Les hommes sont volages. Bien folle est qui s'y fie.
Andromak & Isis
Point culminant d'une rage que tu n’avais que trop de mal à contenir, tu serrais les poings à t'en faire blanchir les phalanges tandis que tes dents s'entrechoquaient à un tel point que tu pouvais en sentir l’émail se fissurer. L’édredon glacé de ton lit t’avait fait l’effet d’un brasier hardant. La tête entre les mains, tu aurais voulu hurler à la mort, te décharger de cette douleur qui t’enserrait le cœur, mais t’en montrais incapable en cet instant précis. Incapable de laisser s'enfuir la moindre parcelle d'une faiblesse que tu sentais poindre sur le bord de tes lèvres. Alors, tu avais recommencé ce même manège. Déverrouiller la boite scellée, tracer cette ligne salvatrice de poudre ivoirine, inhaler pour oublier. La nervosité accablait le palpitant logé au creux de ta poitrine, le scindant de part en part avec un sadisme démesuré. La voix rauque de l’élève résonnait encore à tes tempes dans un grincement désagréable, te taquinant au sujet d’une Isis Cayrel un peu trop curieuse qui posait des questions à ton propos, réveillant par la même ta peur d’être percé à jour. Honor était apparue derrière toi, s’allongeant tranquillement à tes côtés, et caressait affectueusement la ligne séductrice de ta mâchoire alors que tu oscillais entre la conscience et le sommeil. Contact gelé et autrefois chaleureux que te procurait l’illusion de ta sœur défunte, mais qui cette fois ne tempérait pas ton corps ankylosé et agité par des spasmes incontrôlables. Mélange de ressentiment et de détresse, tu te faisais horreur d’être si faible lorsqu’il s’agissait de cela. Tu détestais la curiosité, surtout quand tu en étais le principal concerné. Tandis que tes prunelles s’amarraient à l’asphalte du plafond, ta sœur se redressait sur toi, caressant le relief de ta clavicule. «
Calme-toi Andro, personne ne sait. Notre petit secret est bien gardé… » murmurait-elle à ton oreille, mais pourtant tu sentais toujours cette désagréable sensation broyer tout ton être jusqu’à le réduire en cendres. Tu avais quitté Durmstrang parce que la vie y était devenue insupportable après l’accident d’Honorine. Les regards interrogateurs des élèves, leurs suspicions, puis leur fausse compréhension et leurs abjectes condoléances. Comme si tu avais eu besoin de leur chagrin et de leur fausse sympathie. Tu savais ce que les gens pensaient. Tu avais été un connard toute ta scolarité avec ceux qui ne faisaient pas le poids, tu avais fait la pluie et le beau temps là-bas, et ces mêmes élèves t’avaient finalement pris en pitié, quand d’autres disaient que tu méritais ce qui t’était arrivé. Mais la vérité c’est que personne ne pouvait comprendre. Ta jumelle était le semblant de paix et de lumière dans ta vie de ténèbres. Et quand elle avait quitté ce monde, les limbes t’avaient définitivement assimilées à elles, au point que tu peinais encore à en sortir aujourd’hui, diable enchainé aux refrains d’une maison sempiternelle qui ne relâcheraient jamais véritablement son emprise. Poudlard t’avait donné la quiétude et la solitude que tu cherchais. Seul Nathanaël était au courant de la mort de ta sœur, et c’était bien comme ça. Tu n’avais même jamais mis Anjelica dans la confidence, peut-être trop peu habitué à te livrer sur quelque chose d’aussi douloureux, ou par peur qu’elle aussi ne te prenne en pitié. Tu savais pourtant depuis votre réconciliation qu’elle avait perdu sa sœur ainée et qu’au fond, elle comprendrait ta douleur. Pourtant, le nom d’Honor n’avait jamais passé la barrière de tes lèvres en la présence de la Serpentard. Parce qu’elle appartenait au passé, et que tu t’étais reconstruit un semblant de vie en Angleterre, loin des terres glacées du grand nord. Pareillement tu t’étais toujours refusé à lui expliquer pourquoi une petite et fine cicatrice barrait ta joue droite, souvenir indélébile et direct de l’accident, qu’il t’arrivait parfois de cacher à l’aide d’un sortilège ou de laisser apparente aux yeux de tous. Tu savais que Nate était une tombe et que personne d’autre que lui ne devait savoir. Tu ne pouvais pas supporter l’idée que la blonde mène une sorte d’enquête sordide sur toi, de peur qu’elle ne découvre l’infâme mascarade qu’était ta vie au château. Que ton arrivée au Château reposait sur un odieux mensonge. Isis connaissait les liens gémellaires et était la plus à même dans toute l’école à pouvoir deviner qu’il te manquait la moitié de ton âme, le prolongement de ton corps. D’ailleurs, tu avais aussi fait l’expérience que la moitié de la gente féminine de Poudlard s’avérait incapable de garder un secret, et tu ne voulais pas que cet évènement si douloureux de ta vie soit relayé au simple rang de ragot de bas étage alimentant les commérages de toutes ces écervelées.
Tirant rageusement ton édredon sans même remarquer qu’Honor avait disparu, tu enfilais tes vêtements et sortis du dortoir des Poufsouffle en trombe. Tu ne pouvais pas te permettre de laisser planer le doute concernant Cayrel. Il fallait que tu lui remettes clairement les pendules à l’heure, avant qu’elle ne commette des dommages collatéraux irréversibles. D’ailleurs, tu n’eus aucun mal à la trouver, attendant patiemment que les septièmes années terminent leur cours mortellement ennuyeux d’histoire de la magie. «
Cayrel ! » A peine l’avais-tu vu sortir de la salle de classe que tu avais fondu sur elle comme un faucon sur sa proie, totalement indifférent au fait de bousculer quelques élèves au passage, d’ailleurs, les plus jeunes s’écartaient sur le tien. Tu l’as pris par le bras sans aucune douceur, l’acculant contre le mur, la dominant de toute ta taille. «
Tu sais quoi ? J’ai encore eu la désagréable surprise d’entendre ce matin que tu posais des questions sur moi à mes potes de dortoir». Tu vociférais sans la moindre peur d’être dur avec elle, tant sa curiosité te mettait hors de toi, réveillant quelque chose de profond au creux de ton être, une peur que tu n’avais pas ressenti depuis longtemps déjà. Quelques élèves se retournèrent en votre direction devant tes éclats de voix. «
Alors tu vois, je sais que je suis certainement un de tes plus grands fantasmes comme pour la moitié des filles de cette école, mais si t’as des questions à poser tu les poses directement à l’intéressé. T’as compris ? » Ton regard aurait pu la bruler vivante tant la rage t’irradiait le cœur. Comment pouvait-elle se permettre de s’intéresser à toi ? Qui était-elle d’ailleurs dans ce château pour poser des questions sur toi ? La petite blondinette sage à son papa chéri… ? Ou pas si sage d’ailleurs si l’on écoutait un tant soit peu les ragots qui trainaient sur son éventuel béguin pour les filles. Toutefois tu n’étais pas le genre de personne à te fier à ce que l’on racontait des gens. Tu en avais fait l’expérience : une petite rixe entre potes finit quelques jours après par être une baston générale, les propos étant déformés à l’infini par les idiots qui les racontaient.
Ce fut à cet instant précis que l’idée fugace te traversa l’esprit. En une fraction de seconde, tu posais un regard différent sur elle, ta colère soudainement envolée. Isis n’était pas le genre de fille que tu avais l’habitude de séduire ni de côtoyer. Tu ne la voyais quasiment jamais aux soirées auxquels tu avais l’habitude de participer toi et des amis. Ces soirées, temples de débauches ou les garçons aux ambitions mesquines se livraient sans résistance aux jeunes femmes manquant de compagnie. Elle n’avait rien de l’attitude hautaine et rebelle que tu pouvais affectionner chez Marloes, et elle était à des lieues du caractère d’écorchée vive d’Anjelica. Mais justement, n’était-ce pas cela ton problème, au fond ? Tu recherchais toujours ce même genre, ces filles effrontées qui te tenaient tête, et voilà ou cela t’avait mené. Marloes t’avait mené en bateau durant de longs mois, avant que tu ne l’as voit dans les bras d’un de tes meilleurs amis. Quant à Anjelica… Mieux valait ne pas en parler. Tu te raclais la gorge, enfonçant tes mains dans tes poches, visiblement décontenancé. Et si finalement, Isis était le genre de fille sage de bonne famille qu’il te fallait ? Bien sûr, avec la réputation de coureur qui te précédait, cela ne serait pas simple de lui apprendre à te faire confiance. Mais, pour la première fois depuis longtemps, l’envie de changer, d’évoluer en mieux pour quelqu’un te saisit les tripes. Tu relevais tes prunelles céruléennes vers elle, la considérant différemment, passant du chaud au froid comme tu savais si bien le faire. «
Alors va s’y je t’écoute, dis moi ce qui te chagrine à mon sujet. Qu’est-ce que j’ai de si incroyablement extraordinaire pour que tu te poses des questions sur moi ? » Tu croisais tes bras sur ta poitrine, priant les dieux du grand Nord pour qu’elle ne pose pas la fameuse question fatidique.
- Spoiler:
Ps : désolée pour ce poste pourri et tout ce temps d'attente je me rattraperai au prochain
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