Sarah & Liv

« Où le choix commence, finissent le paradis et l'innocence. »

Elle avait été horrifiée, atterrée, choquée. Elle avait nié, refusé de comprendre, elle s’était braqué, elle avait crié, hurlé, frappé. Elle avait perdu les pédales, pour la toute première fois dans cette foutue école. On lui enlevait sa Sarah. On lui prenait sa coéquipière, son amie, sa petite « Choupette », son rayon de soleil au quotidien. Et quand elle trouverait qui était ce « on », sur qui personne n’avait voulu mettre un nom ou une cause, ça se passerait mal, vraiment très mal. Sarah s’en allait, elle la quittait. Elle les quittait tous, eux, les Résistants. Sarah s’en allait pour … les Obscurs. Ce mot lui arrachait la bouche, à présent, ça lui crevait le cœur de se l’avouer, mais voilà, il le fallait. Elle n’était pas venue ce matin à la réunion, son siège était vide. C’est là, à ce moment précis, que Liv avait pris conscience de toute l’ampleur de cette annonce concernant Sarah. Elle ne reviendrait pas, plus du tout. Elle était partie pour de bon. C’était réel. La place vide à côté de la sienne le prouvait. Sarah qui avait été là avant elle, Sarah qui était devenue sa coéquipière, si vite, Sarah avec qui tout était plus drôle, plus facile, plus sympa, sa Sarah, elle n’était plus là, avec elle, pour se cacher sous une cape d’invisibilité, pour mettre de l’encre dans les affaires des Obscurs, pour courir comme des folles dans les couloirs pour échapper aux foudres de leur victime, avant d’éclater de rire.

C’était fini, le bon temps. Les autres allaient lui trouver une autre coéquipière, ou un autre coéquipier, tiens. Peut-être même, ferait-elle cavalier seule, dorénavant. Et c’était douloureux, tellement douloureux. Après tout, elle avait mit tellement d’efforts, de force et de temps à faire de Sarah une fille plus dure, moins fragile, un peu plus sadique, si ça avait été possible. Ca n’avait pas été une réussite, il faut l’avouer, la jeune Poufsouffle était restée aussi gentille et naïve. Son esprit sadique était resté aussi inexistant qu’à leur rencontre, mais bon, elle avait essayé au moins. Elle avait essayé, et peut-être avait réussi un peu, à l‘endurcir. Et maintenant, c’était d’autres qui allait en tirer profit. Encore que … C’était pas certain. Tout le monde savait qui était chez les Obscurs, et la plus grande majorité n’aimait pas Sarah, c’était bien connu. Peut-être qu’elle serait tellement malmenée qu’elle redeviendrait la petite fille fragile qu’elle était, tellement elle serait mal parmi eux. Peut-être même qu’elle reviendrait vers eux, les Résistants. Parce que les Obscurs, à part la petite Janet, ils n’étaient pas des enfants de cœur, et ils ne lui feraient jamais aucun cadeau, même si elle passait de leur côté.

Elle en était à cette partie de sa réflexion quand elle bouscula quelqu’un dans un couloir du troisième étage. « Mais bordel, tu peux pas faire attention ? Regarde où tu vas la prochaine fois ! Et qu’est-ce que tu fais dans cette partie de l’aile du troisième étage ? Bouge de là, ou je t’enlève des points ! » Bon, c’était un peu injuste pour ce pauvre quatrième année qui n’avait rien demandé à personne, mais il se trouvait au mauvais endroit, au mauvais moment, comme on dit. Et en plus elle était légèrement grossière. Bonjour l’exemple ! Mais elle s’en fichait, là tout de suite, elle s’en fichait comme la date d’anniversaire de l’Archiduchesse de je-ne-sais-où, ou encore de celle de sa bien-aimée et très estimée mère. Oui, même dans des moments critiques comme celui-là, il lui arrivait de faire de l’humour. C’était rare, mais possible.

Reprenant sa marche après avoir fait les gros yeux au môme qui se retournait à l’angle du couloir pour lui jeter un coup d’œil du genre « elle est timbrée cette préfète », Liv décida d’en avoir le cœur net et se mit en tête de chercher Sarah. Tant pis si ça lui prenait la soirée, elle allait la trouver et lui remettre les pendules à l’heure, à cette jeune inconsciente. Et malheureusement pour Sarah, quand on s’appelle Liv Lindgren, et qu’on a une idée dans la tête, on ne l’a pas ailleurs. Liv ne lâcherait pas le morceau avant d’avoir expliqué sa façon de penser à la jeune Mandleton. Et vu comme c’était parti, ça allait lui prendre un sacré bout de temps, d’abord pour la trouver, et ensuite pour lui faire comprendre qu’elle avait pas franchement choisi la voie de la simplicité. Ouais en gros, ça allait être long, parce que Sarah n’avait pas l’option je comprends les sous entendus que font les gens greffée dans sa jolie petite caboche.

Après s’être baladé d’un bon pas dans tout le Poudlard intérieur, avoir passé au peigne fin la salle commune et les dortoirs, être passée dans les cuisines, dans la salle de bains de préfets, au cas où, après avoir envoyé d’autres Poufsouffles désœuvrés qui n’avaient rien demandé à sa recherche sans succès, Liv aurait du s’avouer vaincue et l’attendre dans la salle commune. Mais, bien entendu, c’était hors de question, parce que si le ton devait monté, ce qu’elle n’espérait pas, elle ne voulait pas que ce soit au beau milieu d’une salle pleine de monde, monde qui aimerait surement avoir un ou deux ragots croustillants à se mettre sous la dent. La préfète se dirigea donc vers le parc, plus ou moins lassée de courir après son amie, mais toujours aussi motivée pour lui passer le savon du siècle.

« Non mais c’est une blague ? Si c’est ça, c’est pas drôle ! Sarah, fais pas ça ! Arrête toi, par le sang des … M*rde ! » Au moins, point positif, elle l’avait trouvé. Point négatif, Sarah se dirigeait à toute vitesse vers la forêt interdite. Et Liv qui se remettait à peine de son escapade avec Annie-Brooklyn n’avait visiblement pas d’autres choix, apparents bien sur, que de la suivre là dedans. Et c’est donc tout naturellement que ses nerfs avaient plus ou moins rendus les armes et qu’elle se retrouvait à déballer à voix haute tout un tas de paroles plus vulgaires les unes que les autres, à l’attention notamment de la forêt, du choix de Sarah qu’elle avait décidé de transposer sous forme de personne, pour pouvoir l’insulter à son gré, sans pour autant insulter Sarah de façon direct, des personnes qui avaient poussées la jeune fille à se diriger tout droit vers ce bois. Parce que c’était évident, même aux yeux d’un mal voyant - oui, celle-ci était nulle - qu’il s’était passé quelque chose un tout petit peu plus tôt pour que la poursuiveuse des Poufsouffles aille, consciemment, dans cet endroit, qui, en temps normal, aurait du la terrifier au moins autant qu’il terrifiait Liv maintenant.

En plus, pour couronner le tout, il allait faire nuit dans pas beaucoup de temps et on n’y voyait déjà plus grand-chose dans le parc, alors dans la forêt, ça allait être folklorique ! En y repensant avec un peu plus de concentration, Liv se rendit compte que les gens qui s’amusaient à y aller avaient une tendance pour y pénétrer juste avant la tombée de la nuit. « Faut croire que c’est plus intéressant. Genre c’est un rêve de gamines qu’elles réalisent. Ouais bon. En attendant, c’est quand même la deuxième ce mois ci, hein ! Ça commence à bien faire ! Je suis pas garde chasse moi ! C’est pas mon boulot ! Nan. Attends. Là, tu crapahutes dans la forêt parce que tu veux y aller pour choper Sarah. C’est différent. Avec Annie-Brooklyn, c’était ton rôle de préfète, là c’est ton rôle d’amie que tu joues. Confonds pas tout. » Elle se parlait à soi-même, à voix basse, pour se rassurer et créer une présence, pour ne pas s’avouer qu’elle était plus ou moins seule, là tout de suite, avec une impression étrange et angoissante d’être observée et écrasée par ces arbres un peu trop haut à son goût. Et toutes à ses réflexions, elle fini par trébucher sur une branche pour s’étaler de ton son long sur le sol, qui cette fois, était sec. S’époussetant, Liv se rendit compte qu’elle avait perdu Sarah. Poussant un soupir ennuyé, elle attrapa sa baguette et éclaira les alentours. « Lumos » chuchota-t-elle, pour ne pas se faire repérer par une horrible bête, comme la fois précédente. Il y eu une sorte de craquement sinistre près d’elle, et Liv ferma les yeux, très fort, pour se concentrer sur le sort de défense qui lui brulait déjà les lèvres. « Liv, LIIIV ! Ouhouh, je suis lààà ! » De surprise, Liv rouvrit les yeux et sa mâchoire se décrocha légèrement, lui donnant un air stupide pendant quelques secondes, avant qu’elle se reprenne, ferme la bouche et secoue la tête, complètement larguée. Il y a trente secondes, elle était persuadée d’avoir perdu Sarah au beau milieu de la forêt, et la, pouf, elle était en train de faire des gestes bizarres avec ses bras pour se faire remarquer. Haussant un sourcil, perplexe, la préfète monta à son tour les marches qui menaient à la cabane. Cabane qu’elle aurait bien aimé trouvé à sa précédente excursion ici, mais bon. Heureuse d’avoir échappé à une rencontre du troisième type, elle s’assit avec Sarah dans la petite maison en bois. Bon, elle sentait un petit peu le refermé et le moisi, mais il faut dire que l’air de la forêt était particulièrement humide, et c’était un miracle si le bois n’avait pas encore pourri, vu l’âge avancé que pouvait avoir cette bicoque. « Eh bah, si je m’attendais à te voir ! Il n’empêche que tu tombes à pic, j’aurai été incapable de retrouver Poudlard toute seule.» Le rire cristallin de Sarah emplit l’endroit, pour une raison inexpliquée. Était-ce le fait qu’elle aurait très bien pu rester coincée ici, toute seule, qui la faisait rire ? Si c’était le cas, elle était dérangée. Ou elle ignorait les dangers qu’elle courait ici, ce qui, connaissant la naïveté de la jeune fille, était tout à fait probable. « Mais en fait, qu’est-ce que tu fais là ? Enfin crois pas, je suis SUPER contente de te voir hein ! » Liv grimaça. Sa petite Sarah ne perdait pas le Nord, elle était peut-être naïve, maladroite et pas toujours très vive d’esprit, elle n’était pas non plus stupide. Elle lui devait bien la vérité. « Moi aussi je suis contente de te voir. Plutôt de te trouver, enfin ! Ça fait deux heures que je te cherche, et au moins dix minutes que je crapahute derrière toi dans ce bois. Qu’est-ce que tu fais ici toi, d’ailleurs ? La forêt interdite, est, comme son nom l’indique Sarah, interdite aux élèves, et si j’étais pas ici en tant qu’amie, je t’assure que je t’aurais botté les fesses en tant que préfète ! Tu en devrais pas être ici, et moi non plus d’ailleurs. Mais moi, si je me fais attrapé, j’ai une excuse, et toi aucune ! Tu devrais pas venir ici comme ça, tu sais. » Liv commençait direct avec un petit monologue, histoire de se calmer les nerfs, parce que sinon elle allait se mettre à crier comme une folle hystérique dans un peu moins d’une minute, à cause de la peur qui lui tordait les boyaux. « En plus c’est super dangereux, tu te rends compte ? On t’a jamais dit le genre de bestiole qu’on croise ici ? Moi je te dis, c’est pas joyeux, alors promets moi que tu viendras plus toute seule. Promets le, Sarah, tout de suite. » Oui, Liv avait des tendances mère poule avec ses amis, mais c’était pas nouveau. Sauf que c’était certaines fois sacrément embêtant, parce qu’elle passait pour la folle de service. « On rentrera plus tard au château, histoire d’être à l’heure pour le couvre feu. En attendant, je … Faut qu’on parle, Sarah. Comme des amies. Vraiment. » Se tortillant sur son coussin, Liv finit par se lever, et commença à faire les cent pas dans la maisonnette, pour évacuer la pression et la colère, sinon elle allait soit crier, et c’était pas la solution, soit se mettre à pleurer tellement elle était malheureuse. Elle jeta un coup d’œil par la fenêtre - qui, au passage, aurait bien besoin d’un coup de chiffon pour enlever la poussière -, et se tourna vers Sarah, s’appuyant contre le rebord de la fenêtre. La fixant dans les yeux, elle sentit les larmes lui monter aux yeux et les essuya rageusement. Pourquoi diable était-elle à ce point malheureuse ? Ce n’était pas son choix, pas sa vie, elle ne faisait que subir les conséquences d’un acte qu’elle jugeait si peu logique et réfléchit. « Pourquoi ? » La question avait été posée dans un souffle, à la limite de l’inaudible, et la voix, cassée, rendue rauque par cette volonté de ne pas éclater en sanglots, témoignait du chaos émotionnel qui agitait Liv. « Je ne comprends pas. Pourquoi ? A cause de quoi ? » La préfète savait bien sur qu’elle devait donner des précisions pour que son interlocutrice lui répondre, mais elle n’y arrivait pas. Et puis ce regard d’incompréhension total que portait Sarah sur elle finit par l’achever et Liv sentit une larme rouler sur sa joue. « Tu comptais m’éviter jusqu’à ce qu’un membre me le dise, ou tu aurais trouvé le courage de venir me le dire en face, Sarah ? » Il n’y avait pas de reproche, aucun, elle ne lui en ferrait jamais. Mais elle ne comprenait pas, vraiment pas. Elle avait comprit pour Ellio, elle avait accepté sans problèmes, mais Sarah, non, pas sa Sarah. C’était contre nature. « Dis moi pourquoi. Je ne sais pas, je ne trouve pas de réponse à mes questions. »

Sarah & Liv

« Où le choix commence, finissent le paradis et l'innocence. »

Si elle n’avait pas été aussi perturbée, refoulant désespérément une crise de larmes aussi importante que toute l’eau que pouvait contenir le Nil, Liv aurait surement esquissé un sourire devant la tête de Sarah, qui, comme c’était prévu, ne comprenait absolument rien à ce qui se passait. D’abord elle fit le poisson, puis baissa les yeux et rougit en réponse, puisque Liv ne lui permettait même pas d’en placer une. Mais bon, c’était mieux comme ça, après tout. Puis la Poufsouffle eut un mouvement de recul que Liv n’expliqua pas. Lui faisait-elle peur ? OH NON ! Surtout pas ! Elle ne voulait pas lui faire peur, elle voulait juste qu’elles aient une conversation, certainement un peu houleuse, c’est vrai, mais une conversation quand même. Et constructive, si possible, mais ça, c’était moins sûr. Et enfin elle sourit. Bon, là Liv était perdue. D’abord elle tirait une tête de dix pieds de long en reculant comme pour lui échapper, et après elle souriait. Il y avait confirmation que Sarah était la fille la plus imprévisible aux niveaux de ses changements d’humeurs que connaissait la préfète dans toute cette école. Mais elle eut quand même - alléluia !- une réaction de peur quand Liv lui parla de la faune de cette forêt. Ah tiens, elle aurait pu lui toucher deux mots sur la flore aussi, mais ça n’était plus trop utile, vu la tête qu’elle faisait, elle avait surement percuté qu’elle avait agit de façon pas très réfléchie. Et puis elle bougeait sa magnifique frimousse de haut en bas avec un telle vigueur et d’une façon tellement convaincue que Liv s’autorisa un tout petit sourire satisfait. Au moins, elle ne craindrait plus de retrouver Sarah dans cet endroit si peu fréquentable, et si peu fréquenté aussi. Dieu sait ce qui aurait pu lui arriver si elle ne s’était pas mit en tête de la chercher ! Et pour finir, comme c’était prévu, Sarah eu l’air totalement paumée, jusqu’à ce qu’un sourire apparaisse sur son visage et puis qu’il parte en fumée - ou presque -, et qu’une lumière de compréhension éclaire les yeux, les si jolis yeux de sa Sarah. Ça y est, elle percutait ! On y était, elle avait comprit ! Et une ovation pour la jeune Mandleton, une ! Ca avait été long, douloureux, larmoyant, mais elles y étaient ! La véritable conversation pouvait débutée.

« Tu parles de mon changement de camps là non ? » Il faut croire que le regard de Liv fut plus éloquent que les paroles coincées au fin fond de sa gorge, et les larmes qui brouillaient sa vue devaient encore accentuer la chose. Au moins le message était bien transmit. Comme elle n’y voyait plus grand-chose à travers ses larmes de crocodiles, Liv ne pu qu’entendre le soupir de soulagement lâché par la jeune fille en face d’elle. Pourquoi soupirait-elle de cette façon ? Elle s’attendait à quoi ? A quelque chose de pire ? Mais, que pouvait-il y avoir de pire que ça ? Liv était déboussolée et profondément attristée de comprendre que Sarah ne semblait pas mesurer toute l’ampleur de sa bêtise. En inspirant profondément, elle eut un petit hoquet, du notamment au sanglot qui avait réussi à lui échapper. Ca donnait quelque chose de très comique, bien que pathétique. « Je te promet, sur ma vie que plus jamais je n’irai dans la forêt interdite. C’est vrai quoi le nom m’a même pas choquée parce que c’était pire ce que je fuyais. » Levant les yeux vers Sarah, Liv failli lui demander ce qu’elle fuyait, mais elle se ravisa, préférant garder le silence. L’explication ne tarderait pas, c’était dans la nature de son interlocutrice de raconter sa vie de long en large, alors elle saura tôt ou tard ce qui l’avait poussé à venir ici. Et ça ne loupa pas, à peine avait elle pensé cela que Sarah lui apprenait qu’elle cherchait à échapper à Ariel, Cassiopée et Alistair, ses bourreaux habituels. Personne n’ignorait ce qu’ils faisaient subir à la Poufsouffle, psychologiquement parlant, bien entendu, mais personne ne pouvait y faire grand chose sur le long terme, puisqu’il aurait fallu, pour cela, être collé vingt quatre heures sur vingt quatre à la petite Sarah, et ça relevait du défi, faut l’avouer, car il faudrait arriver à suivre ce petit feu follet, et surtout, il faudrait arriver à supporter le fait que Sarah parle beaucoup, et tout le temps. Bien sur, au début, c’était mignon et tout, mais ça pouvait vite devenir lassant, même si la jeune fille ne pensait pas à mal - ça lui arrivait, de penser à mal, à Sarah ? -, ou alors, elle ne s’en rendait même pas compte. C’est donc pour ça que personne dans cette école ne pouvait défendre Sarah en permanence contre les Serpentards qui prenaient un malsain plaisir à la terrifier. Malheureusement, Liv ne pouvait pas faire grand chose contre eux, vu le piédestal sur lequel ils étaient installés si confortablement par le directeur de l’école. Et depuis que Liv l’avait entraîné dans leur salle commune, c’était presque évident que c’était encore pire pour elle, la pauvre. Se mordant la lèvre, Liv s’en voulu énormément, et elle murmura à Sarah : « Je suis désolée Sarah, j’imagine qu’ils te mènent encore plus la vie dure depuis qu’on a fait une escapade dans leur salle commune … » Et puis elle eut un espèce de flash bizarre qui lui rappela qu’elle était désormais du côté de ses bourreaux, et qu’avec un peu de chance, ou avec l’aide d’un miracle, ça leur passerait. Ou pas. Et puis, elle entendit : « Liv, calme toi, je vais tout t’expliquer mais avant tout ... je suis vraiment désolée j’espère que tu m’en veux pas trop. » Ce fut la phrase fatale, et Liv perdit le peu de calme et de maitrise de soi-même qui lui restait. Explosant, elle hurla : « Mais comment veux-tu que je reste calme Sarah ? COMMENT ! Tu me laisses, tu t’en vas, tu nous trahie, Sarah, merde quoi ! Fais chier cette histoire ! J’espère que tu as vraiment une très bonne raison, au moins ! » Bon, c’était pas sympa pour Sarah, là tout de suite, c’est sûr. Mais ça irait mieux après parce qu’elle se serait calmée et qu’elle ne voudrait plus hurler à pleins poumons sur tout ce qui bouge, ou sur tout ce qui ne bouge pas. Donnant un coup de pied rageur dans le vide, Liv était déjà en train de regretter d’avoir hurler tellement fort sur sa pauvre petite Choupette, après tout, elle avait dit qu’elles étaient amies, et les amies sont censées comprendre et accepter les décisions et les choix des autres. Oui mais bon, là c’était quand même fort de café, elle aurait pu venir lui parler, quand même ! Puis il y eut un minimum d’explications quand au silence qu’elle avait gardé jusqu’à il y a deux minutes. Explications qui apprenaient à Liv à peu près tout ce qu’elle voulait savoir, d’ailleurs. « Je pensais qu’à l’heure qu’il était tout le monde serait au courant et si je ne te l’ait pas dit, c’est parce que je l’ai dit à personne. Ah, première nouvelle ! C’est pas ce qui lui semblait, pourtant. J’avais peur tu sais, peur d’être rejetée, jugée, bannie. Un peu logique de la part des Résistants, Sarah, non ? Peur qu’on ne me considère plus comme une amie. Les vrais amis restent, il parait. Alors je me suis tue, j’ai changé de camp sans l’annoncer. C’était peut-être pas la meilleure des choses à faire si on ne voulait pas être jugée. Au goût de Liv, bien entendu. Après, ça n’avançait qu’elle. Enfin si certains sont au courant : Janet parce que c’est elle avec qui j’en ai parlé, oui, donc normal qu’elle ait changé de camp, Janet était la fille la moins impartiale du monde quand il s’agissait des Obscurs et de Sarah. Elle avait du essayer de la convaincre de les rejoindre, et elle devait être ravie, maintenant de voir que sa meilleure amie l’écoutait et qu’elle la rejoignait, tiens ! Lily parce que c’est quand même la principale intéressée, ça aussi, Liv le savait, c’était même Lily qui lui avait dit que Sarah ne viendrait plus, Mirka parce qu’elle m’a soutenue et … » Et ? C’était quoi ce silence ? Qui était encore dans ce coup là ? Liv eut une pensée pour un dieu auquel elle ne croyait pas, le priant pour que ce ne soit personne de détestable. Faut croire qu’il ne l’aimait pas beaucoup, si il existait, et qu’il n’était pas près à exaucer ses vœux tout de suite, vu la suite de la tirade de Sarah. « Xander. »

Liv s’étouffa, silencieusement, tout de même, avec le peu de salive qu’elle essayait péniblement d’avaler. McClary ? Pardon ? Qu’est-ce qu’il venait faire dans cette histoire celui-ci ? C’était ridicule. Comment Xander pouvait-il avoir joué un quelconque rôle dans le changement de camp de Sarah, il n’était pas son ami, ou alors ils se voyaient en secret, et il n’était pas non plus son copain. Alors quoi, c’était quoi son rôle à lui ? Liv eut très vite des réponses à ses interrogations, bien qu’elle aurait préféré alors ne rien savoir de tout ça, au final, en y repensant. « Xander c’est mon amoureux, je t’assure je l’aime comme une folle, mais pour que notre couple soit réel, je devais changer de camp. Je voulais pas le faire, j’ai beaucoup hésité, transivergé -ça existe comme mot ? c’est cool !- et tout mais je l’aime trop pour laisser passer une occasion pareille. Je t’assure. Mais j’ai déjà du mal à reconnaître que j’ai fait ce choix, alors le dire c’était pire, ça le rendait plus réel encore et … » L’expression que devait afficher Liv était sûrement mémorable. Un mélange de stupeur, d’incompréhension, peut-être même de dégout, et elle avait la bouche ouverte - ça devient une habitude, là ! -, sous le choc de l’annonce. Ouais, mémorable, la tête, genre un espèce de poisson neurasthénique, parce que là, elle n’arrivait même plus à réfléchir correctement, ou ne serait-ce qu’à bouger. Elle détestait déjà McClary, et sans raison valable. Elle ne pouvait juste pas le voir, même pas en peinture, alors là, c’était le pompon ! Il venait de lui en donner, une, de raison pour se faire haïr encore plus. Il lui avait demandé de changer de camp ! Il avait osé ! Et le pire, c’est qu’il avait réussi. Et pourquoi ? Parce qu’un Obscur ne pouvait pas s’afficher avec une Résistante ? Et pourquoi c’était à Sarah de changer, hein ? Si il l’aimait aussi, il aurait pu changer de camp aussi, ou la prendre avec ses défauts, ses qualités, et avec son choix de camp ! Mais non, forcément, fallait qu’il lui demande de changer, pour pouvoir avoir un couple « réel » ! Elle le haïssait, ô combien elle le haïssait maintenant. Puis elle remarqua une larme sur la joue de Sarah, et elle se dit qu’il serait pas mal qu’elle réponde quelque chose. Mais quoi ? Paroles en l’air ? Promesses rassurantes qu’on a pas l’intention de tenir ? Non, ce n’était pas son genre, vraiment pas.« Je suis désolée, vraiment désolée, mais je voulais pas en parler parce que c’est pire et je vois bien que je t’ai déçue. C’était ça le pire pour moi, décevoir les gens. Mais tu m’as appelée ‘amie’ toute à l’heure, j’espère que tu seras toujours mon amie. Pour moi tu seras toujours la meilleure des coéquipières, la plus gentille et la plus adorable. Celle qui m’a soutenue, aidée et apprit. S’il te plait, reste mon amie. Je je » Elle était désolée. Est-ce que ça changeait vraiment quelque chose, au fond ? Elle n’avait pas déçue Liv, finalement. Non, elle ne l’avait pas déçue. Juste blessée. Mais soit. Elle passerait outre, ou elle tenterait de passer outre. Sans un mot, la préfète la regarda se lever pour partir, faire quelque pas, et se rasseoir. Elle ne l’aurait pas retenue, ce n’était pas la peine. Soupirant, Liv alla s’asseoir à côté de Sarah sur le canapé, et la prit dans ses bras, pour la rassurer. Lui caressant les cheveux, le menton posé sur la tête de la jeune fille, Liv réfléchissait à ce qu’elle allait bien pouvoir lui dire, là tout de suite. Surement pas tout ce qu’elle avait pensé à l’instant, parce que c’était blessant pour une fille amoureuse.

Inspirant un grand coup, elle se lança. « Transivergé, ça n’existe pas comme mot à ma connaissance, je pense que tu voulais dire tergiversé plutôt. Je n’aime pas le fait que tu ais changé de camp, et ça tu le sais. Mais il parait que les gens font des choses folles par amour, et comme je n’ai aucun moyen de savoir si c’est vrai ou non, parce que je ne suis pas amoureuse, je vais mettre ton acte sur le compte d’un amour un peu fou pour un … garçon. Elle évita quand même l’insulte qui lui brulait les lèvres, parce que ce n’était pas très sympa. Après tout, si sa Sarah avait pu tomber amoureuse de lui, peut-être n’était-il pas aussi détestable que ce qu’elle pensait. Mais j’avoue ne pas comprendre. Si il t’aimait vraiment pour ce que tu es, pour tout ce que tu es, il ne t’aurait pas demandé de changer de camp, avis absolument personnel, bien entendu. Autre chose, Sarah, changer de camp, ça ne voulait pas forcément dire rejoindre les … Obscurs, tu sais. Il y a trois camps dans cette école, nous … Attention Liv, tu fais une boulette là ! Euh … Les Résistants, les Impartiaux, et les Obscurs. Tu aurais très bien pu rejoindre les Impartiaux, tu sais, ça aurait fait moins de vagues. Mais enfin, ce qui est fait, est fait, malheureusement. Quand au fait que tu m’ais déçue … Ce n’est pas le cas, Sarah. Tu ne m’as jamais déçue, et tu ne me décevras jamais. Je suis juste blessée, mais ça ira, tu verras. Elle lui embrassa le haut du crâne, pour lui prouver qu’elle n’était pas déçue. Ah, et Sarah, je ne cesserais jamais d’être ton amie. Les vrais amis restent, quoiqu’il advienne. Tu as fait un choix par amour, il ne me plait pas, mais je n’ai pas à te juger là-dessus, parce que je ne le peux tout simplement pas. »

Regardant loin devant elle, par delà les murs de cette cabane, par delà cette forêt, Liv s’imagina le château, et dedans, tranquillement installé dans sa salle commune, Xander McClary. Elle eut un sourire mauvais, et eut pour lui une pensée qui se voulait menaçante. Il ne l’entendrait jamais, mais il avait semé la discorde, il allait marcher désormais sur une corde raide. Je te hais, McClary, pour ce que tu as fait. Fais un seul faux pas avec elle, blesse la, fais la pleurer une seule fois, fais lui du mal, et je viendrais m’assurer personnellement que ta petite vie ne soit plus jamais la même, McClary. Je te ferais vivre un enfer, le même que celui qui commence pour moi sans Sarah. Fais attention à tes arrières.

Sarah & Liv

« Où le choix commence, finissent le paradis et l'innocence. »

Lorsque le remerciement de Sarah arriva aux oreilles de la préfète, celle-ci eut un sourire, à mi chemin entre l’amer et l’attendri. De quoi la remerciait-elle ? De rester à ses côtés malgré ses choix ? D’essayer de la comprendre ? De mettre de côté cette part d’elle qui lui hurlait de lui mettre une paire de claques pour la faire revenir dans le droit chemin ? Mais quel était le droit chemin ? Était-ce vraiment celui qu’elle avait choisi, n’était-ce pas celui de Sarah et de tant d’autres ? Pourquoi avait-elle l’impression que son monde éclatait juste parce que sa partenaire s’en allait ? Un instant, infime, elle crut ne pas posséder de réponse à cette dernière question, mais celle-ci s’imposa d’elle-même à son esprit torturé et fatigué. Son monde éclatait car il était fragile, tangible, et qu’il n’avait eut jamais qu’un équilibre précaire que Sarah avait, sans le vouloir bien sûr, brisé. C’était contre nature que Sarah aille rejoindre ces … ces gens là. Mais Liv ne partagea pas sa pensée avec son amie. Ce n’était plus la peine.

Elle avait fait son choix. Elle ne reviendrait pas.


« « Je suis désolée, vraiment. Ça elle l’avait bien comprit, mais ça ne changeait plus grand-chose, et puis si Sarah pensait que c’était une bonne chose à faire, alors elle ne devait pas s’excuser. Je me rendais pas compte en fait je pense. Il l’aurait fallu pourtant … Enfin je sais pas. J’ai beaucoup réfléchit, je t’assure, j’ai pas dit mon changement de camp comme ça d’un coup, ça traîne depuis … euh janvier si je me trompe pas, donc j’ai vraiment mis du temps. » Et elle ne leur avait rien dit ! Elle n’était pas venue lui en parler alors qu’elle traînait ce poids depuis aussi longtemps ! Liv fit la moue. « Tu aurais du m’en parler, Sarah, ce n’est pas bien de garder un truc comme ça pour soit aussi longtemps. Et puis ce n’est pas juste, tu ne t’es tournée que vers des Obscurs pour savoir si tu devais le faire … J’aurais aimé te donner mon point de vue avant que tu ne prennes une décision radicale pour ton avenir, Choupette …». Elle avait dit ça dans un demi sourire, amusée. Finalement, elle pourrait l’accepter. Parce qu’elle voulait garder Sarah près d’elle, alors Obscure, Résistante, Impartiale, malade ou en bonne santé, heureuse ou malheureuse, amoureuse ou non, en couple ou non, elle s’en fichait pas mal, au final. Elle voulait juste garder près d’elle son rayon de soleil.« Et donc j’ai pesé le pour du contre - ah, vraiment ? Et elle avait trouvé plus de pour que de contre ? Épatant ! -et tout plein de choses mais je t’assure pour Xander ça en vaut le coup. Cette réplique tira une grimace peu convaincue à la demoiselle, mais elle ne pipa mot. Je l’aime, tellement. Encore heureux, pensa Liv ! Manquerait plus qu’elle fasse ça sans être amoureuse ! Et il est si gentil et attentionné, c’est même pas lui qui m’a forcé, il m’a dit que c’était beaucoup plus mieux pour sa famille. Oui, en gros, il lui avait forcé la main d’une façon légèrement détournée. Parce qu’ils m’accepteront pas sinon, et que moi je veux qu’ils m’aiment, pas autant qu’ils l’aiment lui mais c’est pas grave, juste un peu. Tu imagines s’ils ne m’aiment pas ? » Les yeux en formes de soucoupes firent rire Liv aux éclats. Décidément, elle avait des préoccupations vraiment … Intéressantes. Reprenant difficilement son souffle, Liv s’essuya le coin de ses yeux, d’où perlaient des larmes, tellement elle avait rit devant l’air catastrophé de son amie. « Mais ce n’est pas si grave, Sarah, s’ils ne t’aiment pas. A la limite on s’en fiche. Ce n’est que sa famille, c’est pas très important … En fait si un peu quand même, parce que c’est des Mangemorts, va savoir quel sale coup ils pourraient te faire … Oups, une boulette. C’était pas trop une chose à dire à une petite amie en proie à des questions existentielles sur sa belle famille. MAIS ! Xander t’aime - bon sang, ça lui écorchait la bouche de dire ça !-, et comme ils aiment Xander, et qu’ils ne veulent pas lui faire de la peine, ils ne te feront rien. Et puis si jamais ça se passe mal, évite les simplement. C’est pas comme si vous étiez mariés, tu n’as pas besoin d’assister aux dîners de famille, alors tiens toi loin d’eux, et tout ira … Ouais, tout ira pour le mieux ! ».

Elle tenta un sourire rayonnant, qui ne du pas être très convaincant, mais qu’importe. Elle avait, tant bien que mal, rattrapé son erreur. « Il faut rencontrer les parents quand d’ailleurs ? C’est toujours lui qui en parle parce que moi je sais pas, c’est mon premier amoureux donc je ne sais pas du tout du tout ! J’ai tellement peur de faire des bêtises, j’en fais tout le temps. D’ailleurs j’en ai fait une en changeant de camp et comme tu n’es pas très contente, je veux pas en faire plein d’autres. Je je. » Liv s’étouffa presque en avalant sa salive. Stop ! Pause ! Retour en arrière demandé par une des protagonistes de la pièce ! C’était une blague ? Sarah venait de lui demander des conseils pour son couple. Souriant tendrement à son amie, Liv passa sa main dans ses cheveux, légèrement gênée. Elle ne savait pas trop quoi lui répondre, elle ne connaissait pas du tout, mais genre, vraiment pas du tout ce genre de choses. Ces aspects là de la vie de couple, ça ne lui disait rien. Niet. Zéro. Nul. Nada. Des clous. Que dalle. Liv dut se rendre à l’évidence, elle n’y connaissait rien en histoire de couple. Faut dire aussi que ça ne la branchait pas plus que ça, pour l’instant, de se pavaner la bouche en cœur, au bras d’un garçon, devant toute l’école. Encore que c’était peut-être un peu stéréotypé, parce qu’après tout, Sarah n’avait encore pas fait ça. Haussant les épaules, elle fit un sourire d’excuse à son interlocutrice. «  Je ne sais pas Sarah. Les histoires de couples, c’est pas mon rayon. Je suis jamais sortie avec un garçon dans le but d’une relation sérieuse, tu comprends ? Alors on a jamais vraiment parlé des rencontres avec les parents, et tout … C’était pas notre soucis premier. Après, j’imagine que si il t’en parle, c’est que c’est important pour lui, alors … Ce serait peut-être pas mal que tu acceptes de les rencontrer … rapidement, dirons nous. Attention, je dis pas que demain tu dois lui dire que tu veux les voir, hein ! Je dis juste que faudra que tu y réfléchisses quoi. Et puis Sarah, si tu l’aimes vraiment, et si il t’aime aussi, alors ton changement de camp, ce n’était pas une bêtise. C’était une preuve d’amour. Et tu ne feras pas de bêtises. J’ai confiance en toi, tu vas gérer la situation comme une chef ! » Lui adressant un clin d’œil espiègle, elle lui ébouriffa les cheveux, et l’attira contre elle pour un câlin je-t’étouffe-mais-c’est-pas-grave dont elle seule avait le secret. A la remarque sur le fait qu’être dans le même camp que Janet, c’était cool, Liv haussa un sourcil, peu convaincue. Pendant un très, mais alors, très bref instant, elle plaint les Obscurs de se retrouver avec ces deux là dans le même camp. Ça promettait d’être animé. « Mais toi, tu n’as pas des choses chouettes à me raconter ? Comme ça, on parle plus de ma bêtise et tu seras plus contente ? Non ? ». Des choses chouettes à lui raconter ? Non, même en cherchant bien, Liv ne trouvait pas. Elle n’avait rien à lui dire, tant sa vie se révélait plate et sans intérêt aucun ces derniers temps. Lâchant un soupir désabusé, Liv secoua négativement sa petite tête blonde en faisant une moue désolée. Ça commençait à faire beaucoup de mimiques désolées là ! C’était pas bon signe. Mais c’était toujours comme ça, avec Sarah. Donc ça n’avait rien de choquant. Enfin pas trop. Quoique … Pourquoi il n’y avait qu’avec Sarah que son visage était assorti d’un air désolé presque tout le temps ? C’était louche. Trop louche. Il fallait que cela cesse ! Ou peut-être pas … Après tout, si c’est juste avec Sarah, c’est que ce n’était pas récurrent, et donc pas trop … contagieux. En gros pas trop de risques que cet air désolé se généralise avec tout le monde. « HAN ça me manque trop les missions, tu as fait des trucs chouettes depuis ? » Euh ? Sérieusement Sarah ? Liv failli éclater de rire, avant de voir la tête sérieuse de Sarah - oui, Sarah avait sa propre tête sérieuse, la majorité des gens ayant une tête sérieuse bien plus … eh bien, bien plus sérieuse- et ravala son rire au fin fond de sa gorge. Lançant un regard appuyé à son amie pour lui signifier qu’elles ne pouvaient désormais plus parler de cela, la demoiselle se tortilla, gênée. C’était étrange d’avoir des sujets tabous avec elle, mais ce serait désormais leur quotidien. Ne pas laisser échapper d’informations, surveiller ce qu’elle disait sur les autres en présence de Sarah, surveiller son comportement. Faire attention à tout, en gros. Ça allait être fichtrement difficile. « OH. Est-ce que ça veut dire que je ne pourrais plus être au courant ? Han ni faire des binômes avec toi et tout, oh mais c’est pas drôle tout ça, moi j’aimais bien m’amuser avec toi ! Bon les réunions ça me manque pas trop, je comprenais rien, comme chez les obscurs d’ailleurs mais au moins je joue avec Janet. Et oh. Zut, ça veut dire que je ne peux pas en parler non plus. Mais euuuuh, c’est nul çaa ! Liv joua un instant à enrouler une mèche de ses cheveux blonds comme les blés autours de son index, cherchant une réponse correcte. «  Eh bien … Tu ne seras plus au courant de ce que nous faisons, comme nous ne serons pas ce vous faîtes. Quelque part, c’est plus que logique, non ? Elle haussa les épaules, fataliste. C’était couru d’avance que tout ça nous sépare. J’imagine que pour les binômes de cours, les autres trouveront louche le fait qu’on se mette ensemble de notre plein gré, alors peut-être qu’on ne pourra plus, c’est vrai. Sauf lors des binômes imposés, si avec un peu de chance on est mises ensemble. J’aimais aussi m’amuser avec toi Sarah, c’était sympa ! Et puis ça faisait passer le temps, c’était cool, ça changeait du quotidien morne et sans saveurs … Là tout est fade, terne. C’est redevenu comme avant, comme quand je ne te connaissais pas. C’est chiant quoi.  » La remarque sur les réunions lui arracha un sourire attendri. Il était de notoriété publique que Sarah ne comprenait jamais rien à ce qui se disait chez les Résistants, mais ça faisait son charme, et Liv prenait plaisir à tout lui réexpliquer par la suite. Mais tout ça, c’était fini. Dommage. Non, plus que ça.


« Bref, une autre idée de conversation ? » La question de Sarah tira Liv de ses pensées, et elle secoua légèrement la tête de gauche à droite pour signifier qu’elle n’en avait aucune. Un silence s’installa dans la cabane, mais Liv ne le trouva pas pesant. C’était juste ressourçant. Elle profitait de cet instant. Car quand elles franchiraient les portes de Poudlard, plus rien ne serait vraiment comme avant. Elle porta distraitement son médiateur à ses lèvres et se mit à le mordiller, anxieuse. Que se passerait-il ? Serait-elle séparée de Sarah ? Pourraient-elles encore parler ensemble sans éveiller des soupçons infondés ? Devraient-elles couper contact ? Et Xander ? La laissera-t-il côtoyer ouvertement des Résistants ? Oui. Il n’avait pas le choix. Sinon elle s’occuperait personnellement de son cas. Il ne pouvait pas empêcher Sarah de parler à ses amis, si ? Une étincelle de malice s’alluma dans les yeux de Liv et elle se tourna vivement vers Sarah. «  Parles moi de toi et de Xander. Après tout, j’ai le droit de savoir comment ça s’est fait tout ça, si déjà tu me quittes pour lui ! » Il y avait une légère pointe d’ironie dans sa voix. Mais maintenant, mieux valait-il en rire qu’en pleurer, de cette histoire de couple et de changement de camps.

N’est-ce pas ?