Hey Erin la mauviette daltonienne (oui oui. Rien que ça.)

Désolé pour le temps d'attente, mais sache que j'ai mis tout mon petit cœur à une expédition des plus rapides de cette missive. C'est juste que j'ai le cerveau en miettes, j'ai passé ma semaine à dormir comme un petit vieux et aujourd'hui je suis parvenu à caser un lapsus (pas spécialement révélateur d'autre chose que ma fatigue, sale esprit mal tordu) dans chacune des phrases que je prononçais. Lucy s'est bien marrée, d'ailleurs. Surtout quand je me suis mis à appeler quelqu'un « Mauve » au lieu de « Maud » et inventer de nouveaux verbes et règles de conjugaison... Oh, et un certain vocabulaire et enrichis le langage des signes aussi. Enfin bref, c'est pas le sujet.

Le sujet serait plutôt... Des chocogrenouilles fondues avec de la pimprenelle ? Sérieusement ? Comment tu fais pour engloutir un tel breuvage ? Après tu t'étonnes que t'as pas d'amis et tu te retrouves qu'avec des loosers, t'as vu comment tu te comportes déjà dès le matin ! Ça donne pas envie. Des chocogrenouilles fondues avec de la pimprenelle... Okay, tu sais quoi, pendant un moment j'ai pensé naïvement que tu avais cessé de me surprendre, que plus rien de ta part ne me choquerait. Bah, j'avais tort. Tu excelles toujours en la matière. Félicitations. Mais quand même... Des chocogrenouilles fondus avec de la pimprenelle... Elle te sort d'où, cette idée ?

Eh je te ferais remarquer pour ta gouverne que la manière dont tu t'alimentes a des sérieuses répercussions sur tes sens et en particulier ta vue. Je suis blond. Pas roux. Blond. Désolé de te décevoir, la caractéristique « cheveux roux » est pas obligatoire pour être un Weasley. D'ailleurs tu remarqueras qu'on est plus grand Weasley à avoir les cheveux roux à Poudlard. C'est un gène récessif, voilà tout. Et le blond, c'est le bien. Ça reste rare, pas comme ta couleur de cheveux à toi super commune là !

Benett et De Sade souvent ensemble ? Mais dis-moi, tu prends ton rôle de Watson tôt et très à cœur ! Enfin après, c'est pas parce que deux professeurs parlent ensemble qu'ils sont obligés de coucher ensemble la nuit tombée. T'es gore d'ailleurs parce que du coup j'ai déjà plein d'images qui me viennent et j'avais prévu d'aller dormir après t'avoir répondue – et enlevé ce foutu pull qui m'étripe et me gratte. Je vais faire des cauchemars, tu es fière de toi ? On dit que les filles sont romantiques et les garçons pervers. Bah non. Erin, t'es une perverse gore. Mais ne t'en fais pas, je t'aime bien quand même, hein.

Wayfarer... Tu m'expliques ou tu pavanes tes connaissances moldues devant moi là ? Tant pis, je demanderai à Blake si tu veux pas de toute façon, elle m'expliquera, elle est gentille. Oh et, « rouge drogué à la poudre de cornes de dragon » : là aussi, tu m'intrigues. Je te connaissais pas ce nouveau côté rebelle.

T'es sérieuse ? T'as acheté à Matthew un BOURSOUFFLET ? Ha oui, avec des « vagues reflets verts » bien sûr, j'ai faillit oublié. Quoi qu'il en soit, t'as perdu un pari ou... Non, je suis mauvais, tu as peut-être mis tout ton petit cœur à la tache (dans tous les cas, je doute que le prix hausse vraiment à l'approche de Noël. En tout cas, ça risque pas de te ruiner. Tu pourras continuer de vouer ton culte aux chocogrenouilles fondues à la pimprenelle sans aucun problème.) Mais quand même, ça vient totalement de toi cette idée où il t'a dit qu'il en souhaitait un ? Enfin, après, j'ai envie de dire que l'avantage du boursoufflet, c'est que Matthew le dominera le trois quart du temps, c'est pas comme les autres êtres vivants à Poudlard. Quoi que, je l'ai déjà vu dans un cours de botanique, il avait franchement du mal... En fait si ça se trouve c'est un anti-sociable, il peut pas attirer la sympathie, à part de gens comme toi. Et tu as une mission sur Terre, tu vois, d'aimer Matthew parce que qu'on qu'en dise il reste toujours un peu de bonté et de pitié dans ce monde pourri.

Et puis d'abord, mon boursoufflet à moi, il est heureux tu sauras. Il a beau sans doute avoir des problèmes de cholestérol, diabète en plus d'être atteint d'une obésité morbide MAIS il est heureux. Il mourra heureux. Prématurément, sans nul doute, mais heureux. Et s'il meurt, ce sera de la faute de Louise parce qu'à la base, c'est aussi le sien sauf que c'est moi qui m'en occupe... Oui, tu peux ravaler tes commentaires sur mon rôle dans cet ancien couple, Erin. Et comment ça, j'arrive toujours à tourner la situation comme ça m'arrange ?

Mine de rien, il est devenu limite agressif depuis l'épisode « mouchoir ». Enfin, super possessif surtout. On peut plus l'approcher – ou toucher à ce qui lui appartient, genre, sa nourriture - sans qu'il essaie de mordre et la nuit il grimpe dans mon lit pour se venger sournoisement et avec haute fourberie de mon moment d'absence qui l'a réduit à l'état de mouchoir en papier de remplacement. C'est toujours agréable de se réveiller en pleine nuit parce que votre Boursoufflet vous a mordu au ventre – ou vous a pris pour un beaf steak. Surtout qu'en l'occurrence, à la base, je rêvais que je me faisais poursuivre par plein de créatures magiques – dont le calmar géant – et me faire réveiller par une morsure au bide, c'est réellement flippant. Pendant un moment je me suis demandé ce qui se passait et où j'étais. Puis, la composition poilue de ce cher démon de mes nuits l'a trahi. Je parle toujours du boursoufflet, hein.

Enfin, je vais peut-être tenter de lui donner des chocogrenouilles fondues à la pimprenelle, peut-être qu'il fera la paix ou/et que ça le calmera. En tout cas, il a un sale caractère. T'imagines, se venger sur moi au lieu de sur le première année. Moi, son propre père. Celui qui l'élève et prend soin de lui dès que je monte dans mon dortoir. D'ailleurs, s'il m'avait écouté et qu'il n'en serait pas redescendu, il n'aurait jamais été pris pour un mouchoir ! C'est de sa faute. Il doit être en crise d'adolescence, dans l'âge bête, il se rebelle et tout (Oui oui.) J'ai plus qu'à le priver de croquettes de Boursoufflet et réviser toute son éducation et notions de bienséance. (Oui, je parle toujours de mon boursoufflet.)

Oui, malheureusement, j'ai déjà entendu/vu/croisé/approché/parlé/surpris/été traumatisé par une fan de Xander. Si ça ne te dérange pas, je ne préfère pas me ressasser ces moments hautement traumatisants et toujours incompris de mon existence. Surtout que j'ai toujours les images des profs en tête à cause de toi.

Et je dis pas du mal de Matthew, rho, je me moque, c'est de l'humour. Je me permettrais pas de médire sur une personne que je ne connais pas, tout de même. Je suis pas si blasé et frustré de la vie. J'ai un boursoufflet aimant à mes côtés, tu sauras. Il comble chacun de mes matins du soleil de son cœur. Oui oui, rien que ça.

Quant à Louise... Oui mais Erin... Comment veux-tu que je sache si elle a quelque chose à me ou se reprocher si elle m'évite... ? Et puis bon, d'accord, j'essaierai d'envisager qu'un jour je pourrais peut-être tenter de ne pas essayer de l'attraper. Ouf. Ça c'est de la promesse.
Et non, explicitement, non, elle n'en a pas données, de raisons. Enfin, si ce n'est qu'on ne pouvait pas être ensemble, mais c'est pas ce que y'a de plus clair, si ? Si jamais ça t'inspires, cher Watson, plus précisément, ses mots étaient : « Louis, ce n'est pas parce qu'on ne peut pas être ensemble que je ne t'aime plus. » Et qu'elle était désolée. Ouais. Je suis pas sorti de l'auberge.

Sigfrid ? J'ai déjà du mal à retenir le prénom des humains, tu crois vraiment que j'ai retenu celui du hibou ? Enfin, ouais, ça doit être ça. Ça lui va bien comme nom, Sigfrid, en tout cas. Dans tous les cas, tu fais un de ces effets aux volatiles toi, ma parole...

Pour Merlin, de toute façon, j'ai jamais su mentir. Mais c'est juste toi qui est fermée d'esprit. Regarde mieux, je suis sûre que tu peux y voir quelque chose dans cette tâche. J'ai foi en toiiii.

Oh, en fait, samedi dernier on (une alliée dont je ne citerai le nom et ma modeste personne) a fait un mauvais tour à un trio de Serpentard. C'était plutôt marrant, de voir leur tête après avoir été recouverts d'encre avec grande générosité de notre part. Ils cherchaient frénétiquement le coupable tout en fulminant. Franchement, ça valait le détour, comment ils étaient en colère ! Bon, bien sûr, ils ont pas trouvé d'où l'attaque venait, mais ça reste trois Serpentard, alors je sais pas si c'est le genre de la maison de Matthew de faire des blagues, mais il devrait peut-être éviter de trop chauffer Scorpius, June et le mec qui a une taille de troisième année bien qu'il soit en septième, j'arrive jamais à retenir son nom et je doute que ce soit Sigfrid aussi. Tu vois, je peux être sympa envers Matthew, je te file un conseil pour lui éviter de se retrouver défenestré. Ce serait dommage de voir un misérable boursoufflet « aux reflets vagues verts » qui ne demande qu'à être sincèrement aimé se retrouver si tôt propulsé au grade de misérable orphelin, sans avoir donné la moindre chance à Matthew... Non, faut que je m'arrête ici, sinon, ma bonne action n'en sera plus une... - xxx

Louis.

Erin,

Malheureusement et comme tu peux t'en douter, je n'ai pas vraiment d'excuses valables pour me faire pardonner mon manque de réactivité face à ta dernière lettre. Je l'ai reçue, bien sûr, et je l'ai lue, comme le veut la logique. Et j'avais prévu d'y répondre également, mais avant que je rédige ma fameuse réplique, des événements ont fait en sorte que finalement... J'ai estimé qu'il serait peut-être préférable – pour ta santé mentale, tes nerfs et aussi ma réputation en lambeaux humides - que je n'y réponde pas. Que ne rien envoyer du tout serait mieux que d'envoyer une missive complètement nulle. Et « nulle » dans le sens « qui vaut rien du tout. ». Un gros zéro absolu. Quoi que non, je rectifie : le terme n'est même pas assez fort. Si j'avais à noter la lettre que j'avais voulu t'écrire, elle aurait facilement atteint les nombres négatifs.

Je sais pas. Est-ce que ça vaut vraiment la peine de te répondre ? Visiblement, tu veux avoir de mes nouvelles... Et tu me fais me sentir coupable de te laisser en plan même si à la base, mon premier sentiment n'était pas de t'ignorer mais juste de t'éviter une grosse migraine et un froncement de sourcils tellement intense qu'il t'aurait définitivement ridé le front précocement.
Dis-moi, Erin, si les dites nouvelles sont cruellement pathétiques, irrationnellement ridicules est-ce que tu veux toujours en prendre connaissance ? La dernière semaine était réellement horrible. J'ai connu pire certes. Toutefois, en règle générale, lorsque l'infortune me nomme comme heureux gagnant de son mauvais sort, il s'agit d'une seule journée et d'une affaire de minutes avec un effet qui finit par s'estomper doucement... Bien que ne se trouve jamais être annihilé. Quoi qu'il en soit, en aucun cas s'agit-il d'une semaine où les événement s'enchaînent dans un macabre défilé tout en hauts-le-cœur.

Et si j'arrêtais là ? Je te laisse sur ta faim ? T'en veux plus ou pas ? Si oui, tu continues, si non, tu brûles cette lettre. Je te fais confiance sur la destruction de celle-ci, d'ailleurs. Rien que penser qu'elle puisse atterrir dans de mauvaises mains me donne envie de me jeter du haut de la tour d'astronomie ou refaire une excursion dans le lac. Bien que cette fois-ci, le saut serait volontaire.
Erin, tu as déjà fait un saut, dans ta vie ? Du genre, sauter du haut d'une falaise ? Pas dans un destin suicidaire hein, plutôt comme faire le grand plongeon dans la mer. Tu t'es déjà retrouvée en hauteur, tu t'es déjà sentie toute petite face au sol qui devrait te recueillir si jamais tu t'élances dans le vide ? Tu devrais essayer, un jour. Tu sais, étrangement, le mieux dans ce genre d'aventures, ce n'est pas la chute. Et pas vraiment l'amerrissage, comme tu peux t'en douter. C'est le saut. Ce moment où, en pleine âme et conscience, prenant ton courage à deux mains, la volonté au bord des lèvres, tu te propulses dans le vide, au petit bonheur la chance. A mes yeux, c'est ça, le meilleur moment. Je pense que ce le sera toujours, par ailleurs.

J'ai vu Louise. Elle était à l'entraînement de Quidditch. J'ignore ce qu'elle y faisait, mais elle y était. D'accord, Lucy a ouvert l'entraînement à tous les Poufsouffles, et Louise apprécie énormément le Quidditch, mais pourquoi se serait-elle enquiquinée à assister à l'entraînement ? Je vais peut-être paraître égocentrique, mais j'aime penser qu'elle y est venue un peu pour me voir. Après tout, elle s'amuse à m'éviter, m'ignorer toute la sainte journée, et tout d'un coup, elle vient à l'entraînement, s'assit dans les gradins, juste sous mon nez, à ma merci ? Elle s'est jetée dans la gueule du loup ? Et même dans l'optique qu'elle n'aurait pas su que j'étais le nouvel attrapeur, elle n'est pas spécialement myope et aurait finit par me reconnaître. Si Louise n'aurait vraiment pas voulu me voir, elle serait partie. Elle aurait craint que je lui demande quelques minutes de son temps et serait partie. Mais non, elle est restée. Dans un grand désastre, je n'ai pas pu lui parler, mais elle était là, et elle est restée. C'est plutôt bon signe, non ?

Oui, je te vois déjà froncer les sourcils. « Pourquoi il commence à me dire qu'il a passé des mauvaises journées s'il me raconte des événements assez « positifs » vis-à-vis de Louise après une éloge sur les grands sauts ? ». Bah. Parce que j'avais envie d'introduire les choses bien ? De parler du soleil et du beau temps ? Bien que dans ce cas-là, tout est extrêmement relatif. Peut-être que je me dis surtout que si la lettre finit par être assez longue, je ferais l'impasse sur le reste. Sur les mésaventures de Louis à l'école des sorciers.

Tu t'y connais en balai ? En « vieux » balais ? Ceux du siècle dernier ? Tu sais, il y avait les Comètes, les Nimbus... Et puis le fameux Éclair de Feu. Albus – un de mes nombreux cousins que tu connais sûrement puisqu'il est comme toi à Gryffondor, et que bon, c'est un Potter. - en possède un. Ou plutôt, il en a hérité d'un. Son père avait reçu l'Éclair de Feu durant sa scolarité à Poudlard, un cadeau prestigieux et qui lui était extrêmement cher. Je ne vais pas m'étendre sur la vie peu lumineuse de mon oncle mais... Ce balai composait un réel symbole. Je ne suis pas forcément quelqu'un de matérialiste. Quand Victoire a renversé son chaudron de petit alchimiste sur la première carte semi-rare de sorcières et sorciers célèbres que j'ai eue en ma possession, je n'ai pas râlé – oui, tu dis que je suis un râleur, mais vois-tu, pas tant que ça. Ma première réaction a été de m'assurer qu'elle aille bien. En somme, je ne suis pas spécialement quelqu'un de matérialiste – au risque de me répéter. Mais peut-être que comparer une carte semi-rare à un Éclair de Feu est pauvret. Et que tout ce que je te raconte n'a ni queue ni tête et que tu commences à te demander où se situe ta dernière Pimentine pour cesser ce mal de tête qui s'annonce récalcitrant et s'installe sournoisement entre deux de tes synapses. J'ai cassé le balai d'Albus. C'était un accident, mais je l'ai brisé. J'ai jamais vu mon cousin dans une colère aussi féroce, il était tellement outré qu'il m'a réellement effaré. La scène où je lui ai avoué que j'avais cassé l'Éclair de Feu est réellement ancrée dans ma mémoire à jamais, tout comme son expression. Je me demande encore ce qu'il l'a retenu de m'assassiner de sang-froid ou au moins de me lancer un sort en pleine figure. De toute évidence, Albus est le genre de garçon qui préfère frapper avec les mots et se venger sur le paysage plutôt que de taper sur son interlocuteur. Mais je crois qu'à choisir, j'aurais préféré qu'il me lance un sort. Ça n'aurait rien arrangé, ça n'aurait pas réparé le balai, mais je l'aurais mérité. C'était un accident, oui, et par définition, un accident n'a pas de responsable. Mais je me sens coupable. J'ai passé ces deux semaines à essayer de réparer le balai, honnêtement. J'ai jamais lu autant d'ouvrages sur les balais, sur l'histoire des balais, sur les théories des balais... J'en rêvais lorsque je finissais par m'endormir involontairement. Sérieusement, j'ai passé tout le temps que je pouvais sur ces fichus débris, sur mon fatal chef d'œuvre – ou plutôt, celui du cognard que je n'ai su éviter – et... je suis parvenu à rien. En dépit des nombreuses nuits blanches, en dépit des heures innombrables que j'ai passé penché sur l'Éclair de Feu, je ne suis parvenu à rien. Strictement rien. Le balai demeure cassé, là, en plusieurs morceaux, pitoyable. Et je ne peux rien y faire. J'ai tout essayé, j'aime pas dire ça, mais j'ai réellement tout essayé. Je ne vois pas ce que je peux faire de plus, honnêtement. J'ai beau me réveiller parfois au beau milieu de la nuit avec une idée, je me rends compte que le truc c'est que je n'ai pas les moyens de faire une machine à remonter le temps et j'essaie de me rendormir alors que le monstre de la culpabilité mâchouille mes entrailles aussi goulument que gaiement. C'est stupide, mais on m'a toujours dit que toute peine méritait salaire. Eh bien, c'est faux. Toute la peine que j'ai été capable de donner jusqu'à l'épuisement n'a eue aucun salaire si ce n'est une tête de déterré et des mauvaises notes et des remarques aussi désobligeantes que violentes vu que je ne me préoccupais plus de mes devoirs. Le pire, c'est que je n'ai même pas envie de rattraper le retard sur mes cours parce que rester sur cet échec, sur ce balai, j'y arrive pas. Je suis perfectionniste, c'est un réel défaut. J'en suis devenu obsessionnel. Et puis, je me dis que si j'arrive à réparer le balai, Albus me pardonnerait peut-être...

Le pire de l'histoire, c'est qu'il n'y a pas qu'Albus qui m'en veut. Ou en tout cas, qui est un peu en froid avec moi. Avec Fred – autre cousin Weasley, Poufsouffle, septième année – ce n'est pas la joie non plus. On s'est... Violemment disputé. Enfin. Oui. On peut dire ça comme ça. Ça partait d'un bon sentiment de la part de Fred. C'est plutôt... Mon caractère à la noix qui a fait que ça s'est gâté. C'est ma faute, encore une fois. C'est pour ça que j'ai pas d'amis, Erin, parce que je suis insupportable. Parce que je finis par casser soit l'objet auquel quelqu'un tient comme à la prunelle de ses yeux, soit les pieds, tout simplement. C'est sans doute pour ça que Louise ne veut plus s'embêter avec moi. A vrai dire, à sa place, je peux bien comprendre. S'enquiquiner d'une telle plaie, c'est un véritable calvaire qu'on s'afflige jour après jour. Et toi aussi, je comprends pas pourquoi tu réclames de mes nouvelles ? Peut-être parce que tu ne t'es pas rendue compte encore comment je suis, le « revers de la médaille ». Bien que me considérer comme une médaille serait désopilant. Disons alors la face cachée. Un jour viendra où tu auras finit de lire cette lettre et tu te diras « Par Merlin, quel horrible personnage. Je ferais mieux de retrouver Matthew de ce pas. »

Tu connais Sarah ? Sarah Mandleton ? A poufsouffle ? Je suis sûr que tu as au moins entendu parler d'elle une fois où que tu l'aies vue. Elle est assez remarquable puisqu'elle souffre d'une maladresse sans égale. Tu vois, cette pauvre Sarah, elle est maladroite à l'extrême. Dans mon cas, je suis le malchanceux par excellence : je porte la poisse. Je suis un réel porte-poisse. Sur ce bout de parchemin, ça ne se voit malheureusement pas à l'œil nu, mais y'a plein de petits échantillons de poisse que je n'ai pu retenir de s'incruster dans le papier. Ça va te porter poisse aussi, tu vois. Fait attention dans les escaliers. Mets des gants la prochaine fois que tu reçois quelque chose de ma part.

Et tu sais, en cassant le balai, je me suis blessé aussi. Et ça m'énerve. Pas parce que je suis blessé, enfin, oui et non. Mais ça m'énerve parce que je suis blessé et que je suis attrapeur. Que Lucy me fait – faisait ? - confiance et que j'ai réussi à me blesser. Ça guérira, et de toute façon, je ferais en sorte que ça ne change rien à mes capacités, mais... Je trahis tout le monde, vraiment. Il ne faut rien me donner, il ne faut plus me parler, il ne faut plus rien faire avec moi, parce qu'automatiquement, je vais sois énerver au point de faire sortir une grosse veine de votre front, ou faire en sorte d'être dans votre collimateur. Je sais, il y a des jours comme ça, où on aurait mieux fait de rester couché... Mais... Sérieusement ? A mon rythme, j'ai l'impression que je ferais mieux de rester tous les matins couché.

Et puis tu sais quoi. J'en ai marre. Voilà. J'ai déballé tous mes déboires, alors je vais y aller jusqu'au bout et ma misérable existence n'aura plus de secret pour toi. J'en ai marre des Résistants. J'en ai marre de la petite guerre à Poudlard. Franchement, ça sert à quoi ? Ça n'a aucun intérêt. En quoi ça joue sur quelque chose ? En quoi ça change quelque chose dans le monde ? Quand je sortirai d'ici, je rejoindrais l'Ordre, mes convictions et mes idées n'ont en aucun cas changé. Mais la Résistance, plus ça va, plus j'ai l'impression que c'est une grosse blague. Un prétexte pour que chacun tape sur l'autre pour imiter nos parents qui font pareil là-dehors. Sauf que là-dehors, ça sert vraiment à quelque chose. Chaque plaie a un poids. A Poudlard, tout est vain. J'attends réellement qu'une chose : le jour où je pourrais enfin sortir du château. D'accord, tu vas me dire que dehors ça ne sera certainement pas meilleur, que ça sera probablement pire. Mais je me dis qu'au moins, dehors, je servirai à quelque chose. Qu'au moins, dehors, il y a un sens à tout ça. Et paradoxalement, je me sentirais plus libre dehors pourchassé par des mangemorts que dans les murs humides du château traqués par McClary et cie. C'est stupide et irrationnel, je sais. Peut-être que j'aime tout bonnement me leurrer. Dans tous les cas, s'il faut encore avoir de l'espoir, celui-ci est le seul qui parvient à me séduire.

J'imagine que tu te demandes pourquoi je te raconte tout ça. J'imagine que tu regrettes amèrement d'avoir réitéré une demande de réponse. J'imagine que tu te dis que j'aurais mieux fait de mettre tout ça dans un de mes journaux intimes plutôt que d'accrocher un tel bout de chemin à notre incontinent Sigfrid. C'est assez étrange. Je ne ressens pas le... Souhait ou même la volonté de teinter les pages de mon journal de tout ça. J'écris dedans depuis mes dix ans, voire plus tôt, j'y ai toujours tout mis. Mais désormais, je fais un réel blocage. Mon journal est là, caché, ensorcelé, en sécurité – ou j'aime croire qu'il est dans un tel état – mais je n'y touche pas, je ne le dérange pas. Il repose tranquillement, sereinement. J'y ai mis des trucs réellement horribles, dedans. J'ai relaté tout ce qui s'est passé à Poudlard jusqu'à désormais, même le malheureux événement qui a fait que nous nous sommes rapprochés. Mais ces événements-là, Albus, Fred, l'Éclair de Feu, la Résistance, je n'ai pas la force de les mettre. Ça va te paraître ridicule, mais je ne veux pas les y mettre. Parce que surmonter les autres épreuves me semblaient aller de soi, ça me semblait possible bien que difficile. J'étais déterminé à le faire. Mais ces moments-ci de ma vie, j'ai l'impression qu'ils sont de réels cul-de-sac, qu'ils ne s'arrangeront pas. Que ça restera toujours comme ça, qu'il n'y aura plus aucune évolution, et narrer des faits si figés dans mon journal rime dans mon esprit avec blasphème. Les journaux ne servent pas qu'à se rassurer du fait qu'on n'oubliera jamais perpétuellement ses souvenirs, des moments de sa vie. Ils servent aussi à vivre une évolution et à répandre de l'espoir. C'est mièvre, je sais, tu peux rire. Mais je ne vois aucun espoir réel là-dedans, aucune évolution possible. Alors, oui, je préfère te confier tout ça à toi, à ton plus grand désarroi, probablement avec le dernier espoir que peut-être que toi, tu y en verras, de l'espoir. Ou peut-être ne comprendras-tu simplement pas pourquoi je me prends tant la tête pour une histoire de balai et de camps à seize ans. Dans ce cas-là, ne t'en fais pas, je ne t'en voudrais pas – de toute façon, c'est plus à moi de m'excuser de t'infliger tout ça – j'ai l'habitude d'être l'incompris de service.

Tu sais quoi, je te propose d'oublier tout ça. Ou plutôt, que tu oublies le gros amas de n'importe quoi que tu viens de lire et que tu me rejoignes ce soir, vers 21h, aux cuisines, pour qu'on élucide le mystère du prof Benett dans une folle escapade nocturne digne de... he bien. De nos névroses respectives. Je te promets de porter mon masque de la plus belle humeur. - xxx

Louis.