout un passé, pour se concentrer sur leur petite personne. Es-tu vraiment comme le commun des pires mortels, ma soeur ? Ces gens détestables ? Qui voient d'un oeil mauvais la famille ? As-tu changé à ce point ? « Même si c'était l'idée, ça n'a visiblement pas vraiment fonctionné.. » Allez, continue, enfonce-moi dans cette boue, tue-moi à petit feu. Après tout, qu'est-ce que je mérite de mieux ? J'aurais pu dire : ta main tendue, tes bras et bon dieu, une voix rassurante, quelque chose. Mais rien. C'est préférer donner des coups, achever jusqu'au dernier souffle. Et elle sait que son souffle ne tardera certainement pas à le lâcher. Assassine-moi, achève-moi sur-le-champ, c'est sûrement bien moins douloureux que tes mots si bien alignés, si bien choisis. On dirait qu'elle a tout préparé à l'avance, comme dans un film, elle suit son scénario, avec le ton qu'il faut. Elle ne s'emporte pas, garde ce calme légendaire tellement apprécié chez elle. Son calme, pourrait rendre fou le plus sain d'esprit des hommes. Toujours à parler de cette manière, avec ce regard, dans lequel il n'arrive plus à lire. Plus jeune, il pouvait clairement savoir si elle était heureuse, triste, ou bien en colère. Il pouvait lire en elle, comme un livre ouvert. Maintenant, ce n'est qu'un bouquin fermé, collé, impossible à ouvrir, ou du moins, il faudrait une clef pour actionner ce mécanisme. Il ne l'a pas, pas entre les mains du moins, et il sait qu'il va devoir fouiller, creuser pour pouvoir à nouveau ressentir ce qu'elle pouvait dégager. Le passé, rien que le passé. Le présent est cruel, et Mary fait tout pour le rendre encore plus désagréable qu'il ne l'est. Sa lèvre inférieure, il va l’amocher, elle va saigner tant il se la mord. Tant pis. Autant soigner la douleur, par la douleur, pas vrai ? Hein ? « Qu'est-ce que j'aurais pu te dire ? J'étouffais à Liddington, désolée d'être partie sans rien dire. » Une voix presque sarcastique, une imitation qui le fait froncer les sourcils. Pourquoi fais-tu ça ? Qu'est-ce que j'ai pu faire de mal ? Est-ce qu'elle se trouve trop bien pour me parler sincèrement ? Allez savoir. Je ne suis pas dans sa tête. Ou plutôt, je ne suis plus dans sa tête. Il n'est qu'un étranger, un gamin un peu perdu face à une énigme bien complexe. Son coeur lui fait mal, son ventre le tiraille, sa tête flanche, ses idées commencent à dérailler, petit à petit. Et c'est elle qui réussit à le mettre dans un état, pitoyable, déplorable, triste à regarder. La seule à pouvoir lui arracher le coeur directement dans le torse, la seule à pouvoir jouer avec, puis l'écraser, parce qu'elle a fini par se lasser de ce jouet bien trop secondaire, trop vieux, pas assez joli à regarder. Bon à mettre aux oubliettes. Continue à l'écraser, continue à te jeter dessus comme un animal, écrase, toujours, écrase, jusqu'à ce qu'il n'en reste que des cendres, qu'un vague souvenir lointain et tu pourras murmurer : Aaron ? Connais pas. Peut-être bien que c'est déjà fait, peut-être qu'elle a laissé de côté son visage durant tout ce temps, jusqu'à aujourd'hui. Il est sûrement le seul à avoir droit à des cauchemars dignes d'Hitchcock, à avoir peur, jusqu'à passer des heures à tourner en rond, à vouloir chercher. Sans jamais trouver. Sans jamais, le trouver. Un trésor impossible à avoir, impossible de mettre la main dessus sans se faire mordre. Craquer l'allumette, jouer avec le feu, puis, se brûler. Mary lui brûle les doigts, et un jour, ce sera le corps entier et il ne restera de lui, que des cendres, qu'un vague murmure dans le vent. Pas grand-chose, au bout du compte. « Sincèrement, c'est ça que tu voulais entendre ? Que je m'en sortais bien mieux en dehors de ce qui constitue ton monde ? Que j'avais l'impression de vivre enfin ma vie, et pas celle d'un spectre sans avenir ? » Elle se rapproche petit à petit, elle l'étouffe, le bouffe de l'intérieur. La douleur, monte, lui grimpe à la tête. Elle continue, avec sa belle franchise, avec sa belle manière de lancer les phrases, d'enfoncer les gens. Sans jamais dire pardon, sans jamais se sentir coupable. Ses yeux se ferment un instant, il jetterait presque sa tête sur le côté, comme une claque bien jetée sur sa joue. Ce même effet. Les mots peuvent détruire, briser une vie, tout un espoir, un idéal. C'est ce qu'elle fait. Elle vient, lance ses phrases calmement, et brise toute une manière de voir les choses, toute une manière d'espérer. Elle jette de l'eau sur une flamme intérieure, sur cette petite chose, qui le fait vivre, qui le pousse à rester debout, à se lever tous les jours et se dire que tout ça, ça en vaut la peine. Enfonce, enfonce, jusqu'à ce que je n'existe plus. Je ne suis qu'une chimère, que le numéro 2. Juste, le deuxième. Souffle sur le sable que je suis, autant me faire disparaitre tant que tu auras le temps. Les larmes montent, puis rentrent à nouveau dans son corps. Il ne veut pas qu'elle le voie dans cet état, non. Sa soeur serait peut-être contente de le voir comme ça, elle en rirait ? Il pourrait presque penser ça, que son coeur meurtri, ne l'atteint pas. « Qu'est-ce que ça aurait changé ? Tu ne quitteras jamais Liddington, je le sais autant que toi, et je n'y reviendrai plus jamais, tu le sais autant que moi. Ca n'aurait servi à rien de continuer à se projeter dans le passé. » Le coup de grâce, celui qui fait tomber au sol, et qui ne donne plus envie de combattre. Un match entre deux personnes, elle qui assène à coup de mots, et lui, qui petit à petit, tombe à ses pieds. Destruction, amusement d'un côté, désespoir de l'autre. Faiblesse du corps, faiblesse de l'âme, tout s'écroule. Château de cartes bien posé sur sa petite table au soleil, et ce fameux coup de vent qui fait tomber cette bâtisse colorée. Brise-moi, casse-moi, continue encore et encore, de toute manière, tu ne pourras plus faire mieux ma chère. Funambule sur sa corde, je glisse, et je suis en pleine chute libre. J'attends juste de m'écraser sur le sol, j'attends juste la paix dans toute sa splendeur. « Alors tout est de ma faute c'est ça . Si tu t'es tiré comme une voleuse, c'est de ma faute ? » Voix plus assurée, sourcils froncés. Boum, boum, boum. Essaie au moins d'assumer ta part dans cette histoire, c'est bien beau de me lancer les couteaux, de dire : t'es qu'un spectre, tu vas finir ta vie dans ce trou à rat. Bien beau de lancer les accusations comme si de rien n'était. Mais, partir, comme un lâche, ne pas même dire : je vais bien, rien. Pourquoi ? C'est s'éloigner de la question, c'est ne pas répondre à celle qui le turlupine : qu'est-ce que j'ai pu faire pour que tu me laisses sans nouvelles, comme un animal ? Il faut toujours donner la faute à quelqu'un, sans quoi, toute cette souffrance, n'a aucune logique et on finit par perdre la tête. L'un accuse l'autre, c'est comme se trouver dans un tribunal. L'accusé, la victime, qui dit la vérité, qui dit le faux ? « C'est aussi de ma faute, si durant quatre ans, tu es restée muette comme une tombe ? Que tu n'as pas été capable de prendre un fichu téléphone, et donner ne serait-ce qu'un signe de vie ? Encore ma faute ? » Il inspire alors, yeux dans les yeux, mais pas main dans la main, tout sauf ça. C'est le drapeau blanc, toujours au sol. La paix est bien loin, la guerre s'annonce. Un ennemi ? Tout sauf. Juste une soeur, un double, une moitié de miroir, une envie de continuer un peu plus. Tout ça, c'est si compliqué. On s'emporte, on se gueule dessus comme des animaux prêts à s'entre-tuer. « Oh, excuse-moi, je suis peut-être pas assez bien dans tout ça. Ouais, c'est vrai quoi ! Pourquoi dire à un fantôme, à un spectre sans avenir, à une chose insignifiante, que tout va bien, que tu es en vie ? Rien, pas grand-chose. » Un haussement d'épaules et dans tout ça, une envie d'exploser. Comment garder son calme ? Je ne sais pas si je vais réussir à tenir longtemps, à continuer à jouer son propre jeu, le calme complet, celui qui vous pèse jusqu'au plus profond de votre âme. « Si comme tu le dis si bien, ça n'aurait rien changé, alors pourquoi ? Je te faisais peur, je jouais le rôle du méchant dans tout ça ? » Apprends-moi les choses comme une grande soeur se doit d'apprendre au plus jeune. S'il te plaît, met de la lumière dans ce couloir sombre de la peur, guide mes pas, je veux comprendre, savoir. Et ta promesse brisée, ta promesse jetée dans une crevasse pour ne jamais ressortir. Est-ce demander la lune que de savoir que tu vas bien ? Est-ce demander la lune d'avoir un petit : " Aaron, bon dieu je suis à Londres, c'est tellement ... génial si tu savais ! " ? Peut-être bien. Au fond, plus rien ne se comprend, plus rien ne peut se sentir, se voir dans leurs yeux. Du vide, rien que du vide. « Mais bien, très bien. Soyons fous, collons toute la faute sur mon front. Je suis la tâche noire sur le tableau, celui qui dérange peut-être ? C'est vrai, tu es tellement limpide dans tout ça. Parfaitement, je dois déconner quelque part. » Ses dents se serrent, son bras toujours serré, seigneur qu'il a mal. Donne moi une corde que je la passe autour de mon cou, donne-moi quelque chose, un peu de liberté, des ailes pour me tirer de dame fatalité, des rires vicieux que j'entends, que je perçois à moi seul. Mary, j'aimerais tant te dire d'autres choses, mais tu as changé, tellement changé. Pourquoi je ne ressens plus rien ? Pourquoi je ne peux plus voir en toi ? Plus de reflet, plus de rien du tout. Pourquoi en arriver là ? Bon dieu. Tout peut se passer dans une vie, le bon, comme le mauvais. Le mauvais se déroule, pour terminer en pire, en bien pire qu'il n'aurait jamais pu le penser. Si petit on lui avait dit que plus tard, tout allait se dérouler de cette manière il aurait murmuré : Mais, t'es fou toi ! Moi je me sépare pas de ma soeur, je l'aime trop...
Ouais, je l'aimais trop. Bien trop. Et je l'aime toujours bien plus qu'il n'en faudrait. C'est l'incompréhension et cette colère muette qui parle à sa place. Il déconne, il part en vrille quelque part. Il n'est que le numéro secondaire, celui qui a du mal, celui qui déconne un peu partout. L'imparfait, le moins bien fignolé. Et le pire dans tout ça, c'est que maintenant il déteste à l'aimer de cette manière. De cette façon qui peut vous pousser à des sombres fins, de cette façon qui peut vous pousser aux folies les plus macabres. Plus qu'une soeur, plus qu'un double. Juste, un tout. Demande moi la lune, j'irais te la chercher, demande-moi d'essayer de voler, je tenterais. Et dans tout ça, je tombe de toute manière, avec mais jamais sans toi.
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MessageSujet: Re: It doesn't hurt me - Maaron   It doesn't hurt me - Maaron EmptyMer 30 Jan - 8:39





Aaron & Mary
“ It doesn't hurt me ”


On raconte partout que les jumeaux possèdent un lien singulier, une sorte d'attache puissante et invisible qui les relie où qu'ils soient, où qu'ils aillent. Certains apparentent ça à une manière de communiquer qui serait propre à chaque paire, une télépathie personnelle et privée qui ne concernerait qu'eux ; d'autres, au contraire, voient en ce lien la matérialisation de ces neufs mois passés dans le même utérus, illustration intangible de cette vie partagée. Comme un cerveau scindé en deux, deux êtres issus du même oeuf. Qui mieux pour se comprendre qu'un autre soit identique ? Ressens ma douleur comme je ressens ta peine, vois à travers mes yeux comme je respire à travers toi. Pourquoi tu pleures ? C'est ton frère qui s'est cogné, pas toi. Au fil du temps, le lien se dégrade parfois, sous les interférences de la vie, ou se renforce suite à quelques évènements. Certains jumeaux finissent par ne plus vivre qu'une seule vie au lieu de deux, s'unissant pour ne représenter qu'une seule et même entité. Manger ensemble, vivre ensemble, penser ensemble. Une vie partagée, un cerveau dans deux corps, deux têtes pour penser, mais une seule façon de rêver. Comment mettre de côté toutes ses envies pour fusionner au point de ne plus faire qu'un ? Ils auraient pu. Oh oui qu'ils auraient pu, sans trop de difficultés même. Vivant au jour le jour des aventures toutes plus rocambolesques les unes que les autres... Ils auraient pu continuer ainsi longtemps, si Mary n'avait pas voulu mettre en pratique son libre arbitre. Prison de bois, perdue au milieu de rien, elle avait tout pour vivre heureuse, tout sauf ce qu'elle cherchait vraiment -la preuve de son existence. Point de vue narcissique sur le monde -comment se contenter de n'être qu'une moitié lorsqu'on peut devenir un tout par la force de sa volonté et d'efforts ? Elle avait vécu neuf années avec sa moitié, elle aurait pu continuer encore longtemps comme ça. Mais il avait fallu qu'elle se mette à penser, qu'elle se mette à vouloir voir plus loin que le bout de son nez. Numéro 1. Parfois elle s'était demandé si tout ne venait pas de là. Numéro un. Un. Première. Meilleure. Est-ce que de manière inconsciente elle réfléchissait de cette façon à cause de ses parents ? Est-ce que c'était parce qu'elle était arrivé la première qu'elle était perçue comme "meilleure" que son frère, qu'elle faisait sans le vouloir des efforts pour honorer ce surnom idiot qu'on leur avait donné ? Numéro 1 et numéro 2. Est-ce que tout aurait été pareil si ça avait été elle, le numéro 2 ? Est-ce qu'elle aurait tout de même fui Liddington pour tenter de voler de ses propres ailes ? Peut-être que ce serait Aaron qui serait parti. Peut-être que ce serait elle qui serait resté seule, comme un chien attendant silencieusement sa pitance. Elle aurait fait les cent pas devant un téléphone qui ne sonne pas, prié le seigneur pour avoir des nouvelles qui ne tombent pas, interrogé les étoiles et n'importe quelle autre puissance pour savoir s'il allait bien ou pas. Elle s'était déjà mise à la place de son frère, pour tenter de percevoir tout ce qu'elle avait pu causer de mal chez lui -et la place ne lui avait pas du tout plu. Des nouvelles, elle en avait donné à son père, pour en recevoir quelqu'une d'Aaron à la place. Ce qu'elle avait entendu au début l'avait heurté autant qu'elle avait meurtri son frère. Plus d'une fois elle avait songé à revenir, rebrousser chemin et reprendre la place qui avait toujours été sienne. Redevenir la gentille "grande soeur" qu'elle était, la fausse aînée sur qui on peut compter. Numéro 1. Numéro 2. Il n'y a pas de fumée sans feu, et pas de premier sans second. Raccrocher toute sa vie à un chiffre était idiot, presque malsain quand on y pensait, mais inconsciemment elle en était persuadée. Sans l'ombre de ce "1" sur sa vie, elle ne serait jamais partie. Sans numéro 1, elle aurait été Mary. Mary l'un des deux jumeaux. Celle qui ne croit pas, celle qui est droite dans ses baskets. Elle aurait continué ses études à Liddington, avant Poudlard. Elle n'aurait pas vraiment mis les pieds en dehors de la ville, mais ça lui aurait amplement suffi. Parce qu'à ses côtés, il y aurait eu Aaron. Aaron le rêveur, celui qui croit dur comme fer. Comme deux aimants qui s'attirent et se repoussent, ils auraient passé leur vie ensemble, à être d'accord sur leur désaccord, à penser pour deux et à vivre l'un à travers l'autre. Une demi-vie, en quelque sorte. Une existence inachevée, propulsée dans le corps de l'autre. Mais ils en auraient été heureux. Parce qu'ils auraient été tous les deux.
Elle ferme les yeux devant lui. Il souffre, souffre comme jamais, et pourtant Mary ne fait rien pour l'éloigner de la douleur qu'elle répand. Elle est comme un virus, une matière noire qui suinte de partout pour se faufiler dans les recoins les plus fragiles du coeur de son frère. Elle tape là où ça fait mal, même sans le vouloir. Elle pourrait se vouloir rassurante, mais cela ne ferait que causer sa perte -leur perte à tous les deux, mêmes. Attachée à sa propre idée, elle n'arrive pas à se défaire des mailles qui entravent ses pensées. Ca s'est passé comme ça, inutile d'y revenir. L'image d'un passé révolu qu'elle souhaiterait définitivement abandonner, ou du moins laisser dans un coin comme elle l'a toujours fait. Combien de fois a-t-elle retardé l'échéance, trouvant toujours d'autres excuses pour ne plus y penser ? Accorder trop d'importance à un souvenir, c'est tenter de le garder en vie dans sa mémoire. Pourquoi s'accrocher autant à un fragment de passé alors qu'on ferait mieux de l'oublier ? Nos actes construisent ce que nous sommes, et elle, sans être partie, elle ne serait rien aujourd'hui. Est-ce qu'Aaron attend vraiment des excuses pour ce geste mûrement réfléchi, est-ce que c'est cette promesse brisée qui a détruit celui qu'il était ? De son côté, il n'y a pas de regrets, pas de justification à donner. Egocentrique, peut-être, mais elle n'estime pas avoir mal agi. Alors qu'importe la douleur qu'elle lit dans les yeux de son frère, elle ne lui mentira pas en lui disant qu'elle est désolée. Du respect, elle en a pour lui, de l'affection encore plus. Est-ce qu'il pourrait voir l'amour qu'elle lui porte encore si elle ouvrait les yeux ? Des deux, lequel possède la vision la plus fermée sur leur discussion sans queue ni tête ? Ils s'enfoncent à chaque phrase un peu plus dans les méandres d'un débat aussi inutile qu'infertile. Mais ni l'un ni l'autre ne semble s'en apercevoir. Ils cherchent un responsable. Un grand méchant qui porterait la casquette de toute cette souffrance engrangée depuis la fin des temps. Parce que dans les histoires, il en faut toujours un. La personnification de la cruauté qui ne vit que pour assouvir ses sombres desseins, ce personnage sans coeur qui ne peut que détruire celui des autres. Dans les contes, les problèmes sont vite réglés. Impossible de passer à côté de ce maître d'insensibilité. Quelques pages plus tard, et le monde en est débarrassé. Pas de concessions pas de contrariétés. La douleur est oubliée, remplacée par le bonheur d'une félicité retrouvée. Mais la vie n'est pas un conte de fées. Ici, le bourreau se cache derrière le masque de la victime, qui n'est celui que l'on croit. Les options s'entremêlent, les points de vue se démêlent. Elle pense blanc, lui pense noir. Ils ont leur propre avis sur ce qui s'est passé, et rien ne pourra suffire à les départager. C'est comme faire entendre raison à un tronc d'arbre. Ils ont beau se démener l'un l'autre, attaquer à coup de cisaille et de hache affutée, rien n'y fait. Rien ne change, mais ils continuent quand même. Comme s'il n'y avait plus que ça à faire. Comme si s'enfoncer dans une cause perdue était tout ce qu'il restait entre eux. Peut-être que c'est le cas, après tout. Peut-être que cette douleur à blanc constitue tout ce qu'il leur reste à présent. Pas de numéro 1 sans numéro 2. Pas de bourreau sans victime. Les paroles d'Aaron sont plus assurées, contre elle. Il prend le taureau par les cornes, et lui renvoie l'assaut qu'elle a mené contre lui. Coupable. Le problème tourne continuellement autour de cette idée. Qui est le responsable de ce désespoir sans fin ? Ce n'est pas moi, c'est lui. Au lieu de la pointer du doigt, il prend la chose à revers et, sarcastiquement, s'établit en fautif assumé. Ses yeux dans les siens, il attaque, il pique, il tranche. C'est sûrement une des premières fois que Mary le voit aller aussi loin. Les mots, ça n'avait jamais vraiment été son dada. Pas assez calme, pas assez réfléchi pour ça. Du vrai dans ce qu'il dit, beaucoup trop de vrai pour laisser Equinoxe insensible. Ses sourcils se froncent légèrement, son regard ne lui faisant pas le plaisir de dévier du sien. Tes phrases sont viles, elles se veulent aussi assassines que les miennes. Est-ce que tu sais vraiment ce que tu fais, Aaron ? Elle se sent déglutir légèrement, pas par peur ou par appréhension -ou peut-être qu'elle redoute un peu la suite. Cette histoire va mal finir. Ce n'est pas comme si elle l'ignorait -rien de bon ne pouvait être amené, de toute façon. Comment reconstruire un château avec ces cartes qu'elle a soigneusement déchirées ? Son frère est incendiaire devant elle, cerbère déchaîné de l'autre côté du Styx qu'il s'acharne à traverser. Qu'est-ce qu'il attend d'elle, si ce n'est des explications qu'Equinoxe ne peut lui donner ? Pourquoi vouloir s'acharner à connaître les raisons d'un départ qu'elle n'a pas voulu officialiser devant lui ? Rien que pour ça, elle devrait s'en douter. Même s'il n'a pas deviné le fond de ses raisons, il doit bien y avoir une ou deux idées qui ont germé dans son esprit, au fil du temps -à moins que Mary ne constitue vraiment une énigme sombre et trop obscure comme son frère a l'air de penser. Doit-elle vraiment se dévoiler, tout avouer pour enfin atténuer le mal qu'elle lui a fait ? Quelque part, recluse dans ses occultes pensées, elle en a envie. Envie de faire table rase de toute déchéance mal calculée, et repartir sur de bonnes bases. Renouer avec ce frère qu'elle a quitté, retrouver cette partie qu'elle a abandonnée. Non. Non. Elle claquerait sa tête contre le mur si seulement ça pouvait l'aider à y voir plus clair, à arracher cette idée qui s'insinue un peu plus profond dans son esprit. Pas de retour en arrière possible. Toujours aller devant. Ne pas se retourner. Ne pas flancher. On dirait presque les mots d'un toxicomane qui aurait peur de tomber de nouveau, un addict en face de qui une main malintentionnée secouerait un sachet de poudre blanche. Une photo. Un vieux cliché. C'était tout ce qu'elle s'était autorisé à prendre de lui. Justement pour ne pas flancher.

La distance entre eux a beau n'avoir pas changée, leur colère semble les rapprocher, assez pour prédire une collision de plus en plus brutale. Au point où ils en sont, ils ne peuvent plus ralentir. La pédale de l'accélérateur à fond, les freins arrachés ; et les voilà qui roulent à toute allure l'un vers l'autre. Choc brutal dans trois... deux... un. « Mais bien, très bien. Soyons fous, collons toute la faute sur mon front. Je suis la tâche noire sur le tableau, celui qui dérange peut-être ? C'est vrai, tu es tellement limpide dans tout ça. Parfaitement, je dois déconner quelque part. » Qu'il se pose en pantin désarticulé, la véritable raison n'est pas là. Tu crois voir, mais tu ne regardes pas attentivement. Est-ce qu'il ne voit vraiment pas, est-ce qu'il ne comprend absolument pas tout ce qu'il représente pour elle ? Aaron, mon précieux Aaron... C'est de ta faute, oui, si je suis partie. Mais pas de la façon dont tu y penses. L'avouer, c'est vendre son âme au diable. C'est mettre dans la main de son frère le collier qu'elle a défait en partant, c'est lui tendre le fouet pour se faire battre. C'est s'enfoncer une couronne d'épines sur la tête et porter sa croix le haut d'une falaise. C'est se laisser tomber dans le vide, seule mais accompagnée. C'est dévoiler ses faiblesses, dévoiler cette imperfection, ce trou béant vers son coeur, cette porte dérobée qu'elle ne veut plus emprunter. Elle ne s'est jamais demandé pourquoi elle n'arrive pas à accorder pleinement sa confiance aux gens qu'elle côtoie. Elle ne s'est jamais dit que, peut-être, le problème venait de là. Elle se clame franche, mais au fond, elle n'aime pas se révéler. Jouer cartes sur table, assumer ses points faibles autant que ses points forts... Elle n'est qu'une gamine, mais c'est cette vérité qui la trahit petit à petit. Son coeur, voilà la bête noire qu'elle refuse de céder à qui que ce soit. Amis, famille. Elle pense aimer, mais elle n'arrive pas à se fixer. Ego surdimensionné, narcissisme trop poussé ? Si seulement il s'agissait de ça. Le problème est ailleurs, enfoncé dans un lieu qu'elle a lâchement abandonné, accroché à une autre personne qu'elle ne voulait plus approcher. Ce morceau de son coeur qui lui fait défaut, il s'agite et s'anime devant elle. Cette faiblesse, aussi grande soit-elle, elle a un nom. Aaron. Numéro 2. Si tu savais tout ça, tu m'en voudrais encore ?
Au lieu du coeur, c'est le cerveau qui parle -et l'esprit, lui, refuse de se laisser avaler de nouveau par cette sentimentalité mal placée. Elle cherche à se défendre, à remettre debout des barrières qui semblent s'effriter. Légitime défense face à un adversaire aussi puissant que démuni. C'est la guerre aveugle de deux coeurs incompris, de deux bêtes laissées à l'abandon. Chair à vif, muscles à sang. Diviser pour mieux régner ? Ici, c'est plutôt détruire pour mieux s'échapper. « Qu'est-ce que tu cherches, alors ? Un coupable à toute cette histoire ? Tu veux que je m'excuse, que je te dise à quel point je suis désolée d'être partie ? Que je revienne en arrière pour essayer de recoller les morceaux ? » Elle marque une pause, un bref soupir s'échappant de ses lèvres closes. Elle observe son reflet, une lueur de désappointement dans le regard. Cette discussion n'a de sens que celui qu'ils veulent lui donner -à savoir presque rien. Et dans le vif de ses paroles, le "pourquoi" énoncé entre deux questions, perdu entre d'autres interrogations aigres-douces, elle l'a totalement omis. « Je ne peux pas faire ça, Aaron, je ne vais pas te mentir, non plus. Je ne regrette pas du tout d'avoir tourné le dos à Liddington. » Sa voix reste calme, malgré son intonation qui trahit une certaine exaspération. Treize ans, TREIZE ANS bordel, et tous deux agissent comme s'ils n'en avaient même pas six. Des questions, des questions, des questions. Doit-elle vraiment passer l'étape rédemption afin de pouvoir remettre cette histoire de côté ? Aaron complique les choses, c'est à se demander s'il ne le fait pas exprès. Ca ne tiendrait qu'à lui, elle repartirait dans la seconde, comme elle l'a déjà fait. Pourquoi s'excuser d'un crime qu'elle n'a pas commis ? Elle a beau être compréhensive, son frère joue ostensiblement avec ses limites, et ce simple fait l'exaspère autant qu'il la met mal à l'aise. Le pantin, ce n'est pas Aaron, comme celui-ci se plaisait à penser, mais bel et bien l'aînée, qui se laisse trop dangereusement glisser.

L'éloigner pour mieux s'en protéger, c'était de cette façon qu'elle avait posé son départ. S'éloigner du seul être qui savait autant lire en elle pour le protéger -de quoi ? Elle n'en savait trop rien. C'était idiot. Tout simplement idiot d'avoir agi de la sorte. Comme s'il suffisait de se détacher d'un talon d'Achille pour s'en séparer définitivement. Qu'avait-elle gagné en agissant de la sorte ? Une vie, certes. Mais du côté d'Aaron ? Elle n'avait eu qu'un bref aperçu de ce qu'elle avait engendré, suffisamment en tout cas pour lui ôter définitivement l'envie de revenir un jour dans cette ville fantôme. Après tout, si elle avait autant souffert de son départ, de quel droit pouvait-elle bien réapparaître dans sa vie ? Cela ne ferait que balayer d'un revers de main la douleur qui avait forgé son coeur, que la pointer du doigt et lui montrer qu'elle ne vaut rien. Que dans ce monde, il y a toujours quelque chose pour l'anéantir un peu plus, et qu'elle ne se détériorera qu'un peu plus. Ce ne serait que lui dire combien son chagrin aurait été vain pendant toutes ces années, combien il aurait perdu son temps à pleurer un être qui ne le méritait que trop peu ; c'était ce qu'elle était en train de faire. « Le passé, c'est le passé Aaron. Une promesse brisée, qu'est-ce que tu voulais que je te dise après ça ? Arrête de regarder derrière toi, et essaye un peu de grandir. » Grandir. Rien que le mot suffit à la faire rire jaune. On raconte que grandir, c'est savoir faire des choix -c'est ce qu'on lui a toujours dit. L'enfance, ce soubresaut d'inconscience dans lequel on peut profiter de tout, finit un jour ou l'autre, ce fameux jour où survient "l'âge adulte". Comme une révélation mystique, une étape à franchir pour avancer dans la vie. Certains la refusent, d'autres s'y glissent par mégarde -elle, dans tout ça, elle ne sait pas trop. Est-ce qu'elle est devenue adulte le jour où elle a franchi la porte sans se retourner ? Est-ce qu'elle se sentait déjà grandie bien avant ? Elle n'est encore qu'une gosse. Elle n'en sait rien, elle ne se sent même plus vraiment mûre pour le moment. Grandir, c'est faire des choix. Mais choisir, c'est renoncer. Ca, elle le sait très bien, mieux que n'importe qui, même. Tu ne peux pas avoir le beurre et l'argent du beurre. C'est sa façon de penser. Elle a beau être ambitieuse, elle n'est pas non plus avide de cupidité. Jouir de la vie, et rester aussi proche de son frère... C'était incompatible. Ca n'aurait pas fonctionné, elle en était persuadée -elle s'en était persuadé. Garder contact avec lui n'aurait fait que creuser un fossé de plus en plus béant entre eux -sauf que cette fois-ci, elle en aurait été témoin. Statue de sel face à un ouragan, elle n'aurait rien pu faire pour l'en empêcher, à part tout quitter, de nouveau. Elle ouvre la bouche, s'apprête à parler, puis se ravise, ne sachant pas trop comment formuler sa pensée. Aaron lui enlève les mots de la bouche, soigneusement, comme on détache les pétales d'une fleur. Le bout de sa langue passe sur ses lèvres, et c'est elle qui détourne le regard. La pièce est toujours vide autour d'elle, découverte qui n'en est pas vraiment une. Sa main gauche glisse contre sa nuque, alors qu'elle fixe son regard sur presque rien. Arrêter. Repartir. Et recommencer. A quoi bon rester ? A quoi bon s'acharner ? Cause perdue. Autant pour elle que pour Aaron. Elle ne changera pas d'avis, malgré les efforts de numéro 2. Tête brûlée, trop enfermée dans ses idées, un peu frigide sur les bords. Les compromis, elle connaît -mais les concessions, elle n'aime pas. Alors du coin des yeux, elle jette un dernier regard au seul frère qu'elle n'a jamais eu, détaillant lentement les signes qui trahissent son état trop flagrant. Ses jointures sont blanches, sa bouche un peu trop crispée. Il n'a jamais eu ce self-contrôle dont sait faire preuve l'aînée. Trop d'émotions dans ce corps malingre, trop d'agitation dans ce coeur semblable. Elle murmure presque, son regard remontant lentement vers les yeux d'Aaron. « Lâche un peu ton bras, tu vas finir par te le décrocher à force. » Et à ce rythme-là, ses dents tomberont avant la fin de la journée. Autodestructeur. Elle n'a fait qu'apporter un peu plus de malaise en venant ici, en croisant sa route qu'elle avait soigneusement fait l'effort d'éviter. Plus de mal que de bien, plus de malheur que de bonheur. Il n'y aura rien de bon à en retirer, rien d'exceptionnel dont se souvenir. Juste un coeur un peu plus arraché, des sentiments un peu plus bafoués. La franchise a un prix qu'elle n'est pas prête à payer cette fois-ci. Aaron, mon piètre Aaron... Elle pourrait lui dire de but en blanc qu'elle se souciait bien trop de lui pour rester, qu'il était trop faible à ses côtés. Mais ce serait ouvrir la porte à d'autres questions, d'autres interrogations sans réponse. Le passé c'est du passé... Pourquoi tu tiens tant à m'y faire replonger ?

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MessageSujet: Re: It doesn't hurt me - Maaron   It doesn't hurt me - Maaron EmptyDim 10 Fév - 0:49





Maintenant nous sommes tout seuls

C'est l'effet domino, c'est prendre des cartes, les aligner puis souffler dessus sans réellement savoir ce qui peut nous attendre à la fin. Un effet qui plus il avance, plus il se trouve complexe, plus il peut se casser la figure à un moment comme à un autre. L'effet domino, celui qui peut se traduire en ce moment même. Sauf que là, il n'est plus question de jouer avec des morceaux de bois, il n'est plus question de souffler sur du papier et de le voir s'envoler, tomber petit à petit. Non, là, il en va d'une toute autre santé, d'une toute autre histoire. Il en va de deux coeurs qui se crachent à la figure, de deux coeurs qui petit à petit, tombent en miettes. L'utilité ? Aucune, alors pourquoi continuer ? Il y a des choses que malheureusement, même le plus savant des hommes ne pourra expliquer, ne pourra argumenter. Et il faut croire que cette scène qui se déroule, est loin d'être la plus belle qu'il a pu vivre, bien au contraire. Il pourrait même penser que ce soit la pire, il en ait à un stade où il aimerait claquer la porte, qu'elle disparaisse en un claquement de doigts. Qu'elle arrête avec ses mots accusateurs, ses belles phrases jetées dans sa figure. Comme si tout était de sa faute, parce que de toute façon, il n'est qu'Aaron, un deuxième numéro. Jeter à la figure, arracher, écraser du mieux qu'on peut. Continuer, encore et encore jusqu'à l'explosion complète de l'un des deux. Et qui se laissera aller en premier ? En aucun cas le premier numéro, sûrement le deuxième. Oui, ce sera le deuxième et plus les secondes passent, plus il sent cette échéance arrivée, cette goutte qui va le faire saturer complètement, jusqu'à commettre un acte qu'il ne pourra peut-être pas se pardonner. Il tente de penser à autre chose, il essaie de relativiser tant bien que mal. Se dire, que tout ça, ce n'est pas vrai, qu'elle va rattraper le coup. Mais, c'est trop se donner d'espoir, c'est se regonfler le coeur avec une pompe à vélo, se redonner un petit pétillement dans les yeux. Autant lâcher tout de suite le fil qui tient le ballon, autant le laisser partir et ravaler ses larmes, tout ravaler comme on le peut et partir la tête haute. Equinoxe pourrait le faire, facilement, très simplement, sans jeter un dernier regard sur ce qu'elle laisse. Elle en est capable et pourquoi ? Il ne pourrait même pas le dire, il n'arrive plus à comprendre, plus à voir, plus à sentir. Le fil commence à se rompre, se dégrader au fil du temps, et là : il subit une telle secousse, qu'il ne va pas tarder à craquer. Qui veut ça ? Mary, qui ne veut pas ? Aaron, comme toujours. Mais à part les deux visages, rien ne peut coller. Et pourtant, gamins on arrivait à se compléter, à réussir à faire quelque chose de bien, que papa trouvait agréable à voir. Il n'y avait pas de numéro 1, ou de numéro 2. Juste deux gamins complets, deux gosses qui arrivaient à se sentir mieux en la présence de l'autre. Peut-être que maintenant, je la dégoûte, peut-être que je ne suis plus assez bien, pas comme il faut. Parait-il que c'est en grandissant qu'on remarque les défauts, oui ceux qui font mal à entendre. Comme ce lunatisme chez moi, et ce côté trop hautain chez elle. On remarque des choses qu'enfants, on ne pouvait pas voir, qu'on préférait cacher dans un coin sombre, puis, à l'âge adulte, cette boîte cachée sort, les défauts vous sautent à la figure, comme des animaux. Tout flanche, tout se casse la figure. Comme toujours. Bon nombre de fois, je me suis demandé si c'était la malchance qui voulait ça. Mais, au bout du compte, c'est juste parce que rien n'est comme il faut, c'est juste parce que dans la différence même si on peut se trouver, on peut aussi se déchirer, jusqu'à la fin. Essayez de trouver un remède à ça, de trouver quelque chose pour tout simplifier. Parce que soit l'un, soit l'autre lance et relance à nouveau. Avoir le dernier mot, réussir à faire plus de dégât que l'autre. Comme une course, sauf qu'au bout du compte, aucun gagnant : que des perdants. Les mots fusent, volent dans la pièce comme des balles. Le silence est tellement plus agréable, le silence est tellement plus révélateur que la méchanceté qui peut sortir d'une bouche. Pourquoi est-ce qu'il a fallu qu'il parle ? Il regretterait presque d'avoir laissé tout ça ressortir, d'un coup, sans qu'il ne s'en rende vraiment compte. Un murmure qui a tout foutu en l'air. J'ai le chic de me mettre dans des situations folles, mais, celle-ci me dépasse, et m'atteint comme jamais. Je veux juste, fermer les yeux et m'endormir. Rester dans le noir, être sourd, ne plus entendre, ne plus avoir à subir sa manière de voir les choses. Sa vérité à elle, et aussi la sienne par la même occasion. Deux idées, peuvent parfois se rejoindre, s'entrechoquer et imploser au même moment. Sa vérité est celle qu'il ne veut pas entendre, celle qu'il préfère jeter par la fenêtre. Elle le transperce, mais continue, une torture en tout point qui ne s'arrête plus, qui continue. Abrège mes souffrances tout de suite, dis-moi de dégager, de déguerpir avant que tout ne tourne en ce que je ne voudrais pas. Je pourrais te supplier des yeux, mais peux-tu encore voir quelque chose en moi ? Je ne suis plus qu'un inconnu, une pâle copie là pour prendre les coups à ta place. Juste bon à jeter contre le mur, écraser, toujours, encore. Pourtant, je tente de me défendre, de sortir les griffes à mon tour. Comme deux bêtes jetées dans une arène, qui gagnera ? Sûrement aucun des deux. C'est un combat pour la vie, mais les deux finiront morts, c'est un fait indéniable, une idée qui lui traverse l'esprit et qui lui arrache un frisson désagréable. S'il tient ce bras, c'est pour ne pas aller trop loin, s'il mord cette lèvre c'est pour tenter de se taire. Mais, la bouche sature, et bientôt ce sera au tour de ce bras qui en aura marre de souffrir. Ce sera au tour de cette main qui frémit, qui tremble. Vivre dans le passé, s'accrocher à des photos, des souvenirs, c'est peut-être ça qui pousse certaines personnes à tenir debout. Alors si elle ne veut plus, à quoi est-ce qu'elle s'accroche ? Au futur, à ce qu'elle pense devenir, à ce qu'elle veut être. Pendant que l'un se coince dans des rouages rouillés, l'autre s'amuse à courir sur des rouages dorés. Le passé, le futur, ils ne font pas bon ménage ensemble. Pourtant, ils arrivent à faire un présent, un moment qui reste gravé dans le passé et qui intrigue petit à petit le futur. Passé, futur, pleurs et sourires. Deux inversés, deux gamins juste mal barrés qui n'arrivent pas à être sur une longueur d'onde, et pourtant jadis ils arrivaient toujours à se mettre d'accord. L'idée de l'un se transforme en l'idée de l'autre, et vice-versa. Maintenant ? Tenter de comprendre, c'est comme discuter avec un mur : aucune réponse ne sera possible. Comme faire écouter une musique à un sourd : elle n'entendra jamais et se concentrera sur son monde, juste elle. Elle a changé, s'est transformé en une jeune femme qu'il ne connaît pas, et qu'il découvre. Face à elle, il n'est plus qu'un jouet à manipuler comme bon lui semble. C'est assez fou, l'effet qu'une personne peut vous faire. Dans un couple, tout peut aller très loin, se sacrifier par amour pour l'autre, un peu comme la tragédie Roméo et Juliette. Là ? Deux jumeaux, juste deux sangs similaires, l'un se dit prêt à mourir pour l'autre, et quant à celle qui se trouve en face : il n'en a plus la moindre idée. Un incendie, tu brûles, tu veux te cramer, jouer au jeu des enfants Duchesne. « Qu'est-ce que tu cherches, alors ? Un coupable à toute cette histoire ? Tu veux que je m'excuse, que je te dise à quel point je suis désolée d'être partie ? Que je revienne en arrière pour essayer de recoller les morceaux ? » Ce serait déjà un bon début, a-t-il tord ? Est-elle égoïste à ce point, de ne même plus savoir les dégâts qu'elle a causés ? C'est le tour de l'égocentrique, toujours sur moi, jamais les autres. A quoi bon s'attarder à savoir comment va le reste après tout ? S'attarder sur des petites personnes, sur des gens qui ont été là, mais qui ne le sont plus. Est-ce ça le fond de ta pensée ? J'essaie de déceler quelque chose, de voir, et j'ai juste droit à un froncement de sourcils. Toujours ce calme, bon sang, est-il possible qu'un jour elle s'énerve ? Je le crains fort. Elle préfère regarder sans jamais trop monter la voix, juste ce qu'il faut. Elle interprète ce que je ne dis pas, ce que je ne pense peut-être pas. Certes un retour en arrière serait peut-être la chose la plus idyllique selon moi, mais, c'est impossible, autant ne pas dire ce qui n'est pas vrai. « Je ne peux pas faire ça, Aaron, je ne vais pas te mentir, non plus. Je ne regrette pas du tout d'avoir tourné le dos à Liddington. » Sa voix presque désespérée, toujours aussi posée, mais qui trahit quelque chose. Je cherche, peut-être trop et cette exaspération peut se sentir, se voir comme le nez sur la figure. Elle ne regrette pas d'avoir dit adieu à une ville, elle ne le regrette pas ? Lui ? Son frère ? L'estomac noué, la main serrée sur ce foutu bras - qui ne va surement pas tarder à tomber, il sent cette sensation désagréable, grimper le long de son corps. Plus les minutes coulent, et plus il sent qu'il ne va plus tenir très longtemps. Il déglutit, puis, il recule d'un pas. Avoir peur d'elle, peur de ses phrases. Pourtant, au bout d'un moment, il faudra qu'il apprenne à affronter ses démons, ses horreurs les plus profondes, mais elle ne peut les connaitre. Parce que après tout : ces horreurs les concernent. Mary connaît ses réticences à certaines choses, comme lui il peut connaitre des choses sur son cas. Mais, à l'intérieur, tout le monde cache quelque chose dans son petit jardin secret. Parce qu'il y a des choses qui ne sont pas forcément bonnes à dévoiler, ou qui tout simplement nous mettent dans un état de gêne. Ce serait se mettre à nu, tout dire sans jamais mentir. Tous deux menteurs, tous deux un peu fourbes, l'un l'est peut-être plus que l'autre. « Le passé, c'est le passé Aaron. Une promesse brisée, qu'est-ce que tu voulais que je te dise après ça ? Arrête de regarder derrière toi, et essaye un peu de grandir. » Allez Aaron, arrête donc tes conneries, essaie d'être d'accord avec elle, félicite la même d'avoir réussi à te casser en deux comme un bon soldat de bois ! Allez, allez. Grandir ? Mais qui de nous deux joue l'enfant Equinoxe ? Dis-moi ? Est-ce moi, celui à s'être rendu malade durant quatre ans de silence ? Ou celle qui a préféré se taire, partir sans rien dire, comme un fantôme ? Qui est le pire de nous deux ? Le concours de celui qui est le pire enfant, celui qui ne grandit pas vraiment. Même si le corps pousse, même si les idées changent, il y a toujours l'enfant intérieur qui hurle, qui parle à notre place et agit bien plus souvent que nous pouvons le penser. Ses yeux se dévient l'espace d'un instant. Que veut-elle qu'il dise ? Ne peut-elle pas comprendre que cette réaction est parfaitement humaine ? Les questions dérangent, les réponses sortent mais pas d'une manière qui peut être appréciée. Il aimerait se rattacher à quelque chose, ne serait-ce qu'à quelque chose dans son regard, qui lui prouve qu'elle n'est pas complètement morte et enterrée. Rien, comme toujours, c'est trop se bercer, trop vouloir s'illusionner. Je n'arrive pas à tirer un trait sur tout, comme elle arrive à si bien le faire. Elle a cette facilité presque maladive à tout vouloir et laisser de côté quand elle n'en veut plus. J'ai juste été le bon petit frère durant neuf ans, j'ai juste été là pour elle quand il le fallait. Pas plus d'importance qu'un animal de compagnie quand on y pense. Ses sourcils se froncent un peu plus, le contrecoup de la douleur. Arrête de me regarder, arrête de parler, arrête d'exister. Je t'en supplie, je t'en conjure, arrête de me briser complètement. C'est vraiment ce que tu veux ? Ce que tu désires ? Me mettre encore plus bas que terre ? Te débarrasser du deuxième numéro ? Il sent cette pulsation dans ses lèvres, signe qu'il y passe bien trop de temps, qu'il s'y acharne plus que d'habitude. Sa voix s'élève à nouveau dans la pièce froide. « Lâche un peu ton bras, tu vas finir par te le décrocher à force. » Et là, c'est le drame. Il n'a pas le temps de vraiment penser à ce qu'il fait pour tout dire. Ses yeux se jettent sur elle. Elle, lui, son visage, son bras enfin lâché, sa main qui s'écrase sur son visage. Un coup, un silence, un pas en arrière. Les mains tremblantes, le coeur en vrac et les idées dans le vide. Il n'entend plus que son tic-tac claquer contre ses oreilles, comme si la fin allait venir. Et ce qu'il redoutait le plus, vient d'arriver par sa propre faute. Un geste violent, des jointures blanches s'écrasant sur un visage similaire au sien. Il fixe le sol, l'espace de quelques secondes, ses poings à nouveau serrés. Et maintenant que j'ai réussi ce que je n'ai jamais osé, comment je me sens ? Nullement mieux, peut-être un peu, mais pas plus que je ne l'espérais, ou plutôt pas plus que ne l'espérait ma rage bouillante. Je pourrais craquer face à elle, mais ce serait lui donner la médaille, déclarer forfait alors que rien n'a encore commencé, ou du moins, nous sommes peut-être déjà à la fin. Peut-être que tout se finira sur ça, ce coup de poing lancé, cette tristesse qui grandit comme un cancer dans son corps. Et à son plus grand malheur, elle est le seul remède miracle, mais elle ne veut pas, préfère jouer sur la défensive. Si mon bras a plus d'importance que mon coeur, dans ce cas, je te donne tout de suite ce qu'il y a à donner. Je te déclare vainqueur de celle qui a réussi à me tuer intérieurement, à ne laisser qu'une coquille vide, qu'un corps là pour essayer d'exister, un tant soit peu. Ses yeux se lèvent sur elle, elle est plus loin qu'il y a quelques secondes, et le regret commence à le taquiner gentiment. Lui faire ses excuses ? La douleur physique n'est rien comparée à celle qui peut se faire à l'intérieur. Elle peut se soigner, lui, il ne peut rien faire pour s'aider. « Grandir un peu. GRANDIR UN PEU ?! Mais bordel Mary, tu t'attendais à quoi ? Que je reste sagement là, sans te demander le pourquoi du comment ? Que j'allais tout laisser couler ? » Et là, une part sombre se réveille, celle qu'il préfère cacher, celle qu'il ne veut plus. Les larmes grimpent, et grimpent. Mais, elles ne doivent pas couler, il n'a pas le droit, il ne va pas lui donner ce plaisir. Non, pas encore, pas maintenant. De toute manière, elle va partir, elle repartira dans une voiture, dira à nouveau adieu et lui il dira adieu à un tout, une soeur, une moitié de coeur. Une importance à sa vie qu'il a oubliée. Incapable de gueuler je t'aime comme un dératé, incapable de la prendre dans ses bras et pouvoir profiter de ça, juste de ça. « Très bien tu ne regrettes pas de t'être barré, et tu ne veux qu'une chose : te tirer à nouveau. Mais tu pars d'un côté, d'un autre, sans jamais répondre : pourquoi sans rien dire Equinoxe ? Pourquoi bon dieu ? Et bon sang, arrête de jeter que je ne fais que vivre dans le passé, arrête de balancer des arguments qui ne font que retarder. Encore, gagner du temps. Pourquoi ? » La voix haute, la voix forte. Il se demande si quelqu'un les entend, mais si c'est le cas : il ne doit pas oser pointer le bout de son nez pour dire stop à ce massacre avant que l'un des deux ne finisse brisé à jamais. Il n'y a plus d'être humain dans cette pièce, juste des animaux, des bêtes faites de chaire et de sang, juste bonnes à vouloir se dévorer le cou, le coeur, jusqu'au plus profond de l'âme. Comme le croque-mitaine, se cacher sous le lit dans le noir, et arriver à ce moment fatidique où l'enfant ne pourra même plus hurler, même pas chercher de l'aide. Elle m'englobe dans le noir, me fait voir ce que je ne veux pas affronter, m'arrache le coeur, pour mieux le dévorer. « Si tu ne me supportais plus au point de ne rien me dire, dit le au moins. Que j'arrête de me faire des idées, d'en faire des cauchemars, de m'en rendre malade. » Murmure inaudible, presque triste. Et c'est quand je dis ça, que je me rend compte que peut-être notre enfance n'a été qu'une mascarade. Peut-être étais-je le seul à l'aimer de toutes mes tripes, et qu'elle, préférait s'en amuser dans son coin, en rire comme le pire des diables. Se donner aux gens, s'offrir corps et âme, pour arriver à cette conclusion : il n'a peut-être jamais compté. Répondre à cette question, est-ce si difficile ? Pourquoi bloquer sur cette vérité-là ? Elle qui n'hésite pas à dire qu'il est l'enfant, elle qui joue le rôle de la fière, elle tente de se défiler, de passer au travers de la porte. Mary, ma douce Mary, qu'est-ce qu'il nous reste dis-moi maintenant ? Juste nos yeux pour pleurer, nos bouches pour lâcher le venin et nos coeurs pour se craquer. Encore, encore, encore. Et toujours.
(c) Myuu.BANG!
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MessageSujet: Re: It doesn't hurt me - Maaron   It doesn't hurt me - Maaron EmptyDim 17 Fév - 22:33





Aaron & Mary
“ It doesn't hurt me ”


Le choc. Enfin. Deux corps l'un contre l'autre. Une rencontre ponctuelle, une main qui s'écrase sur un visage posé. Rencontre. Nom féminin. Entrée en contact de deux corps. Parfois lente et suave, présupposée charnelle ou délicate. Une peau qui frotte et qui glisse sur sa semblable, qui touche et se fond sur une surface identique à la sienne. Mélodie muette aux accords déplacés. A l'entendre, on s'attend presque à une danse savoureuse dans sa douceur et sa tendresse, à deux corps qui s'entremêlent, qui se cherchent et se trouvent dans l'harmonie la plus parfaite. Une transe extatique, le soupçon d'un amour interdit. Embrasser, enlacer, étreindre et caresser. Tant de façons d'enserrer et de chérir, d'exprimer l'inexprimable et de mimer des sentiments trop fort pour être nommés. Amitié, amour, compassion, bienveillance. Il y a de la chaleur dans ces mots, autant qu'il y en a dans ces gestes. Apprendre à connaître le corps de l'autre à travers le sien, appréhender un organisme qui n'est pas le sien. Le goût de la découverte, l'excitation de maigres révélations. J'aime. J'aime quand tu me touches, comme ça. Mains baladeuses ou au contraire meneuses, il y en a pour tous et pour toutes. Echange de bons procédés, ma peau contre la tienne, et nous voilà enlacés à jamais. C'est chaud, c'est brûlant, dégoulinant d'amour et de bons sentiments. Le désir n'est qu'une excuse pour entrer en collision avec une autre personne, pour l'attraper et l'emporter dans une danse effrénée. C'est la débâcle des sentiments, la déroute des faux-fuyants. Ici, il n'y a pas de désir -et d'amour, il y en a trop. Rencontre. Brutale. Sèche. Violente. Courte, mais suffisante pour causer quelques dégâts. La violence des actes remplace celle des mots, qui finiront de toute façon par revenir au galop. C'est l'éternelle guerre entre deux jumeaux qui s'aimaient trop. Moi sans toi mais jamais toi sans moi. Incompréhensibles, incompréhensifs, c'est leurs coeurs décharnés qui se mettent à penser. Ils ont fait le tour de la question, mais ne peuvent s'empêcher d'y revenir encore et encore. Frapper fort, frapper juste ? Il n'y a pas de bon, comme il n'y a pas de mauvais. S'arrêter ? Pourquoi ? Comment ? Ils en sont incapables, et ne peuvent que s'enfoncer un peu plus dans l'enfer qu'ils créent à chaque nouvelle sentence. Collision. Choc de deux corps dont au moins l'un est en mouvement. Un sifflement dans l'air, une main qui retombe, essoufflée par son geste. Un, deux, trois. Trêve frénétique, accords ardents. Ils ne sont pas sur la même longueur d'onde, et le maître d'orchestre peine à diriger ses musiciens. Ses mains qui autrefois caressaient, ses bras qui autrefois enlaçaient frappent et hurlent comme on achève le bétail. De l'amour, vraiment ? Amour ravageur, amour vengeur. Si l'amour prend aux tripes comme le disent si bien certains auteurs, il n'est pas réputé pour exploser en pleine mâchoire comme il en fait actuellement l'objet. Poing d'amour ? Comme une réplique cinglante, la matérialisation de tout ce qu'Aaron n'avait pu dire. Pourquoi s'embêter à formuler ses idées lorsqu'il existe tant d'autres façons de les exprimer ? Il suffit de presque rien, après tout. Une idée, une seconde, un poing. Et la réponse s'inscrit d'elle-même sans qu'il en soit question.
Le goût d'un liquide ferreux se répand dans sa bouche comme de l'encre sur un morceau de coton. Désagréable. Indélicat. Une sensation de bourdonnement dans sa joue, des muscles qui se contractent avant de perdre en force. La douleur est présente, mais pas aussi intense qu'elle ne l'aurait pensé. Y avait-elle songé ? Non, pas le moins du monde en fait. Elle lui avait simplement demandé de lâcher son bras, pas de l'envoyer en plus valser contre son visage. Comme un diable dans sa boîte, Aaron avait laissé le ressort de son poignet s'exprimer avec toute la véhémence dont il était question, s'écrasant avec toute la délicatesse du monde sur une joue qui n'avait rien demandé. Elle a tourné la tête à cause du choc, indubitablement. Elle aurait pu l'éviter, si seulement elle y avait pensé. Mais ça avait été trop rapide, trop vif, trop... surprenant. Venant de la part d'Aaron, ça ne l'était pas vraiment ; ils n'étaient pas non plus la caricature de la soeur sérieuse et du frère impulsif, mais certains pensaient à le croire. Parce qu'Aaron se laissait plus facilement aller. Parce qu'Aaron était parfois indomptable. Parce qu'il était beaucoup plus lunatique qu'elle, et sûrement bien moins réfléchi. Combien de fois avait-elle du le calmer alors qu'ils n'étaient que des enfants ? Un corps malingre, mais un coeur bien trop petit pour tous ces sentiments. Elle avait été témoin, loin d'être impassible, de ses crises d'hystérie, âme égarée qu'elle seule arrivait à calmer. Aaron, mon petit Aaron, tu te laisses bien trop facilement emporter. Des états d'âme, elle en avait connu. Gamin turbulent aux allures dégingandées, il lui arrivait parfois de se déchaîner sans que rien ne puisse l'aider. Des cris, des hurlements, des affaires qui volent et qui éclatent. Une vie bouleversée, à peine maîtrisée par son unique possesseur. Des moments sombres, des heures noires, qui finissaient par s'éclairer lorsqu'Equinoxe finissait par l'aider. Je suis là, ne t'inquiètes pas. C'est fini, chut. Parce que c'est toi et moi, aujourd'hui et à jamais. Un baume au coeur, des entraves autour de muscles déchaînés. Une voix apaisante, des bras qui savaient comment rassurer. Elle le maintenait, le soutenait, le comprenait -des états qui se sont bien dégradés lorsqu'on regarde ce qu'ils sont devenus aujourd'hui. Il faut dire qu'en quatre ans d'absence, elle a perdu l'habitude de le voir comme ça, sorti de ses gonds, furieux mais intimement blessé. La cause, elle la connaît. Elle sait qu'elle est responsable de son état, que c'est de sa faute si elle le voit comme ça, mais ce n'est pas comme si elle pouvait l'en empêcher -si elle pouvait s'en empêcher. Rentrer dans son jeu et ouvrir une nouvelle page entre eux ? Elle ne peut pas. Oh non elle ne peut pas. Elle n'est pas venu pour ça, elle n'est pas venu pour de nouveau s'arracher les ailes et vivre derrière un masque de bonheur faussement feint. Tout mais pas le retrouver, lui qu'elle avait eu tant de mal à quitter.

Après le poing d'Aaron, c'est sa propre main qui secoue l'air pour se frayer un chemin vers son visage. Pas pour cogner, non, mais pour frotter sa lèvre inférieure de son revers, et essuyer ce sang chaud qui ne devrait pas s'y trouver. Combien de temps depuis le dernier coup de poing qu'elle s'est pris ? Trop pour être compté... Depuis son départ, elle n'a côtoyé que des gens bien dans leurs baskets, des hommes plus cérébraux que violents, plus manipulateurs qu'irréfléchis. Il n'en ressort pas que du bon, de rester près de tels énergumènes. La spontanéité perd en force, l'observation se pose en maître. Maîtriser sa pensée, c'est régner sur l'ignorance des autres. Elle en a rencontré beaucoup, des idiots qui se pensaient meilleurs qu'elle, à raison mais plus souvent à tort. Et elle a passé plus de temps à les démonter verbalement qu'à se battre directement avec eux. Les coups et les blessures, c'était une affaire à régler entre frère et soeur. Pour des broutilles, des idioties sans importance -ou parfois suffisamment à leurs yeux pour qu'ils en fassent tout un plat. Les coups de poing pleuvaient, et avec eux les coups de pied, mais quand ils rentraient le soir, c'était couverts de bleu mais le sourire aux lèvres. L'innocence de toute une jeunesse enfermée dans quelques coups, bien que le dernier n'en fasse pas partie. Les jeux d'enfants ont été remplacés par les règlements de compte d'adultes et, s'ils se battent, ce n'est pas pour savoir lequel des deux a attrapé le plus beau criquet, mais pour maudire celui des deux qui aura fait le plus souffrir l'autre. Tantôt l'un, tantôt l'autre, vainqueur tour à tour, mais jamais l'un des deux ne déclarera forfait, pas même si Aaron décide d'en venir aux mains. La sienne, elle, continue de glisser sur ses lèvres pour aller frotter lentement sa peau meurtrie. Sa pommette hurle silencieusement, et elle se redresse légèrement. Même si ça lui fait mal de le penser, le coup était rudement bien envoyé. Un peu maladroit, peut-être, mais redoutablement bien placé. Elle déglutit sans conviction l'hémoglobine qui macule ses gencives, avant de s'étouffer dans son propre sang. Elle pourrait cracher sur le sol qu'elle ne le voudrait même pas -hors de question d'abîmer le tapis. Après quelques brèves secondes, le temps de laisser à son cerveau l'honneur d'imprimer ce geste dans sa mémoire, ses yeux se relèvent lentement vers ceux de son frère, qui semble avoir reculé d'un pas entre temps. Son bras est relâché à présent, pendant lamentablement contre lui. Est-ce qu'il se sent mieux ? Est-ce qu'il est calmé ? Probablement non à la première, mais oui à la deuxième. Quoique... Sa voix s'élève dans le silence gêné, et c'est une autre facette d'Aaron qui se montre au grand jour. « Grandir un peu. GRANDIR UN PEU ?! Mais bordel Mary, tu t'attendais à quoi ? Que je reste sagement là, sans te demander le pourquoi du comment ? Que j'allais tout laisser couler ? » En un mot, oui ? C'était ce qu'elle avait toujours voulu. Partir comme une voleuse, s'évanouir en pleine nature, se faire oublier pour que plus jamais Aaron ne vienne le questionner à ce sujet. Avait-elle été assez bête pour croire que son plan allait fonctionner ? Elle l'avait bien été, pendant ces quatre longues années, et ne se leurrait pas -si elle n'avait pas remis les pieds ici, tout aurait très bien continué à marcher, de son côté en tout cas. Elle n'était pas narcissique au point de ne penser uniquement qu'à elle, mais plutôt butée au point de rester accroché à ses propres choix.
Elle ne lui en veut pas pour le poing qu'elle vient de déguster -ou en tout cas bien moins que la rancoeur que son frère nourrit à son égard. Dans ses yeux, il n'y a qu'un léger soupçon d'amertume, et elle ne pense pas un seul instant à lui rendre la pareille. Cogner, ce n'est pas vraiment son truc -plus depuis un moment. Grandir, n'est-ce pas ? Ce n'est pas se comporter en adulte, parler la tête froide plutôt que de cogner à la première contrariété ? Inlassablement, elle pourrait lui renvoyer la balle, pointer du doigt toutes ces petites choses qui montrent l'enfant qu'Aaron est resté, et se poser comme la seule véritable adulte de cette pièce -un mensonge honteux auquel elle ne croit pas un instant. Vieille rancoeur interminable entre frère et soeur en mal l'un de l'autre. A deux, ils ne veulent qu'un coupable à abattre, qu'importe la raison, même si numéro 2 ne la perd malheureusement pas des yeux. « Très bien tu ne regrettes pas de t'être barré, et tu ne veux qu'une chose : te tirer à nouveau. Mais tu pars d'un côté, d'un autre, sans jamais répondre : pourquoi sans rien dire Equinoxe ? Pourquoi bon dieu ? Et bon sang, arrête de jeter que je ne fais que vivre dans le passé, arrête de balancer des arguments qui ne font que retarder. Encore, gagner du temps. Pourquoi ? » Et petit à petit, c'est sa propre hypocrisie qui lui éclate en pleine figure. Bien plus vile, bien plus douloureuse que le coup de poing qu'elle a mérité. C'est quatre années de sa vie qui défilent en marche arrière vitesse accélérée, faisant des arrêts sur tous ces petits moments où elle a songé à ce qu'elle avait fait. Des pensées qu'elle avait reléguées dans un coin de son esprit, des idées qu'elle avait voulu oublier, des gestes qu'elle s'était interdit de tenter. C'est toutes ces petites choses qui avaient germé après son départ, c'est l'épitaphe "fuyarde" inscrit en lettres fines sur sa tombe. Pourquoi ? Et bien, parce que. Des raisons, il n'y en a aucune comme il y en a bien trop. Que répondre à cette question si ce n'est pas une remise en question ? C'est quatre ans de silence qui hurlent à l'agonie, c'est une porte traversée qui se ferme devant elle, c'est une maison abandonnée qui l'enlace à nouveau. C'est le reflet d'un miroir qui lui parle, c'est un soupçon de vérité qui s'insinue lentement dans un coin bien perché de son esprit. Pourquoi ? Elle-même ne veut pas y penser, sans même s'interroger sur la raison de ce refus trop catégorique. Retourner le couteau dans la plaie, revenir vers un passé révolu... Bon nombre d'excuses préfabriquées dont elle use et abuse sans trouver la force de se questionner. Pourquoi ? Coeur de cristal entouré de pierres. Elle n'est pas insensible, mais craint de se laisser aller à la sensiblerie. Elle ne fait que gagner du temps, Aaron a bien raison. Elle pourrait mettre un terme à cette mascarade, dire enfin blanc comme blanc, et définir le noir comme le noir. Mais dans le calme halluciné, son coeur d'enfant lui crie de l'écouter. Après tout, lui seul en connaît les raisons, même s'il a tendance à vouloir les oublier.

Le silence s'étire sur les terres de numéro 1 et, interdite, elle continue de fixer son frère, prise au piège de ses propres pensées. Elle ne dit rien, elle ne le coupe même pas alors que ses paroles retentissent toujours dans ses oreilles. Pourquoi ? Parce que grandir, c'est choisir. Et choisir, c'est renoncer. Hors renoncer définitivement, elle en est incapable. Des deux, celle qui agit comme une enfant, c'est définitivement bien elle, et s'en rendre compte petit à petit l'alarme autant que la tétanise. Elle n'a pas eu la force d'assumer son geste, pas eu la force de clamer ses idées devant le seul être qui la connaissait mieux que quiconque. Plutôt que de confronter sa volonté à la sienne, plutôt que de lui exposer ses idées, elle avait préféré fuir, littéralement fuir comme un voleur pris sur le vif. Des mots, elle aurait pu lui en glisser quelques-uns, voire même lui écrire une lettre. Mais c'était laisser des traces, c'était s'accrocher à l'épine du pied qu'on voulait s'enlever. C'était retourner un sachet de poudre blanche alors qu'on s'était promis d'arrêter. Elle avait voulu partir pour s'envoler, se leurrant probablement sur sa définition du mot "liberté". Une vie sans attaches, une vie passée à voyager et à s'enrichir -elle l'avait gagnée. Mais la chaleur d'un foyer, elle ne l'avait jamais retrouvée. Ni même les bras aimants d'une personne dévouée. D'amour et d'eau fraîche, elle n'a pas vécu. Officiellement trop fugace pour s'attacher à quelqu'un, officieusement trop fragile pour s'y autoriser. Aimer, c'est s'abandonner à quelqu'un, c'est lui offrir sur un plateau d'argent toutes ces faiblesses qu'on a toujours voulu dissimuler -ce qu'elle ne pourra jamais réaliser. Elle a fermé son coeur à autrui, tout comme elle en avait refusé l'accès à Aaron. Mais cette situation lui convient pour le moment -du moins se plaît-elle à y penser. Une part d'elle aimerait pourtant s'abandonner définitivement dans les bras de son frère, et oublier pour un temps tous ces problèmes qui n'ont pas lieu d'être. Mais ouvrir son coeur, c'est prendre le risque d'être blessé en retour et, caché derrière des masques de calme et de fierté, c'est une enfant terrorisée qui tient les rames de cette barque en perdition.
« Si tu ne me supportais plus au point de ne rien me dire, dit le au moins. Que j'arrête de me faire des idées, d'en faire des cauchemars, de m'en rendre malade. » Répondre oui serait la façon la plus saine de mettre un terme à cette guerre sans lendemain. Des adieux assumés, fermes, et irrévocables. Passer de nouveau la porte de cette maison, mais cette fois-ci à jamais. Un départ définitif, n'est-ce pas ce dont-elle avait rêvé ? Le penser pendant toutes ces années était une chose, mais le voir formulé par son propre frère en est une autre. L'avait-elle vraiment souhaité, ou s'était-elle menti à elle-même au point de le percevoir comme une vérité ? Le doute l'embrouille, ennemi invisible il amenuise ses barrières, et trahit son état. Ennemi machiavélique aux allures d'ange héroïque. Elle fait moins la maligne, maintenant, la fille prodigue qui est partie fièrement de chez elle. Un mot. Un simple mot et c'en est fini d'eux, de leur passé, de tout. Ils ne seront plus que deux étrangers, comme ils l'avaient finalement été pendant neuf longues années. Le statut serait simplement officialisé, et les questions définitivement abandonnées. Un poids en moins, une personne à oubliée. Réellement ? Elle n'avait pas oublié, malgré ce qu'Aaron pouvait en penser.
Et c'est sa propre voix faussement maîtrisée qu'il s'élève à présent. « C'est bon ? Tu te sens mieux maintenant ? » Question à moitié rhétorique -du temps, elle cherche toujours à en gagner, finalement. Pourtant, elle se sent moins assurée qu'avant. Sa confiance a été mise à mal, même si elle ne l'affiche pas en lettres de sang sur son front. Elle s'est redressée, et masse une dernière fois sa joue en fermant les yeux et en faisant aller les muscles de sa mâchoire. La douleur s'amenuise, mais pas la brèche qui a agité ses défenses. Elle a beau vouloir retrouver l'attitude calme qu'elle affichait, ses sourcils restent froncés, et son regard trop songeur pour être pris comme argent comptant. Dans son esprit, elle ne sait pas vraiment où elle en est, et ses lèvres débitent des phrases toutes faîtes comme pour assurer un minimum syndical. « Si c'est vraiment ça que tu veux entendre, je peux t'offrir ce privilège... Si ça peut t'aider à aller de l'avant, je veux bien faire cet effort, ça te permettra d'enfin lâcher toute cette histoire. » Elle lui renvoie ses questions, ses problèmes, encore et encore. Lui dire qu'elle ne le supportait plus ? Ce serait un mensonge. Un mensonge énorme et honteux, qu'elle n'a même jamais pensé. Elle tourne en rond, inlassablement, prise au piège de son propre geste. Voilà pourquoi elle refusait de le revoir un jour, voilà pourquoi elle ne voulait plus avoir de contact avec lui. Parce qu'elle voulait justement éviter cette situation. Parce qu'elle ne peut toujours pas assumer un geste qu'elle ne peut pas réellement expliquer. Il était une fois un coeur tordu, prit au piège dans le corps tordu d'une fille tordue. Elle pense, mais elle ne dit pas. Faire machine arrière maintenant, refuser d'avancer, elle ne sait pas réellement quoi faire, elle ne sait même plus quoi penser. Aaron, mon grand Aaron... Finalement, ce n'est pas toi qui fais l'enfant. « Il n'y a peut-être rien à dire, est-ce que tu as pensé à ça ? J'ai décidé de partir, je suis partie, il n'y a rien d'autre à ajouter. Qu'est-ce que ça aurait changé de toute façon, si je t'avais tout avoué ? Tu m'aurais vu, tu aurais compris, et puis quoi ? Tu n'aurais fait que m'exposer en pleine face la promesse que j'étais en train de briser ! » Et la voilà qui s'enfonce, et la voilà qui s'éveille... Ses résistances endormies, les murmures criards qu'elle n'a jamais formulés commencent à s'échapper ouvertement de ses lèvres égoïstes, pour diffuser un parfum qu'elles n'auraient jamais voulu laisser s'échapper. Dans sa bouche, la vérité a un goût qu'elle connaît, mais qu'elle semble redécouvrir à nouveau. Doux et amer à la fois, comme celui de confessions qu'on peine à révéler. Son regard se détourne d'elle-même, à la fois gêné et excédé de ses propres paroles. Treize ans bordel... Treize ans et le coeur d'un enfant.

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MessageSujet: Re: It doesn't hurt me - Maaron   It doesn't hurt me - Maaron EmptyLun 18 Fév - 8:38





Maintenant nous sommes tout seuls

L'expression des sentiments peut parfois se faire d'une manière plus qu'étrange. Certains rougissent sous la gêne, d'autres se mettent à rire sous l'anxiété, et puis il y a ceux qui laissent parler les mains à la place des mots. Est-ce être idiot ? Sûrement pas. Juste une autre manière de faire comprendre, mais au bout du compte, il se demande pourquoi il a osé faire ce geste. Absolument stupide, inconscient. Se sentir mieux ? Pendant quelques secondes oui, il s'est presque senti revivre complètement. Puis, maintenant qu'il peut voir le dégât, il fronce les sourcils. C'est le regret qui s'amuse à toquer à sa porte, c'est lui qui veut le prendre par la main à son tour. Mais, il ne peut pas s'excuser, pas l'implorer de le pardonner. Au fond, si j'ai collé ma main sur sa figure, c'est pour une tout autre chose, bien que la colère soit la grande moitié. La réveiller ? Allez, maintenant il essaie de se donner bonne conscience, que ce coup asséné sur son visage ne sert pas à rien. Pourtant, il doute, il hésite à changer d'avis, à claquer des doigts et vouloir revenir quelques secondes en arrière. Malgré tout, tout se mélange pour lui dire : ne regrette plus rien, au stade où tu en es, tu ne peux faire pire Aaron. Peindre sur un tableau blanc toute la violence des enfants Duchesne. L'une qui se trouve être la maîtresse des mots, le spectre des phrases assassines et l'autre qui agit selon ce que ses pulsions lui disent, le monstre des âmes torturées. Très chouette duo, que dis-je, explosif. Il en est à un stade où il se demande si, quelque chose n'a pas été trafiqué à leur naissance, pour que tout soit ainsi. Incompréhension, désillusion, colère rouge et deux coquilles vides. On se lance les armes pour mieux les aiguiser. Rien n'est écrit comme sur du papier à musique, parfois des évènements viennent à tout faire tomber à l'eau. Il arrive de temps en temps que l'on remonte, que la noyade n'est pas gagnante. Mais sur ce coup ? Je dirais que je tombe, au fin fond d'un lac. Impossible de crier, impossible d'appeler de l'aide, parce qu'il n'y en a plus. Il a beau se souvenir, il a beau se dire qu'avant, elle n'était pas comme ça. Mais, le présent me rattrape, me met cette claque dans la figure, m'arrache à tout ce que je peux avoir. On a beau sourire, on a beau vouloir le monde à ses pieds, se dire que tout peut s'arranger en riant à gorge dévoilée : c'est pour ceux qui veulent y croire. Réduire ses espoirs à néants, de la poussière qu'il verrait presque voler dans la pièce et disparaitre dans les murs, se faire avaler. Ses deux bras le long de son corps, il n'ose plus bouger. Comme encore totalement tétanisé par son geste, mais son visage, ne montre plus grand-chose à vrai dire. Si, seulement ce froncement de sourcils, ce pétillement fade dans ses yeux. Mettre le masque de l'indifférence sur un être qui montre bien trop qui il est. Je le tiens enfin entre mes mains, tente plus ou moins l'impossible. Certains arrivent à poser cette horreur sur leurs visages, Equinoxe doit être parmi eux. Une secte géante, des masques qui ne cessent de dévoiler leur froideur, quelque chose qui ne devrait même plus exister. Acte de défense, pour empêcher quiconque de toucher le coeur, empêcher quiconque de ronger de l'intérieur. Montrer sa faiblesse gonfle l'ego de celui qui veut la peine autour de lui, laisser apparaitre les larmes ferait presque rire celui qui désire un peu de tristesse entre ses doigts. Son coeur bat, pulse contre son torse, mais, lentement. Peut-être trop. Pas totalement calmé, pas totalement plongé dans une folie sourde, systématiquement, il glisse ses mains dans ses poches, comme s'il avait honte. Ses yeux restent sur elle, ses oreilles attendent une réponse. Tout et n'importe quoi, j'attends la plus cinglante des phrases, j'attends un : oui Aaron, j'en avais marre de toi. Se rassurer, s'empêcher de continuer à descendre sur la pente de l'insomniaque de service qui se pose trop de questions, qui ne dort plus parce qu'il veut des réponses, il veut savoir ce qu'il a fait de mal pour mériter tant de coups. Alors il reste des nuits entières à regarder le plafond tout en se murmurant des fausses idées, des réponses un peu dingues, un peu hors du temps. On suppose, on colle sur des murs des petites vignettes avec ce point d'interrogation qui nous nargue. Elle elle sait, pas moi.

Il ne reste plus que l'attente, celle qui pousse à soupirer, à se ronger les doigts jusqu'au sang. L'interminable attente. Les secondes deviennent minutes, les minutes des heures et ainsi de suite. Silence complet. Juste deux paires d'yeux qui se croisent, et pas grand-chose à y voir. Bien triste à se dire qu'après des années : on finit par perdre beaucoup de choses. Oh oui, j'entends au loin : même si rien ne va, il y a toujours ce fil, cette connexion. Je ne le vois plus, j'ai beau essayer de m'accrocher, au bout il n'y a que les ténèbres. Le vide. Je pourrais essayer de m'y aventurer, de trouver quelque chose, une quelconque lumière. Mais, c'est comme dire à un enfant de regarder sous son lit le soir : il a bien trop peur de se faire croquer, de finir à l'autre bout de sa chambre recroquevillé. C'est la peur qui empêche. C'est la boule au ventre qui ne veut que le retenir, l'obliger à rester là, à tenir ce fil tout en se questionnant sur ce qui peut se trouver derrière cette fumée sombre. Il la regarde, tente de la détailler du mieux qu'il le peut. Sa joue devenue rouge, et sa main qui se glisse sur ses lèvres. Une couleur vermillon qui brillerait presque. Du sang. J'y suis allé fort, peut-être plus que je ne le croyais. On ne mesure plus sa force, on ne peut plus la mesurer quand c'est une tout autre personne qui parle à votre place. Mary reste stoïque, comme toujours, pas un soupçon d'énervement, ne serait-ce que tout petit. Est-ce que je prends un malin plaisir à vouloir la faire éclater au grand jour ? Oui et non, non et oui. Je ne remarque même plus ce que je tente de faire, je ne sais plus tellement ce que je voulais à la base. La récupérer ou la faire partir, à nouveau. Une petite voix s'amuse à me murmurer à l'oreille que ce coup véridique, sera pour elle une raison de plus pour disparaitre dans la nature. C'est peut-être ça, perdre la raison. Faire quelque chose, regretter quelques secondes après, tenter de se donner bonne raison et ne jamais savoir ce qui est bien au final. Parce que le bonheur des uns, peut faire le malheur des autres. Cette phrase résumerait presque bien cette situation, un peu tout ce qui est arrivé depuis que les retrouvailles ont eu lieu. Retrouvailles. Un mot doux à l'oreille. Systématiquement, on se met à penser que tout ne sera que larmes de bonheur, rires et sourires rayonnants. Il faut croire que moi et Mary, aimons sortir du lot, avons cette facilité à tout casser, à tout compliquer alors que tout pourrait être bien plus simple. Tout pourrait se réparer grâce à des mots, à une prise de conscience chez elle comme chez moi. Trop têtus, trop maladroits pour pouvoir se dire la vraie vérité, celle qui ne se murmure qu'une seule fois et qui ne se dit plus jamais. Les vérités d'Equinoxe, ne sont que des voiles, que des portes à ouvrir pour mener vers un coffre renfermant absolument tout. Son coeur aussi. Je ne suis plus capable de l'atteindre, ses portes se referment devant ma figure, j'ai beau frapper dessus, vouloir de toutes mes forces, prier ma bonne étoile : il est impossible d'atteindre l'horloge de Mary Duchesne. Avant, j'y arrivais, avant je pouvais. En quatre années, elle a fermé son âme aux autres, à sa famille pour y construire des défenses. Plus de mal, plus de rien. Juste des mots qui sortent, des mots qui rebondissent sur les murs et atteignent directement l'autre. Elle sait comment ça marche, elle sait quoi toucher, où appuyer pour faire saigner à nouveau. Exprès ou pas ? Personne ne le sait, même pas lui, juste elle et son sourire en coin, elle et sa nouvelle façon de regarder les choses. Mary Duchesne, Equinoxe pour surnom, jumelle, numéro 1 il fut un temps, et existence à mes yeux. C'est malsain de s'attacher comme ça, profondément mauvais d'être dépendant d'une seule personne, de voir son monde se faire ronger quand elle n'est plus là. L'amour rend idiot, c'est un fait que personne ne pourra contrer. Pourtant, dans ce cas présent, ce n'est pas le genre d'amour qui vous fait niaisement sourire, vous donne des étoiles dans les yeux. Là, c'est plus celui qui fait saigner, plus celui qui gonfle au fil du temps, jusqu'à exploser un jour sans prévenir. Celui qui au dernier moment pointe le bout de son nez. Moment d'espérance, moment de revivre à nouveau comme il le faut. Trop de haine, trop d'amour, trop de tout qui déborde maladroitement. Sa voix qui s'élève à nouveau, qui casse le mur de silence. Un frisson lui traverse l'échine. « C'est bon ? Tu te sens mieux maintenant ? » Fidèle à elle-même. Il inspire alors, pousse un soupir. Ce contre-coup, cette frappe bien visée n'a rien changé. Même elle ne se laisse pas abattre, au contraire, donnez des coups à un Duchesne, il se défendra comme un tigre jusqu'à la fin. Impossible à changer, à résonner. Deux têtes trop dures, deux esprits trop mal ficelés, deux sourires qui s'étiolent, s’effilochent tout à coup. Que veut-elle que je fasse ? Danser, hurler mon bonheur de lui avoir collé un poing sur le visage ? Ce regard qui dévoile presque une certaine rancoeur, mais pas aussi grande que la mienne. Ce regard qui me scinde l'âme, voit à l'intérieur de moi. Perturbant tout ce bleu, perturbant ce regard bien trop clair. Je n'ai même plus la force de lui répondre, de m'enliser dans son jeu. Entendre ce qu'elle veut entendre, ou au contraire, lui faire entendre ce qu'elle préfère laisser de côté. Passe par une oreille, ressort de l'autre. Facile d'ignorer, facile de jouer le jeu de qui est le sourd dans l'histoire. Mary répond juste, que tout se finisse, que la porte se ferme entre nous et ne s'ouvre plus. Éclaire ma lanterne, ne serait-ce qu'un tout petit peu. Toi qui parlais de sincérité, qui disais que le mensonge c'était moche. Des belles phrases d'enfant, des jolis mots et une manière de penser définitive, mais qui visiblement a fini par se ternir au fil du temps. « Si c'est vraiment ça que tu veux entendre, je peux t'offrir ce privilège... Si ça peut t'aider à aller de l'avant, je veux bien faire cet effort, ça te permettra d'enfin lâcher toute cette histoire. » Elle recommence, à nouveau. Gagner du temps, ne répondre que vaguement. Elle est cette fumée de cigarette qui embrume tout autour, qui au fur et à mesure des minutes finit par totalement nous rendre aveugle. Equinoxe joue encore, manie les phrases comme personne ne peut manier. Répondre sans pour autant le faire, faire sortir des gonds sans jamais se laisser à coeur ouvert. Elle laisse au choix, laisse penser ce que veut penser l'autre personne. Moi, je ne veux pas me croire, je ne veux pas avoir à choisir. Hurle, murmure, mais, arrête de lancer la carte du faux, du factice. Ce n'est pas toi, ce n'est plus complètement Mary. Ma Mary. La mienne. Celle que j'aime. Celle que j'aimais. Juste une partie sombre. Il est prouvé que tout être humain a une partie chez lui qu'il ne connaît pas, mais elle finit toujours par pointer le bout de son nez. Il y a deux choix : essayer d'apprivoiser ce côté sombre, prendre la chose comme elle est, ou bien tenter de la faire partir. Elle a accepté, signé un pacte avec ses démons. Je désespère, je déglutis et n'arrive même plus à ressortir cette colère. Elle est tombée avec ce poing que je lui ai offert gratuitement, elle est tombée avec cette idée que je continue de me battre pour rien. Qu'elle ne répondra pas. « Il n'y a peut-être rien à dire, est-ce que tu as pensé à ça ? J'ai décidé de partir, je suis partie, il n'y a rien d'autre à ajouter. Qu'est-ce que ça aurait changé de toute façon, si je t'avais tout avoué ? Tu m'aurais vu, tu aurais compris, et puis quoi ? Tu n'aurais fait que m'exposer en pleine face la promesse que j'étais en train de briser ! » Son regard tout à coup disparaît, ses yeux tombent vers le sol. Il y a des gestes qui ne trompent pas, le même réflexe qui prouve qu'ils sont similaires sur des tas de points. Les mains dans les poches, il reste juste là sans bouger. Sa voix résonne dans sa tête, un écho, quelques mots murmurés sur ce muret qui maintenant n'est plus.
Très bien, j'te le promets.
Promesse d'une gamine un peu perdue, un peu obligée de dire cette promesse éphémère. Une peur de perdre un frère, une peur de perdre sa bonne raison d'exister. Promettre, jurer, le serment du sang et j'en passe. Tant de rituels, alors qu'une seule phrase suffit à lui donner la confiance qu'il lui manquait. Mary ressort ce souvenir lointain, ce petit passage qui me revient sans cesse. Le regret peut-être ? Pourquoi sortir son erreur quand on ne veut qu'une chose : l'éviter ? Un ton étrange dans sa voix, sa coquille se craquelle petit à petit, mais certainement pas assez pour qu'elle se laisse tomber à nu. Elle savait à l'avance que j'allais peut-être paniquer, que ma réaction allait être disproportionnée. Mais, peut-être qu'elle a tort, peut-être que je n'aurais pas agi de cette façon. Tant d'hypothèses mais pas assez de faits inattaquables. Je ne sais plus quoi lui répondre, elle m'enlève les mots, me les avale. Après vouloir devenir sourd, je ne suis plus qu'un muet. Equinoxe m'a cousu la bouche avec du fil solide, comme une tête miniature. Je suis juste le silence, le fantôme qui regarde avec des yeux curieux le monde des vivants. Choisir de subir, choisir de souffrir. Toujours le choix de prendre telle ou telle chose, de s'amuser avec ceci ou cela. Je n'arrive pas à faire pencher la balance. Subir, arrêter de jeter la lumière sur un être invisible. C'est alors que ma main droite se glisse dans ma tignasse, jusqu'à se poser sur ma nuque. Mes yeux tombent sur ce vieux tapis. Encore un moment de blanc, un moment morne, tellement silencieux que même l'ambiance d'un cimetière n'est pas grand-chose comparé à nos silences. Juste des respirations qui résonnent dans la pièce, ni trop rapides, ni trop lentes. J'entends mon coeur battre, lentement, calmement. Fatigué de prendre des coups, fatigué de tout et de rien. Le pourquoi qui me vient, le pourquoi qui n'aura jamais de comment.
L'insomniaque ne peut plus se coucher. L'insomniaque ne peut plus se cacher. L'insomniaque continuera d'errer sans but dans sa maison aux mille cachettes. Il ne pourra plus jamais dormir, plus fermer les yeux sans se faire attaquer par ses questions. Les rôles changent, l'enfant devient l'adulte, l'adulte devient l'enfant. Quand l'un sature, c'est l'autre qui reste au mieux stoïque et inversement. Impossible de s'énerver au même moment, impossible d'être calmes au même instant. Un cercle vicieux, nous ne faisons que tourner en rond, encore et encore. Même à l'aveuglette, même sans rien, il continue à nous suivre. Cercle, rond qui n'hésite pas à tout fracasser sur son passage. Détruire, briser. Deux marionnettes qui s'écroulent, tombent. Ses yeux se lèvent alors à nouveau vers ce visage, sa lèvre légèrement fendue, ce liquide qui dégouline juste un peu. Je suis le responsable des dégâts, comme toujours. Celui qui brise sans le vouloir, sans vraiment le remarquer. Pardon. Sensibilité qui m'emportera sûrement dans ma tombe, ce côté indécis qui me poussera à ma perte. Mes félicitations ma chère soeur, tu as gagné, comme toujours. Tu as su bien toucher, bien viser. La fatigue de ce poing, la fatigue d'hurler, de continuer à voir les couleurs là où il n'y en a plus. Son horloge interne se gonfle alors tout à coup, un frisson désagréable qui lui traverse le corps. Ce moment de saturation, ce moment où tout n'est plus que secondaire. Je t'aime à en crever. Mais tu préfères fermer les yeux. « Bien. » Bien ? Tout va bien dans le meilleur des mondes, oui, c'est exactement ça. Tout brille, tout est coloré, tout ne peut pas aller mieux. Ironie quand tu nous tiens. Dans l'encadrement de la porte, il lui suffit de reculer encore de deux pas pour arriver dans le couloir, le traverser, ouvrir cette porte, puis la claquer. Je suis heureux, la joie me comble, je souris bêtement, oui, oui, oui. Il lève les yeux vers le plafond, légèrement craquelé. « Me sentir mieux ? Ouais, je rayonne de bonheur, dégouline de joie. Ça se voit pas ? » Une phrase presque murmurée, un souffle et peut-être bien le dernier. Un regard sur elle, déçu, fatigué, blessé. Il secoue alors la tête, se retourne, dos à elle durant quelques secondes, il avance d'un seul pas avant de s'arrêter sec. « Quelqu'un me disait souvent : le mensonge, c'est moche. J'arrive plus à me souvenir qui ça peut être. Tu sais, toi ? » Un haussement d'épaules, une voix presque tremblante. Mains à nouveau dans les poches, il n'ose plus la regarder, plus rien lancer. Disparaître comme un voleur, à la sauvette comme elle a si bien su le faire. Faut croire que ça se transmet chez les Duchesne, comme une maladie. Disparaitre pour mieux revenir, le silence pour faire plus de bruit. Ses pas résonnent dans cette salle, et dehors, une larme roule le long de sa joue. Ma souffrance, elle ne peut pas la comprendre, elle la connaît simplement de nom. Ses doigts se posent alors sur la poignée de la porte, et il hésite. Il pourrait courir comme un dératé, retourner en arrière et se jeter sur elle. Main maladroite, pensées confuses, son coeur rate un bond. La porte s'ouvre, le vent s'écrase sur son visage. Il n'a pas le temps de vraiment analyser ses gestes, il se retrouve dehors, la porte claquée. Cette porte qui en a tant bavé. Plus rien à dire, ne plus pouvoir sourire. Perdre quelque chose, perdre quelqu'un. Il avance, lentement, ses jambes l'obligeraient presque à ne plus bouger. A trop aimer on finit par se laisser tomber. A aimer à en crever, on finit vraiment par finir six pieds sous terre. Il peut penser la haïr, il peut penser qu'elle est la pire. Ta tête pense, ton coeur n'est plus qu'une tache rouge.
Vivre sa vie, voler de ses propres ailes.
Les miennes sont amochées, je n'ai plus la force de viser le ciel.
(c) Myuu.BANG!


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It doesn't hurt me - Maaron

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