C'était une blague. Une maudite et détestable blague que s'amusaient à jouer les professeurs de cette école pour le plus grand déplaisir de la population étudiante. Roxanne Weasley venait à peine de poser un pied à l'intérieur de la Grande Salle que déjà l'envie de sortir en courant la prit à la gorge. Mais une Serpentard ne se défile jamais, et elle ne voulait pas passer pour une faible. Elle respira donc un grand coup et posa le deuxième pied à l'intérieur de la salle. Elle venait de signer son arrêt de mort. Pénétrer dans une salle remplie par tous les élèves – maisons et niveaux confondus – de Poudlard revenait à courir à sa perte. Et Roxanne n'était pas suicidaire, mais elle ne voyait pas d'autre solution, hormis dormir à la belle étoile. Son sac à l'épaule, son crapaud sur l'autre, elle commença à se frayer un chemin au travers des différents élèves qui semblaient eux aussi déprimés ou énervés. La Grande Salle comme Roxanne la connaissait depuis maintenant cinq ans semblait s'être métamorphosée : le plafond magique qui faisait croire à une nuit étoilée ou à un puissant orage avait disparu. A présent on ne voyait plus que les dalles défraichies et jaunâtres qui ornaient la totalité du plafond. Quelques bougies et torches étaient accrochés sur les murs, mais cela ne sera pas assez pour éclairer convenablement la Salle la nuit venue. Pour le moment, le soleil perçait encore à travers les grandes vitres de la salle, qui n'avaient pas changées elle. A la place des quatre grandes tables alignées pour manger, des sacs de couchages jonchaient le sol en quatre tas distincts : un vert pour les serpents, un bleu pour les oiseaux, un jaune pour les blaireaux et un rouge pour les gryffons. Certains élèves s'étaient déjà emparé de leur sac de couchage et s'était trouvé un coin tranquille. Des groupes d'amis était réunis et parlaient à vois basse, dans cet endroit où l'intimité n'était pas présente. Souvent les élèves restaient avec les autres de leur maison, mais quelques un allaient vers les autres maisons. Mais même si en apparence cela ressemblait à un grand camp de vacance, Roxanne sentait bien que les autres élèves étaient à bout de nerfs, tout comme elle. Il régnait dans l'air comme un vent de discorde qui n'allait pas tarder à faire exploser les conflits. La rouquine reprit pourtant contenance assez rapidement. Elle releva la tête et reprit cet air hautain qui ne la quittait jamais. Elle se dirigea alors vers le tas de sac de couchage verts, poussant au passage les élèves qui la gênait, lançant des regards tueurs à ceux qui voulaient rétorquer quelque chose. Si la rousse n'était pas aimable d'habitude, mieux valait-il ne pas la mettre en colère dans la situation actuelle. Elle devait se résoudre à vivre comme une moldue, entourée de dizaines de personnes qu'elle ne supportait pas, allait devoir dormir près des Gryffondors, des Serdaigles et des Poufsouffle, supporter les enfantillages des plus jeunes. Bref, la vipère était au bord de la crise de nerfs et le premier qui allait venir l'importuner allait passer le pire moment de toute son existence. De toute façon, cela se voyait bien sur le visage de la verte qu'il ne valait mieux pas l'importuner : il y avait dans ses yeux cette haine qui montrait bien que le premier serait aussi le dernier. Ses traits étaient plus dur, sa démarche plus agressive. Bref, une furie en puissance qui ne demandait qu'à être réveillée. Arrivant près des sac de couchage, Roxanne en attrapa un : une vielle odeur de renfermé lui arriva jusqu'aux narines et elle regretta immédiatement le confort de son lit. Mais elle sut garder la tête haute et se retourna pour tenter de trouver une tête connue. Elle aperçut des amis de Serpentard mais elle ne voulait pas les voir pour le moment. Elle continua son tour de ronde et aperçut au loin une tête brune qu'elle reconnaissait, avec un sac de couchage jaune. Un sourire apparut sur les fines lèvres de la vipère et elle commença à se frayer un chemin vers Louise Londubat qui ne la voyait pas, étant de dos. La verte roula son sac de couchage qu'elle coinça sous son bras et arriva finalement à hauteur de Louise. Elle fit tomber son sac sur le sol et s'assit à côté de la jaune qui sursauta. Puis elle lui adressa un sourire – tout du moins dans la limite du possible. « Je crois qu'à ce train là je ne vais pas supporter longtemps ces conditions. » Elle détourna les yeux, continuant sa ronde des têtes connues. Elle aperçut Angel Stark à quelques mètres d'elle, en pleine conversation avec une tiers personne que Roxanne ne situait pas, et sur la droite de la vipère, Damon Sleeman. Elle adressa un sourire et un signe de main à ce dernier tandis que Louise répondait quelque chose. Puis elle tourna sa tête, sa longue chevelure suivant le mouvement, et plongea ses yeux dans les iris chocolat de la jaune. « Je ne sais pas ce qu'il leur est passé dans la tête pour nous faire vivre comme des moldus. Plus de magie, mais je rêve ! » Roxanne prit son crapaud entre ses mains : il avait un drôle d'air ces derniers temps. Sans doute ces évènements l'avaient aussi perturbé. La bestiole fit quelques bonds entre les jambes de la verte qui le regardait d'un œil passif. Et la vipère laissa la parole à Louise, espérant que cette dernière la détendrait un peu, avec sa maladresse habituelle.

L'ennui. Après la honte, c'était surmènent la pire hantise de la jeune femme qui était à présent assise aux côtés d'une jaune qu'elle ne côtoyait que parce qu'il n'y avait personne d'autre dans les environs digne de lui adresser la parole. Mais à présent, elle regrettait presque de s'être installée ici, et lorsque Louise ouvrit la bouche pour parler, Roxanne dut faire de nombreux efforts pour ne pas lever les yeux aux ciels d'exaspération. Non pas que les paroles de la brune soient idiotes ou quoi que ce soit du genre. Non son « Il faut essayer de conserver son calme sinon nous sommes vouées à… » n'était pas du tout énervant … en temps normal. Mais à présent que Roxanne était sans magie, obligée de côtoyer des idiots plus crétins les uns que les autres, dormir près d'eux, sans aucun recours possible à la magie, le moindre détail irritable pouvait la faire entrer dans une rage folle et destructrice. Habituellement, la Londubat était plutôt source d'amusement pour la vipère qui se délectait avec joie de voir la pauvre jaune s'emmêler les pinceaux et tenter de réparer ses erreurs. Mais là, lorsque la voix de la jeune femme arriva aux oreilles de la rousse, ce fut comme si une envie de tout envoyer valser attrapa la gorge de la verte. Mais elle se retint et se contenta de détourner le regard pour souffler un bon coup et tenter de garder la face devant les autres élèves. Même si, pour tout vous dire, elle se fichait bien de l'avis de ces derniers. Elle préféra donc continuer de parler, espérant que cette exaspération ne soit que passagère. « C’était la seule solution – du moins, je crois – avec un peu de chance…On sera autorisé à rentrer chez nous… » Quoi ? Roxanne se redressa de toute sa hauteur et lança un regard noir à Louise : si elle avait pu utiliser la magie à cet instant précis, la jaune n'aurait plus été qu'un vulgaire tas de poussière. Rentrer chez eux ! Et puis quoi encore ? Roxanne préférait de loin rester ici, à vivre comme une moldue plutôt que de devoir rentrer dans son « nid parental » et voir toute la journées ses parents et son imbécile de frère. Comme si cette option était envisageable. Il était hors de question pour Roxanne de retourner chez elle plus tôt que prévu : deux mois étaient déjà bien trop long à son goût, alors imaginez toute une année. « Je crois que de ne pas utiliser la magie t'a retourné le cerveau ma pauvre Louise. Et en plus tu penses que rentrer chez nous est une chance ? Une chance de quoi ? De rien du tout. Notre vie est ici, notre scolarité et notre apprentissage magique vaut bien mieux que de rester cloitré dans une vulgaire maison avec nos parents sur le dos. Il faudrait te reprendre » Roxanne avait débité cela d'une voix glaciale, comme elle savait bien le faire. Elle ne fit même pas un sourire pour montrer à Louise que ce n'était pas grave : elle aurait bien le temps plus tard d'aller « s'excuser » auprès de la jaune. Pour le moment, elle aurait plutôt voulu lui arracher un à un ses cheveux bruns mais elle ne pouvait pas, elle ne pouvait rien faire. La verte baissa les yeux sur son crapaud qui lui aussi semblait agité : il n'arrêtait pas de bondir à droite à gauche. La vipère avança les mains pour le récupérer mais avant qu'elle n'ai put toucher la peau rugueuse de l'animal, ce dernier bondit brusquement en direction de la jaune. Les yeux bleus de la rousse suivirent le mouvement du crapaud et elle remarqua que le chaton de la brune venait se sortir du sac de couchage et avait bondit – toutes griffes dehors – sur le pauvre batracien. Les deux animaux se heurtèrent en plein vol et engagèrent un combat où seul le meilleur pouvait espérer s'en sortir. Roxanne souffla et une mèche de cheveux se souleva délicatement sur son visage avant de se reposer au même endroit. La rousse la poussa d'un revers de la main et s'apprêta à interrompre le combat lorsque son crapaud abdiqua. Le petit animal bondit en effet sur le côté elle alla se cacher derrière une paire de chaussures noires. Roxanne remonta lentement ses yeux sur la silhouette pour voir à qui elle avait affaire, et au fur et à mesure que ses yeux montait, un sourire se dessinait sur ses lèvres. Elle arriva enfin au visage, et reconnut celui de Damon Sleeman, ce même Serpentard à qui elle avait adressé un bref sourire quelques minutes plus tôt. Était-ce une bonne ou une mauvaise chose qu'il soit là ? Aucune idée vu l'humeur de la rousse. En temps normal, leurs échanges étaient déjà houleux par moment, alors là, avec une Roxanne passablement irritable, il se pouvait très bien qu'ils deviennent explosifs. Mais après tout, peut être réussirait-il à la calmer. Roxanne agita le bras, faisant tinter les quelques bracelets qu'elle avait autour du poignet, lança un regard noir au chat de Louise qui retourna se cacher dans le sac de couchage de sa maitresse et adressa un sourire lumineux à Damon. Puis elle se redressa et fit quelques pas afin de récupérer son crapaud qui semblait toujours un peu inquiet de son combat. Elle se pencha afin de l'attraper et le posa sur son épaule droite. Puis la verte plongea ses yeux azurs dans ceux de Damon et lui lança un « Où est-ce que tu va dormir ? Parce que pour le moment je n'ai vu personne à part toi. Donc je suis allée voir Louise » La rousse fit un léger signe de tête en direction de la dite jaune qui regardait les deux verts de là où elle était – c'est à dire le sol – ce qui fit bouger sa crinière puis replongea son regard dans les yeux de Damon. « Ça ne te dit pas de rester un peu avec nous ? » Elle avait adopté un ton presque suppliant, mais assez subtil pour que seul Damon puisse s'en rendre compte. Elle espérait vraiment que le vert allait comprendre et accepter de se joindre aux deux jeunes filles. La rousse tourna les talons, son crapaud toujours sur l'épaule, et retourna s'assoir en face de la jeune qui n'avait pas bougé d'un pouce. Elle s'affala sur le sol et regarda Damon, d'un regard qui voulait tout dire « Viens t'asseoir ! ». Après tout, il pouvait bien lui faire ça, la sauver des griffes d'un ennui total, et peut être même sauver la peau de cette pauvre Louise.